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Économie mondiale : 2011, pire que 2008 ?

Vous souvenez-vous de ces jours sombres de 2008, de ces instants où, tous, nous avons commencé à nous interroger, avec raison, sur la viabilité du système financier mondial ? Des banques d’investissement américaines jusque-là solides s’effondraient ou cherchaient désespérément des capitaux. Les marchés à travers le monde entraient en récession. Les gens, les vrais gens, partout – de Wall Street à Ouagadougou – s’inquiétaient pour leur avenir économique.

Eh bien, ces tristes jours se répètent. Et cette fois, ils pourraient même se montrer pires.

Des cassandre bien occupées

C’est ce que l’on entend chaque jour davantage dans la rue, alors que les marchés financiers chutent et que les analystes les plus déprimants sur terre claironnent des airs toujours plus préoccupants. Nouriel Roubini est un des bloggeurs les plus actifs sur le sujet. Voici quelques exemples de ses contributions :

Roubini n’est pas le seul.

Un parallèle historique de plus en plus frappant

John B. Judis met en évidence les troublants parallèles entre la situation présente de l’économie américaine et ses pires heures de la Grande dépression des années 1930. « À moins d’un changement fondamental – et difficilement imaginable – dans la manière dont le politique interagit avec l’économique, les États-Unis et la plupart des autres pays du monde vont droit vers un avenir sombre », écrit Judis.

« La récession d’aujourd’hui ne se contente pas de ressembler à la Grande dépression : c’en est, pour une large mesure, une récurrence, ajoute-t-il. On retrouve les mêmes causes uniques et la même trajectoire initiale. Les deux retournements de conjoncture ont été déclenchés par une crise financière dans un contexte – croissant – de ralentissement de la production industrielle et de hausse du chômage, qui avait commencé en amont et qui était provoquée par une innovation technologique rapide. Les années 1920 avaient vu la généralisation de l’électrification de l’industrie ; les années 1990, le triomphe de l’informatisation de la production manufacturière et des services. Les récessions de 1926 et 2001 ont été toutes les deux suivies de reprises sans création d’emploi. »

Une conjoncture de plus en plus dégradée

Où que vous regardiez, le paysage s’obscurcit, c’est indéniable :

L’économie américaine – un cinquième de la production mondiale – est dans le rouge, quels qu’en soient les critères, que ce soit le haut niveau de chômage, la pauvreté croissante, la confiance en berne des consommateurs et les perspectives fiscales à long terme qui ont bien besoin d’être sérieusement révisées. Rien de plus réconfortant lorsque la Réserve fédérale parle, bruyamment, « de risques significatifs de retournement à la baisse de la conjoncture », comme ce fut le cas le mercredi 21 septembre à la réunion du comité chargé de suivre le marché intérieur fédéral.

L’Europe, la plus vaste entité économique au monde, est dans une situation encore plus dégradée en raison d’une crise de la dette persistante. Et le nouveau « super-chien de garde » de l’Europe, le Comité européen du risque systémique, envoie des signaux inquiétants : « La haute interconnectivité du système financier de l’UE a conduit à une hausse rapide du risque de contagion significative. Voilà qui menace la stabilité financière dans toute l’Union et impacte négativement l’économie réelle en Europe et au-delà », indique un communiqué.

Dans le même temps, le héros économique du moment, la Chine, paraît aussi de plus en plus faible. Le secteur manufacturier chinois s’est contracté en septembre, pour le troisième mois consécutif. Il en résulte une augmentation des doutes sur la capacité du boom chinois à compenser les faiblesses économiques aux États-Unis et en Europe.

Alors, que devrait-il se produire ?

Les économistes les plus raisonnables appellent à une action immédiate et forte des gouvernements afin d’établir les conditions d’une reprise de la croissance. Des mesures rapides et décisives, s’il vous plaît. Pour faire court, l’économie mondiale requiert un leadership solide déterminé à stimuler la demande et, de manière plus essentielle, à restaurer la confiance des consommateurs et des entreprises.

Une succession de réponses inadéquates

À la place, aux États-Unis, nous avons eu un plan pour l’emploi timide, présenté par le président Barack Obama. Un plan condamné dès son arrivée au Congrès. Nous avons le candidat le mieux placé dans la course à l’investiture républicaine, Rick Perry, qui menace Ben Bernanke, le chef de la Fed, et le qualifie de « traître ».

En Europe, nous avons une animosité politique croissante entre « le Nord et le Sud » autour de ce qu’il convient de faire pour la Grèce et pour éviter les effets dévastateurs d’un défaut grec sur le fragile secteur bancaire européen. Pire encore, il est difficile de prendre les dirigeants européens au sérieux lorsque le si vulgaire président du Conseil de la septième économie au monde – Berlusconi – qui traite avec le plus grand manque de respect la chancelière de la plus grande économie du continent.

Quelques raisons d’espérer

Soyons clairs, tout le monde ne prédit pas une répétition de 2008.

Voici ce que les économistes d’IHS Global Insight écrivent, selon le blog Real Time Economics du Wall Street Journal : « Si les risques de récession aux États-Unis et en Europe ont augmenté, une répétition de l’effondrement financier de 2008 et de la “Grande récession” qui suit ne paraît pas le scénario le plus probable. Les marchés émergents vont de manière presque certaine continuer à croître, même si c’est moins rapidement. Les banques centrales sont prêtes à – une fois encore – mettre en œuvre des politiques non orthodoxes, si nécessaire. Ceci dit, un choc financier émanant de l’eurozone pourrait faire de gros dommages. »

Espérons que les banques centrales puissent, à nouveau, intervenir.

Mais tant que nous n’observerons pas un leadership fort sur le plan économique à travers le monde – et que les consommateurs et les entreprises n’auront pas suffisamment confiance pour recommencer à dépenser – l’atmosphère restera très tendue.

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