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L’Humanité, quotidien engagé

 

L’« Huma » de Jean Jaurès : socialisme et lutte des classes

 

Jean Jaurès est né à Castres le 3 septembre 1859, il est mort assassiné à Paris le 31 juillet 1914 par Raoul Villain. Le parcours universitaire de Jean Jaurès en ferait pâlir plus d’un : après des études à Louis-le-Grand, il est reçu premier à l’École normale supérieure en philosophie en 1878, devant Henri Bergson. Trois ans plus tard, il est reçu troisième à l’agrégation de philosophie. Dirigeant socialiste, il est connu pour son pacifisme – qui lui coûte la vie en 1914.

L’Humanité est fondé le 18 avril 1904. Pour son fondateur, le quotidien socialiste, sous-titré « Journal socialiste quotidien », doit avant tout unifier les diverses mouvances socialistes françaises. Dans un second temps, le socialiste souhaite qu’il devienne un pilier de la lutte contre le capitalisme.

 

L’indépendance comme leitmotiv

 

Jean Jaurès fixe les grandes lignes de son journal dans son premier éditorial : le souci d’une information exacte pour donner « à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde », et l’indépendance financière, condition nécessaire (mais non suffisante) de l’indépendance politique.

En outre, le journal s’entoure d’une équipe de rédacteurs de qualité parmi lesquels René Viviani, Aristide Briand, Léon Blum, Jean Longuet, Lucien Herr, Jean Allemane, Octave Mirbeau, Henry de Jouvenel, Abel Hermant et Albert Thomas.

 

L’unification socialiste amène de nouveaux lecteurs

 

Au moment de sa création en 1904, L’Humanité n’est le journal de référence que pour une infime frange des socialistes français – les courants sont très nombreux.

L’unification des socialistes au sein de la SFIO en 1905 change la donne : le journal parle désormais pour l’ensemble des socialistes français. Six ans plus tard, la SFIO fait de L’Humanité son organe officiel au congrès de Saint-Quentin en 1911.

 

Difficultés financières et assassinat

 

Le quotidien connaît d’importantes difficultés financières pendant la première décennie : malgré un lancement à 140 000 exemplaires, les ventes retombent à 15 000 exemplaires quelques mois plus tard.

Pour ajouter aux épreuves que traverse le journal, plusieurs chocs se succèdent au cours de l’été 1914 : son directeur, Jean Jaurès, est assassiné par le nationaliste Raoul Villain le 31 juillet, la première guerre mondiale est déclarée quelques jours plus tard et une majorité des dirigeants socialistes français se rallie à l’Union sacrée. Ces événements déstabilisent un temps le journal.

 

L’organe du Parti Communiste français

 

Suite au Congrès de Tours, la SFIO devient la « Section française de l’Internationale communiste », puis plus tard le Parti communiste. C’est à cette occasion que L’Humanité devient l’organe officiel du PCF.

Logiquement, la ligne éditoriale du journal suit la ligne politique du PCF. Seulement, certaines voix s’opposent à cette position. Ainsi, la stalinisation du parti entraîne le départ de plusieurs plumes du journal, tels Alfred Rosmer, Boris Souvarine, Pierre Monatte, Amédée Dunois et Pierre Kaan.

Interdit à partir de 1939 sous le gouvernement Daladier, L’Humanité paraît clandestinement pendant les cinq années suivantes (383 numéros diffusés à 200 000 exemplaires), et joue un rôle important dans la Résistance.

Prosoviétique pendant la guerre froide, le journal soutient partout dans le monde les luttes de libération nationale (décolonisation) ; ce qui lui vaut de nombreuses interdictions de parution notamment durant les guerres d’Indochine et d’Algérie.

 

L’Humanité se détache peu à peu du PCF

 

Le bandeau « organe central du PCF » est remplacé par « journal du PCF » après la réforme du congrès du PCF de 1994 et entièrement supprimé en 1999. Le PCF demeure néanmoins « l’éditeur » du journal mais ne dirige plus officiellement le journal bien que les liens restent forts entre le PCF et son ancien organe officiel.

 

Le journal frôle la faillite

 

Les ventes de L’Humanité chutent à 46 000 exemplaires en 2002. Sa survie fragile est assurée par le produit de ses ventes et des appels à souscriptions réguliers. Le journal est même forcé d’ouvrir son capital au privé en 2000, tout en garantissant son indépendance politique. Mais une dette de 8 millions d’euros pèse sur le journal : le quotidien doit vendre son siège, ce qui doit lui permettre de résorber le déficit. Or la vente ne se conclut pas : le journal est alors dans une situation catastrophique et au bord de la faillite. Un nouvel appel à une souscription exceptionnelle est lancé en désespoir de cause par le quotidien. Elle résorbe une partie du déficit.

 

L’après-crise, temps de la modernisation

 

Grâce à une situation financière moins préoccupante, le quotidien se modernise : un supplément des Lettres Françaises paraît désormais le premier jeudi de chaque mois. Quelques mois plus tard, L’Huma amorce une nouvelle stratégie : multiplier les numéros spéciaux avec un rédacteur en chef du jour choisi parmi des personnalités en vue (comme Christophe Alévêque, Bernard Thibault, François Morel, etc.). Le journal organise chaque année la très réputée fête de l’Humanité, festival dans lequel se bousculent de nombreux artistes en vogue et qui rassemble environ 600 000 personnes. L’Humanité cherche ainsi à reconquérir son audience et à séduire de nouveaux lecteurs.

Aujourd’hui, le quotidien continue de se revendiquer des valeurs de son fondateur Jean Jaurès bien que le journal ait évolué.

 

Bibliographie

 

L’Humanité de Jaurès à nos jours, Christian Delporte, Claude Pennetier, Jean-François Sirinelli et Serge Wolikow, Ed. Nouveau Monde Éditions : tous les aspects d’une histoire aux multiples facettes, qui relie L’Humanité de Jaurès au quotidien d’aujourd’hui. Les contributions des meilleurs spécialistes de la presse, du socialisme et du communisme, historiens, politiques, sociologues ou littéraires.

Jean Jaurès, Jean-Pierre Rioux, Ed. Librairie Académique Perrin : entre biographie et essai, un livre salué par la critique et succès d’édition, il évoque l’orateur hors pair, le philosophe, l’intellectuel et l’historien, le défenseur des droits de l’homme, l’homme de la paix, l’adversaire du colonialisme.

 

En bref

 

Pays : France

Périodicité : quotidien

Genre : généraliste

Diffusion : 85 085 ex. (2009)

Propriétaire : Société nouvelle du journal L’Humanité

Site Web : www.humanite.fr

Directeur de la rédaction : Patrick Apel-Muller

Adresse : 164 Rue Ambroise Croizat – 93200 Saint-Denis

Téléphone : 01 48 20 38 06

 

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