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La vasectomie injectable, une révolution médicale et sociétale à portée mondiale !

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La révolution contraceptive

New Delhi, Inde. Il y a environ 400 ans, un homme eut l’idée brillante d’utiliser un morceau d’intestin de mouton lors d’ébats amoureux. Il venait d’inventer le préservatif*. Depuis ce moment-là, la contraception masculine s’en est sortie tant bien que mal à l’aide de ce procédé initial. Jusqu’à maintenant du moins. Après plus de trente années de lutte, un ingénieur indien, le très discret Sujoy K. Guha, est à la veille de mettre au point ce qui pourrait bien constituer le moyen de contraception le plus révolutionnaire qu’on ait connu depuis la pilule – et cette fois-ci, la question intéresse particulièrement les hommes.

RISUG, cinq lettres qui changent tout

Baptisé RISUG en anglais pour Reversible Inhibition of Sperm under Guidance (« inhibition réversible assistée du sperme »), ce type de contraceptif offre aux hommes une vasectomie injectable qui évite toute opération chirurgicale. C’est là une bonne nouvelle en soi. Il y a mieux encore : les études menées sur des animaux, notamment des singes, ont montré que ce type de vasectomie se montre très facilement réversible. Ce que l’on obtient est une réaction bloquant le sperme temporairement, elle ne fait intervenir aucune hormone et l’on peut suspendre le processus à tout moment.

Un retard à rattraper

L’impact pourrait être de grande ampleur pour l’Inde, pays où la stérilisation constitue encore le contraceptif le plus souvent utilisé. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : aujourd’hui, seulement 3 % des femmes prennent la pilule et 5 % des couples utilisent des préservatifs. Comparativement, 37 % des femmes choisissent d’avoir recours à une ligature des trompes, qui peut s’avérer dangereuse, alors qu’à peine 1 % des hommes se tournent vers la vasectomie.

Surmonter les réticences

Pas étonnant dès lors que tant d’efforts soient consentis par les États indiens pour convaincre les hommes d’avoir recours à une vasectomie conventionnelle : le Rajasthan a même offert des voitures, des motos et des téléviseurs – sans parler de permis de port d’arme – qui doivent agir comme autant d’incitations à se soumettre à la procédure. « Qu’aucune partie du corps ne soit amputée porte un grand nombre de répercussions psychologiques favorables, note Guha. C’est là un des atouts majeurs de la RISUG. Le second point positif de la procédure est qu’elle est entièrement réversible. »

Des tests plus que concluants

La vasectomie injectable de Guha n’est pas encore tout à fait prête. Mais après avoir travaillé dans l’ombre pendant des décennies, le scientifique indien s’approche du but. La troisième étape des essais cliniques – des tests sur des hommes et non plus des singes – est déjà en cours en Inde. Certains bénévoles ont recours à cette méthode depuis quinze ans sans le moindre incident. Le traitement pourrait être disponible dès 2012 avec une diffusion malgré tout limitée car la réversibilité n’a pas encore été établie pleinement par des tests sur les hommes.

RISUG hors des frontières indiennes

Guha vient de conclure un accord pour le moins inhabituel avec Elaine Lissner, une activiste de San Francisco qui bataille depuis les années 1980 pour une meilleure contraception masculine : il n’est pas impossible que la RISUG arrive chez les médecins américains, sous le nom commercial de Vasagel. « En 2005, j’ai eu la chance de diriger une petite fondation et d’investir un peu d’argent dans ce dont nous parlons depuis tant d’années, de vraiment faire quelque chose, explique Lissner. La fondation n’a pas beaucoup d’argent – juste assez pour mener à bien les premières études et montrer que le processus fonctionne vraiment. Mais la RISUG est déjà tellement avancée ! C’est la seule méthode non hormonale qui a déjà été utilisée par des centaines d’hommes : ce serait un crime que de l’ignorer. »

Vers la phase opérationnelle

Alors qu’en Inde la RISUG contourne les derniers obstacles et se prépare à un lancement commercial, la fondation Lissner Parsemus commence la production de Vasagel et se prépare aux tout premiers tests cliniques aux États-Unis, à l’horizon 2012, bien que la fondation ait besoin d’au moins 4 millions de dollars de financement supplémentaires pour mener à bien le traitement tout au long du processus d’approbation.

Un difficile aboutissement

« Lorsque j’ai soumis mon idée pour la première fois, certains m’ont pris pour un plaisantin, j’ai été ridiculisé », a révélé Guha lors d’une interview menée par Global Post. « Finalement, je suis rasséréné de savoir que ce concept peut éventuellement mener à l’élaboration d’un produit concret. » Le parcours fut semé d’embûches. Au début des années 1970, Guha travaillait à un projet d’assainissement de l’eau de puits qui aurait permis de tuer les microbes dangereux grâce à un matériau créant une charge électrique dans le mécanisme de la pompe. Quand le gouvernement fut forcé de se concentrer activement sur la planification des naissances, il lui vint à l’idée qu’un système similaire pouvait être employé à l’intérieur du canal déférent de l’appareil génital masculin – ce même canal qui est normalement sectionné dans une vasectomie classique.

Comprendre le processus

Guha n’a pas tardé à découvrir qu’un polymère appelé styrène anhydride maléique (SMA) adhérait aux parois du canal déférent et créait une charge électrique positive qui détruisait le sperme chargé négativement au travers du canal : les spermatozoïdes étaient donc soit tués soit simplement immobilisés. Mais apporter la preuve que le traitement était parfaitement sûr et efficace a été une succession longue et ardue d’essais cliniques et d’erreurs, systématiquement entravés par la paresse bureaucratique et un budget pathétique alloué au projet.

Les labos renâclent : pas assez rentable !

« Nous n’avions aucun soutien de l’industrie, et dans le fond, ni mes collègues ni moi n’étions vraiment compétents et expérimentés en matière de développement de nouveaux médicaments », reconnaît le scientifique. Une partie du rejet tient paradoxalement à l’élégance même du procédé, par trop efficace pour une communication… marketing ! « Pour les hommes, la méthode idéale serait peu onéreuse, et sur la longue durée. Pour les actionnaires de la société, la méthode idéale serait coûteuse et temporaire », explique Lissner. « Les firmes pharmaceutiques ne trouvent aucun intérêt à développer une méthode sur le long terme, et nous ne pouvons attendre d’elles qu’elles prennent les devants. Les hommes obtiendront un traitement si et seulement s’ils l’exigent expressément de leurs gouvernements. » Son constat est désarmant.<!–jolstore–>

Un traitement aux multiples bénéfices

Certain désormais que le traitement fonctionne et qu’il est parfaitement réversible comme il le supposait, Guha travaille maintenant à adapter cette technologie pour qu’elle offre des avantages supplémentaires, au-delà de la contraception. De sorte que davantage d’hommes choisissent le traitement. Au sommet de sa liste des « plus », des fléaux particulièrement pesants : le sida et le cancer de la prostate. Guha pense que le gel utilisé pour la RISUG est prometteur contre le cancer de la prostate : le gel agirait directement sur la glande par l’élimination de doses en trop grande quantité et des effets secondaires désagréables quand il est pris par voie orale.

Et toujours, l’espoir…

De même, il pense que pris à une dose plus faible que dans le processus de contraception, le gel peut éliminer le VIH et en interdire la transmission à l’épouse et aux enfants !

Global Post / Adaptation JOL-Press.

* Notez qu’en Europe, la relation entre l’émission de sperme et la conception n’était pas même établie à la même époque…

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