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Netanyahou promet des réformes

Tel Aviv, Israël – Ils ont réussi.

Les jeunes agitateurs à l’origine des perturbations dans les grandes villes d’Israël durant l’été 2011 ont montré que leur énergie n’était pas retombée après la pause estivale, comme l’avaient prévu certains. Samedi soir, la plus grande manifestation dans l’histoire du pays a semble-t-il été bien entendue par le Premier ministre Benjamin Netanyahou.

Dimanche 4 septembre, il a annoncé à son cabinet qu’il adoptera des changements « véritables et responsables ». Le Premier ministre a décidé de solliciter les recommandations de Manuel Trajtenberg, professeur à l’université de Tel Aviv, pour tenter de répondre aux revendications des manifestants. À la tête d’une commission chargée d’élaborer des propositions de réforme au gouvernement, il avait pourtant été mis en doute par les manifestants.

 

Des manifestations historiques

Entre 250 000 et 400 000 personnes sont descendues dans les rues des plus grandes villes d’Israël samedi soir pour exiger des réformes sociales de taille, après un mouvement de protestation commencé à Tel Aviv il y a six semaines. Tout avait commencé par une minuscule tente, installée par une jeune femme, Daphne Leef, sur la place Habima, dans la capitale israélienne. Et pour cause. Obligée de déménager en raison de travaux dans son immeuble, elle découvre que les prix de location des appartements de Tel Aviv sont montés en flèche. Elle crée une page Facebook consacrée à son cri de protestation, et invite à ce que l’on se joigne à sa dénonciation de cette envolée qui prive bon nombre d’Israéliens de logement décent. C’est alors une petite ville de tentes qui pousse Boulevard Rothschild et sur la place Zion.

 

Vers plus de justice sociale ?

L’augmentation du coût de la vie en Israël reste la revendication centrale des manifestations. Particulièrement flagrante dans le secteur de l’immobilier : selon les données du Bureau central des statistiques d’Israël (BCS), les prix de location des appartements ont augmenté de 34 % en moyenne entre 2005 et 2011.

Parmi les autres revendications des manifestants, reviennent celles d’investissement dans les logements sociaux, d’une législation plus favorable aux locataires, d’une crèche gratuite pour les enfants à partir de trois mois, et d’un meilleur contrôle sur les cartels et les grandes entreprises qui dominent l’économie relativement modeste d’Israël.

 

Un mouvement sans violence

Pour Mlle Leef, les manifestations massives de samedi soir ne sont rien moins que « le miracle de 2011 ».

Comme les organisateurs l’avaient espéré, les citoyens d’Israël ont répondu à l’appel en masse. Les grandes avenues ont été fermées à la circulation à partir de 17 h 30, et un important effectif policier a été mis en place sur les grandes places dans plus de vingt villes à travers le pays. Sur la seule place Kikar HaMedina de Tel Aviv, entre 300 000 et 350 000 personnes se sont rassemblées, selon les estimations d’un groupe d’ingénieurs, consultés sur le nombre des manifestants.

Malgré l’ampleur des événements, cette journée historique n’a pas donné lieu à vandalisme, et l’on a eu à déplorer nulle violence. Les policiers à Jérusalem ont même expliqué qu’ils s’ennuyaient, mais qu’ils étaient « soulagés de s’ennuyer ». Partout, dans les rues et sur les places, a régné une ambiance de camaraderie et de fraternité.

Itamar Luria décrit le mouvement comme « l’un des moments les plus émouvants qu’il m’ait été donné de vivre ». Pour ce psychologue âgé de 54 ans, pacifiste depuis des dizaines d’années, le mouvement « fait oublier ce sentiment de se sentir sujets de l’État plus que citoyens ».

 

La commission sera-t-elle à la hauteur ?

L’annonce de Netanyahou, dimanche, a été reçue avec enthousiasme par de nombreux observateurs. Mais la commission qu’il a chargée de proposer des réforme sera-t-elle à la hauteur ? Réponse dans deux semaines, lorsque le professeur Trajtenberg présentera son rapport.

« C’est une commission sérieuse et elle nous soumettra des recommandations sérieuses », a déclaré Netanyahou dimanche, qui a promis d’instaurer des réformes « rapidement », sans pour autant plonger le pays dans une crise économique. « Nous maintiendrons l’économie, et nous corrigerons ce qui a besoin d’être corrigé. »

Parmi les observateurs des manifestations, Michael Steinhardt, légende new-yorkaise des fonds alternatifs, en ville pour un mariage. Mais Steinhardt n’a pas l’intention de rester passif : il a pris rendez-vous avec Trajtenberg le lendemain, pour proposer ses propres recommandations au comité. Dans sa poche, une liste de projets pour le professeur, et, indirectement pour Israël, à commencer par la nécessité pour le pays d’instituer un impôt sur les successions pour ses citoyens les plus aisés.

Sa seconde proposition : bien sûr répondre aux revendications de l’été : « Le gouvernement doit construire des logements sociaux. Immédiatement. » Sur quoi, Steinhardt a regagné sa propre résidence, un… véritable palace – non loin de la maison du Premier ministre.

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