Site icon La Revue Internationale

Le 11-Septembre dix ans après

catherine.jpgcatherine.jpg

À 8 h 47, heure de la côte est, les États-Unis sont frappés de plein fouet, le 11 septembre 2001, par une série des plus retentissants attentats terroristes que l’Occident ait connus.

Touchée en plein cœur, la nation américaine saigne et les populations du monde entier regardent fascinées sur les écrans de télévision disparaître en poussière les deux tours du World Trade Center qui symbolisent une Amérique invincible, fière et magnifique. Comme après Pearl Harbour, elle se relèvera, mais n’oubliera jamais. Nous sommes partis à la rencontre de ceux qui étaient à New York il y a dix ans. Aujourd’hui, leur émotion est intacte.

 

Jules Naudet, réalisateur, 38 ans, de nationalité française et américaine

[image:2]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

Au World Trade Center. Mon frère Gedeon et moi-même tournions un documentaire sur les pompiers de New York. Depuis trois mois, nous les filmions dans une caserne à cinq blocs du WTC. Ce matin-là, à 8 h 15, il y a un appel de routine pour une odeur de gaz. Je pars avec les pompiers, je les suis avec ma caméra. Soudain, j’entends un avion de manière très perceptible, il est très bas, j’arrive même à lire que c’est un American Airlines. Par réflexe, je ne lâche pas ma caméra, et je tourne la tête. Je vois l’avion réapparaître, il s’encastre dans l’une des tours.

Je pense évidemment à un accident et je me demande pourquoi l’avion n’a pas essayé de se poser sur l’Hudson. Je me précipite dans la voiture du chef des pompiers, le chef Pfeifer. Deux minutes plus tard, nous sommes au pied du World Trade Center. Je rentre dans la tour et je me souviens d’une des pires images que j’aie pu voir ce jour-là. Les fenêtres étaient soufflées, ça sentait l’essence, le kérosène de l’avion s’était répandu le long des ascenseurs. Une boule de feu explose dans le hall, j’entends un hurlement à côté de moi, une femme est en feu à quelques pas et je ne peux rien faire. J’ai refusé de filmer ce genre de scènes, il y a un respect dans la mort.

À quel moment comprenez-vous que ce n’est pas un accident ?

Je réalise que c’est une attaque quand le deuxième avion percute la deuxième tour. Je me sens en sécurité quand je suis dans la tour, je suis entouré de ces héros modernes, les pompiers. Je suis pourtant obligé de quitter la tour nord quand on entend une autre explosion, le bruit de la destruction et de la mort envahit l’espace. Des débris enflammés s’écrasent partout. Je sors en courant, je fais 15 mètres, des détritus tombent tout autour de moi, je me dis que je vais mourir. Ça ne sert plus à rien de courir, je m’assois. Je ne comprends pas ce qui se passe, tu en savais beaucoup plus à 8 000 km en regardant la télévision. Le bruit. Des pompiers qui courent. Puis soudain, ça s’arrête. On pense qu’un étage vient de s’écrouler. « Mayday », « mayday » crient les appels radios. Le chef des pompiers donne l’ordre d’évacuer la tour à tout le monde. Au même moment, on entre à l’intérieur, avec la grosse lampe de ma caméra j’aide les pompiers à avancer. On découvre le corps du prêtre Father Judge. On ressort avec la dépouille, des gens sautent de la tour, c’est dangereux de rester là. On sort dans la rue, on ne voit pas la tour sud, mais la nôtre est intacte. Il est impensable alors d’imaginer que la tour a pu être détruite.

Au moment où notre chef veut vérifier la tour sud, la tour nord tombe. Je me glisse entre deux camions – pas dessous, j’ai peur qu’ils s’écrasent sur moi, je m’allonge par terre, je pose ma caméra. Quelqu’un se met sur moi. La poussière m’étouffe. Alors que je pense mourir étouffé, le vent souffle de l’autre côté et libère l’atmosphère. Le chef Pfeifer m’avait vu me glisser entre les camions et s’était mis sur moi afin de me protéger. En nous relevant, on s’aperçoit que les deux tours ont disparu. Elles ont été détruites ! Immédiatement, je pense à mon frère Gedeon, je pense qu’il est mort.

