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Après le microcrédit, la micro-assurance

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Vendre des assurances dans un quartier déshérité où circulent des charrettes tirées par des chevaux et où les maisons sont fabriquées en terre, plutôt étrange, non ? Mais les vendeurs de Liberty Mutual ont bel et bien quelque chose à offrir aux familles pauvres qui habitent ce bidonville au nord de la ville de Barranquilla. Pour 3 000 pesos par mois (moins d’1,40 euro) les habitants souscrivent une assurance-vie.

« Avant, les assurances coûtaient trop cher, explique Luis Marmolejo, employé dans le bâtiment, qui a souscrit un contrat chez Liberty Mutual. Mais 3 000 pesos ce n’est rien. Ces assurances à bas coût, ou micro-assurances, offrent une couverture en cas de mort due à un accident, de maladie, de perte de récolte et de catastrophes naturelles.

Selon les experts du développement, la micro-assurance pourrait devenir l’outil clé du combat contre la pauvreté. Les familles pauvres sont les plus exposées aux risques, mais ne sont presque jamais couvertes. « L’idée consiste à assurer la classe ouvrière et les pauvres, explique Lilian Perea du bureau d’assurance RSA à Bogota. Ces gens constituent la majorité des citoyens, et pourtant ce sont les moins protégés. »

 

La micro-assurance comme complément du microcrédit

 

Michael McCord dirigeait un programme de microcrédit en Afrique dans les années 1990. Il explique que ce dont ses clients ont réellement besoin est une assurance. « Les titulaires d’un microcrédit sont fragilisés. Un seul soubresaut financier peut les renvoyer dans une profonde pauvreté, assure-t-il. Je vois ces gens monter leur entreprise, augmenter leurs profits grâce au microcrédit, mais dès que la famille doit faire face à une urgence médicale ou à un décès, tous ces gains sont perdus. »

En 2000, de retour aux États-Unis, Michael McCord fonde le Centre de la micro-assurance et met au point des polices d’assurance pour les pauvres. Les compagnies commerciales, la Fondation Gates, l’Organisation internationale du travail et des associations religieuses ont commencé à promouvoir de la micro-assurance.

Mais elle n’est pas un remède miracle à tous les maux.

Elle est d’ailleurs bien plus compliquée à mettre en place que le microcrédit : au contraire du microcrédit, qui fournit aux plus pauvres des liquidités, la micro-assurance demande à des gens qui subsistent de chercher dans leurs poches trouées de quoi payer quelque chose dont ils n’auront peut-être jamais besoin.

D’où le casse-tête de l’encaissement des primes d’assurance. Presque la moitié des nouveaux assurés en Colombie abandonnent au cours de la première année car ils sont incapables de payer même les sommes modiques des micro-assurances, assure Lilian Perea de chez RSA. Par conséquent certaines compagnies d’assurance se sont alliées aux services publics. À Barranquilla, par exemple, les frais d’assurance de Liberty Mutual ont été intégrés dans la facture mensuelle de gaz naturel des souscripteurs.

 

Le privé à la rescousse des pouvoirs publics

 

Pour l’heure, près de 150 millions de personnes dans le monde sont couvertes par des micro-assurances, soit deux fois plus qu’il y a cinq ans. Si la Chine et l’Inde sont les marchés les plus développés, on observe un boom de l’assurance « low cost » au Brésil, au Mexique et en Colombie. L’assurance-maladie est l’une des plus vendues car bon nombre de ces pays n’offrent pas de couverture maladie universelle à leurs citoyens.

Selon Lilian Perea, les équipes de RSA en Colombie vendent 60 000 micro-assurances par mois, la plupart pour une couverture santé. Selon elle, les compagnies d’assurance espèrent faire des profits en vendant ces polices d’assurances en masse. Mais contrairement au microcrédit qui connaît actuellement une crise, la micro-assurance est à l’abri de l’effondrement, selon ses défenseurs : si les assurés ne peuvent plus payer, ils ne seront tout simplement plus assurés. Les pauvres trouvent cet arrangement sans risque attrayant, c’est pour cette raison que les vendeurs de Liberty Mutual arrivent à séduire de nombreux nouveaux clients dans les villes comme Barranquilla.

L’un de ces vendeurs se souvient avoir donné 6 000 dollars à une famille après qu’un assuré a été tué au couteau… Dès le lendemain, les gens faisaient la queue dans la rue pour prendre une assurance.

 

Global Post / Adaptation JOL-Press.

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