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Barack Obama prend rendez-vous avec l’Histoire

L’American Dream, valeur intemporelle

C’est un point commun à la plupart des grands discours qui ont marqué l’histoire politique des États-Unis, le pendant outre-Atlantique de l’appel aux valeurs républicaines : l’évocation du « rêve américain ».

Barack Obama n’y a pas résisté : « Ces hommes et ces femmes ont grandi dans une Amérique où l’effort et la responsabilité étaient récompensés […] N’importe qui pouvait réussir en Amérique », a-t-il lancé, grave, dès les premiers instants de son intervention.

Applaudissements à gauche… et à droite.

Il se livre alors à un constat amer, signe de la dureté des temps présents : « Depuis des décennies maintenant, les Américains assistent à l’effritement de ce principe essentiel. » Le message se veut clair : l’objectif de l’American Jobs Act est simple, il faut sauver l’économie américaine et soulager les Américains qui souffrent : « Remettre les gens au travail et faire en sorte que ceux qui travaillent gagnent davantage. »

Barack Obama martèle son message, sans se priver d’une forme de lyrisme : « Il y a un fil conducteur qui court tout au long de notre histoire – une croyance, celle selon laquelle nous sommes tous connectés et qu’il y a certaines choses que nous ne pouvons faire qu’ensemble, en tant que nation », insiste-t-il. Son message s’adresse au Congrès, mais sa portée va bien au-delà. Le président s’adresse à la nation, qui sera prise pour témoin, si besoin, en cas de blocage parlementaire.

Applaudissements sur tous les bancs.

Pour la forme, le coup de chapeau de Barack à Abraham

Inutile donc de chercher des bouc-émissaires, il renvoie dos à dos les administrations des deux camps. L’enjeu dépasse tous les clivages partisans. Ce qui est en cause, c’est l’essence même de la nation américaine, les ressorts de la cohésion nationale.

Pourtant, après le recul électoral au mid-term de novembre 2010, l’administration Obama ne contrôle plus la Chambre des Représentants et ne dispose plus d’une majorité suffisante sur l’ensemble du Congrès. Le président doit donc composer, convaincre. Il en appelle à l’« union nationale », fût-elle de circonstances : « La question est de savoir si, en proie à une crise antinationale persistante, nous pouvons laisser de côté le cirque politicien et réellement entreprendre d’aider l’économie. »

Puis, fin politique, le président démocrate évoque en appui celui qui, de tous ses prédécesseurs, incarne sans doute le mieux l’unité nationale pour l’avoir préservée dans des temps autrement plus périlleux, Abraham Lincoln. « Nous nous souvenons tous d’Abraham Lincoln comme du leader qui a sauvé notre Union. Fondateur du Parti républicain. Mais, en pleine guerre civile, il fut aussi un dirigeant responsable résolument tourné vers le futur », vibre-t-il. Rien de tel qu’un des leurs, le père-fondateur de leur « Great Old Party », pour convaincre ses indispensables partenaires républicains.

Applaudissement à droite… et à gauche.

Sur le fond, Obama en appelle au « New Deal »

Barack Obama ne l’a pas cité nommément. Peut-être la « ficelle » a-t-elle été jugée trop grosse. Tout juste une évocation à peine sibylline : « Demandez-vous où nous serions, aujourd’hui, si ceux assis à nos places avant nous avaient décidé de ne pas construire nos ponts, nos barrages, nos aéroports ? » Des ponts, des barrages, des aéroports… C’est bien l’ombre d’un autre de ses prédécesseurs qui plane alors sur le Capitole de Washington : entre ici, Franklin Delano Roosevelt !

Oser des parallèles historiques est un exercice délicat. Après tout, la répétition de l’Histoire ne serait-elle pas jamais qu’une illusion ? Si comparaison n’est pas raison, il en est parfois des tentantes, presqu’immanquables. Combien de fois depuis le krach boursier de 2008 n’a-t-on comparé la situation mondiale actuelle à celle qu’engendra le Jeudi noir de Wall Street en 1929 ? C’est pire ? C’est mieux ? En tout cas, cela y ressemble et, par conséquent, l’idée de piocher dans les remèdes apportés, à l’époque, par FDR, et inspirés, notamment, des travaux de John Maynard Keynes, constitue une tentation difficilement maîtrisable.

La « solution Obama » emprunte aux solutions keynésiennes, le soutien à l’économie par l’augmentation des dépenses publiques. Ce plan de relance prévoit ainsi d’injecter 447 milliards de dollars dans l’économie américaine sous trois principales formes : allégements de charges sur les salaires, travaux d’infrastructures et aides aux collectivités locales. Le président passe en revue les principaux projets en précisant, au passage, que certains aspects du plan auraient d’ores et déjà reçu le soutien d’une partie des républicains voire que certains chantiers auraient été lancés par des républicains.

America is beautiful…

Pour la comparaison avec le « New Deal », on oubliera tout de même que le jugement plutôt favorable de l’histoire repose, pour une large part, et au-delà des querelles de chapelles, sur les effets de l’engagement des États-Unis dans un effort de guerre qui trouva sa raison d’être dans la Deuxième Guerre mondiale. L’hymne américain retentit, « America is beautiful »

Reste pourtant une question cruciale : celle du financement. Le président a répété à plusieurs reprises que toutes les mesures seraient financées, sans préciser comment.

La bataille de l’emploi au Congrès débute à peine.

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