Gedeon était resté dans la caserne quand le premier avion a percuté la tour. Il sort pour filmer la réaction des gens et voit le deuxième avion s’encastrer. Puis la tour sud s’écroule. Gedeon enfile un équipement de pompier et arrive à approcher des tours. Nous sommes en fait à 50 mètres l’un de l’autre, mais nous l’ignorons. Quand la tour nord s’écroule, il saute dans un camion de pompier. Il me pense mort.

Trois heures plus tard, nous nous retrouvons à la caserne, en pleurs. Ce sont les plus belles retrouvailles de ma vie.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde et si oui, en quoi ?

Forcément. C’est un des rares moments de sa vie où l’on se souvient exactement de ce que l’on faisait et où l’on se trouvait. Comme ceux qui ont vu les premiers pas sur la Lune. Le 11-Septembre a changé le monde à travers une nouvelle dynamique politique et militaire. Les Américains ont découvert le terrorisme. Avant cet événement, le pays s’était toujours senti en sécurité. Avec les attaques du 11-Septembre, les Américains réalisent qu’ils ne sont pas les seuls au monde. Leur vision du monde s’ouvre et change à jamais.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements ?

Malheureusement, nous avons dû changer notre documentaire en réinterviewant tous les pompiers que nous avions filmé. Deux sont décédés. En trois ans, plus de deux cents pompiers sont morts des suites de cancers, surtout leucémiques. La poussière de deux immeubles de 120 étages, avec de l’amiante, du mercure, celui des lampes, des produits chimiques, des particules d’ordinateurs, mélangés avec le kérosène des avions, leur fut fatale. Aujourd’hui, plus de mille pompiers sont malades. Le chiffre ne cesse d’augmenter. Les cancers ont une période de gestation longue, les pompiers du 11-Septembre développent leur maladie au bout de sept ans. Une loi est passée pour venir en aide à ces pompiers, mais les frais de santé du cancer ne sont pas inclus.

Il est important que les gens réalisent que ces héros ont maintenant besoin de notre aide.

 

Catherine Malandrino, designer, 50 ans, française, vit à New York depuis plus de 14 ans

[image:3]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

J’étais chez moi, allongée sur mon lit. La veille, j’avais montré ma collection « Hallelujah » au théâtre de l’Apollo à Harlem. Je lisais avec bonheur les critiques du show.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

Une incompréhension totale en voyant les images défiler et un sentiment immédiat de patriotisme. Soudainement, je me sentais Américaine et attaquée.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Un sentiment de vulnérabilité s’est installé aux États-Unis et à travers le monde. Dix ans après, le choc est toujours présent et les images des tours jumelles du World Trade Center sont à jamais ancrées dans nos esprits. À la suite de ces événements, l’équilibre du monde a changé et tous nos acquis ont été remis en question.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Un regain de vigilance et une attention permanente face aux signes d’instabilité à travers le monde. Je me sens plus concernée par les questions et les débats d’actualité.

 

James Heckler, propriétaire de restaurant, 47 ans, américain, né à NYC

[image:4]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

C’était une magnifique matinée, j’arrivais à pied de mon appartement, situé dans l’Upper East Side, à mon restaurant « Globe » sur la 27e Rue. J’étais à mon bureau en train de parler à une amie quand elle m’a appris qu’un avion avait percuté la première tour. J’ai aussitôt allumé la télévision et vu se dérouler le reste de la tragédie. Au début, il régnait une sorte de confusion générale sur ce qui s’était passé, mais très vite, nous avons compris qu’il s’agissait d’une action terroriste. J’ai parlé à mon associé et appelé mon directeur général. Nous avons décidé d’ouvrir la salle du restaurant qui était équipée de deux grands écrans plats et de servir les gens qui arrivaient du bas de la ville. Les transports étaient bloqués. Les gens se sont reposés et se sont réconfortés avant d’essayer de trouver un moyen de rentrer chez eux.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

J’étais sous le choc. L’image de l’avion percutant la seconde tour était totalement irréelle ! Ma préoccupation immédiate fut de savoir si ça allait s’arrêter là ou si d’autres attaques étaient à venir, si elles auraient lieu à New York. En tant qu’Américain, c’était stupéfiant de voir mon pays attaqué. J’avais déjà vu des images violentes, mais jamais aucune qui touchait de façon tangible à ma vie quotidienne. Je me souviens d’être resté ainsi, sur Park Avenue, à regarder le nuage de poussière et de débris qui remontait des décombres vers le haut de la ville.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Bien sûr, les conséquences et la riposte américaine furent si extrêmes. S’en sont suivies l’invasion de l’Irak – bien fondée ou injustifiée –, et la lutte contre le terrorisme, qui a changé la perception de mon pays à travers le monde. Je vis dans la peur d’autres attaques et en même temps, je me sens plus concerné par celles qui frappent la vie d’innocents à travers le monde. Et puis, la haine de certains groupes de gens ou de communautés à l’égard de mon pays, qui s’est matérialisée au travers de ces attaques, m’a ouvert les yeux. Je pense, en tant qu’Américain, que nous avons vécu dans une bulle isolée des autres.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Je me souviens d’une journée triste pour ma ville, pour mon pays et pour l’humanité. Comment un acte commis par un petit groupuscule a pu autant affecter le cours des relations internationales ? Toute la haine à travers le monde, dirigée contre mon pays ou engendrée par lui, a conduit à un gigantesque chaos et a changé le cours de l’histoire, probablement pas pour le meilleur, mais plutôt pour le pire.

 

Pamela Berkovic, photographe, 33 ans, franco-belge, vit à New York depuis plus de 11 ans

[image:5]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

J’étais dans mon appartement au sud de TriBeCa, avec Marc, mon amoureux. Nous étions rentrés la veille de vacances en Europe. Ce matin-là, Marc décide de sortir acheter le petit-déjeuner. Cinq minutes après son départ, je ressens une sorte de secousse. Marc m’appelle depuis son portable et me dit de vite descendre avec mon appareil photo. Arrivée dans la rue, je vois l’une des « twin towers » en feu. Marc et les autres passants viennent de voir l’avion rentrer dans la tour. Nous partons en direction de son appartement qui se trouve un peu plus au sud, dans l’un de ces gratte-ciel tout en verre, qui donne justement sur les tours du World Trade Center. Il habite au 33e étage. Collée aux -itres de cet appartement, je regarde le spectacle, abasourdie. J’aperçois au loin un avion qui s’approche. Je me dis que c’est du renfort, la police. Et puis, sous mes yeux, l’avion arrive à toute vitesse et s’encastre dans la seconde tour. Une explosion. Des flammes. Mes jambes me lâchent. Je tombe par terre. Je me demande si je ne fais pas un cauchemar. La tour s’embrase. La liaison téléphonique avec mon père est coupée. Je reste scotchée à la vitre. Je ne peux plus bouger. Je photographie mécaniquement. Le temps passe vite. Soudain, la tour s’effondre, une fumée noire envahit le ciel, je ne vois plus rien qu’un nuage de poussières et de débris. J’entends des hurlements dans l’immeuble, il n’y a plus ni électricité ni d’ascenseur. On doit descendre les 33 étages à pied, évacuer de toute urgence. Des cris. Des sirènes. Des gens hystériques se bousculent dans les escaliers. Des personnes tombent. Des enfants pleurent. C’est la fin du monde.

Me voilà dans la rue, avec des centaines d’autres personnes, je cours pour échapper à la fumée qui est tout autour. La seconde tour s’effondre. Encore plus de fumée. Je continue de courir. Je suis arrivée dans Soho où je me suis réfugiée chez des amis. Je n’ai pas pu rentrer chez moi pendant une semaine. Ma famille n’a pas réussi à me joindre pendant 24 heures. Marc n’a pas pu retourner chez lui avant des mois. Les jours qui ont suivi, il était quasiment impossible de descendre sous la 23e rue. Le bas de la ville était devenu piétonnier à partir de la 14e. Pour passer, il fallait avoir ses papiers d’identité avec son adresse, encore fallait-il avoir pensé à prendre ses papiers dans l’affolement général. Pendant des heures j’ai dû argumenter auprès d’un policier qui m’a finalement suivie jusque chez moi et a attendu que je lui prouve que j’habitais bien là. Après avoir logé chez des amis et à l’hôtel, je suis finalement retournée vivre chez moi. Le bruit des ambulances, des hélicoptères et des sirènes me rendait folle. L’odeur de la mort, de l’acier, de la fumée… Des mois. Le quartier est devenu un petit village. Dans les magasins et les restaurants, il n’y avait plus que des habitants de TriBeCa puisqu’on ne pouvait pas passer en dessous de Canal Street sans identification. J’adorais TriBeCa, mais ça devenait insupportable. En janvier 2002, j’ai déménagé dans le West Village, je retourne rarement à TriBeCa.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

Je ne l’ai pas appris, je l’ai vécu.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Le terrorisme, la sécurité, la paranoïa… Tout a changé depuis le 11-Septembre… New York a changé. Les gens ont peur.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Des images violentes. Le bruit des ambulances me rappelle encore aujourd’hui le 11 septembre 2001. Mais aussi de l’espoir. J’ai photographié récemment une femme qui vient de publier un ouvrage sur l’espoir. Elle a perdu son mari dans le World Trade Center. Ce jour-là, elle s’est dit que sa vie était finie. Mais par amour pour ses deux enfants, elle s’est battue. Aujourd’hui, elle s’est remariée avec un homme qui a accepté ses enfants et sa souffrance. Elle est heureuse.

 

Miguel Courtois, réalisateur producteur, 50 ans, franco-espagnol

[image:6]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

À Paris, au bureau.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

La société s’est arrêtée. Les salariés ont cessé de travailler, nous avons regardé la télévision en direct, tous ensemble, toute la journée.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Oui bien sûr. Ils sont la cause et la justification autour desquelles s’organise toute la politique de défense occidentale depuis.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Le souvenir de cette après-midi hors du commun et la prise de conscience que notre petit monde privilégié et protégé n’était pas indestructible.

 

Yolande Laboy, serveuse, 37 ans, américano-péruvienne

[image:7]

Où étiez-vous le 11-Septembre 2001 ?

Je travaillais dans un restaurant qui s’appelle « America », au croisement de la 2e Avenue et de la 20e Rue.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

J’étais dans le restaurant quand nous avons découvert les premières images en direct à la télévision. En face de l’établissement, se trouvait un commissariat de police, il y avait un mouvement incessant. Les policiers couraient dans tous les sens, les sirènes hurlaient. J’étais sous le choc, c’était comme regarder un film d’action, je n’arrivais pas à croire ce qui se passait.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Totalement, oui. Ils ont changé ce pays et le monde. J’ai réalisé que le terrorisme était dangereux et capable de tout. Les États-Unis étaient un pays sûr où les gens donnaient facilement leur confiance. Je ne pensais pas qu’un tel événement pourrait arriver ici. La population est devenue plus prudente depuis le 11-Septembre, il y a plus de sécurité, nous savons désormais que nous ne sommes pas invincibles.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Beaucoup de choses. Voir les tours tomber à la télévision était un moment terrifiant, mais, plus encore, j’ai vu des gens entrer dans le restaurant avec de la poussière sur la tête et sur leurs vêtements, certains avaient même des morceaux de verre dans le crâne. Ils entraient, s’asseyaient et restaient là sans dire un mot, en état de choc, et puis le nuage de poussière est arrivé jusqu’à nous, remontant plus loin encore vers le haut de Manhattan.

 

Louis-Rafaël Lantheaume, étudiant en histoire à The New School, à New York, 21 ans, français

[image:8]

Où étiez-vous le 11 septembre 2001 ?

À Londres. Je rentrais de cours avec un copain, quand ma grand-mère m’a téléphoné, paniquée. Nous sommes arrivés à la maison et je l’ai trouvée devant la télévision, les yeux rougis. Sur l’écran, la première tour tenait encore debout, noyée dans un nuage de fumée. Nous sommes restés là, je ne sais plus combien de temps, sans bouger ou même oser dire un mot.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris ce qui se passait ?

Du dégoût envers l’homme, pour toutes ces vies gâchées à cause de la connerie de quelques ignorants. De la tristesse pour l’enfant, la femme ou le mari qui aura perdu une partie de son âme dans ces deux tours, et qui se demandera ce qu’il ou elle a fait pour qu’on lui ôte un être aimé comme ça.

Est-ce que vous pensez que les événements du 11-Septembre ont changé la face du monde, et si oui, en quoi ?

Oui, car aujourd’hui la terreur se ressent partout, elle frise de plus en plus la paranoïa. On se sent de plus en plus devenir un étranger. Et surtout, l’État s’autorise à attenter beaucoup à notre liberté physique.

Que reste-t-il pour vous aujourd’hui des événements du 11-Septembre ?

Un souvenir d’une après midi passée avec ma grand-mère et un ami à regarder des gens mourir, sans comprendre, sans pouvoir agir, juste à subir. En réalisant doucement que quelque chose allait changer, sans savoir réellement quoi.

Quitter la version mobile