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Des anonymes déclarent la guerre aux narcos du cartel Zeta

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Il y a quelques années, dans une clairière de la jungle colombienne, un tireur observa un petit avion Cessna sur une piste clandestine et puis marcha pour saluer le pilote étranger et son passager.


Plus tard, dans une interview au GlobalPost, le tireur déclara que les visiteurs étaient les membres d’un des principaux cartels de la drogue mexicains qui étaient venus pour acheter une tonne de cocaïne. Le tireur travaillait pour un groupe de paramilitaires colombiens qui prétendaient être des vigiles de la protection de la communauté. La transaction a eu lieu en 2004.


« Il s’agissait d’un accord commercial. Ce que ces personnes faisaient au Mexique ne nous intéressait pas. Ils payaient, et pour nous cela suffisait, » disait le tireur, un homme de 32 ans qui avait survécu à des balles dans la tête et dans la poitrine. Il a demandé que son nom ne soit pas révélé.


Les Zeta Killers : des justiciers du peuple ou des narcotrafiquants en lutte pour le pouvoir ?


Ces liens parmi les cartels de la drogue mexicains et les paramilitaires colombiens sont cruciaux pour comprendre l’évolution du conflit sanglant au Mexique. Les autorités mexicaines affirment que, depuis quelques mois, les cartels mexicains ont commencé à s’afficher en tant que justiciers du peuple, à l’image des Colombiens avec lesquels ils ont longtemps travaillé. Quand ils tuent et jettent les corps des victimes dans la rue, ils disent qu’ils sont en train de sauver le pays de criminels associés.


Beaucoup de ces communautés contrôlées par les criminels appuient de telles violences contre les ravisseurs – tout comme en Colombie, où les groupes paramilitaires se sont battus contre les guérillas de gauche et ont commis de nombreuses violations des droits des hommes. Les observateurs craignent qu’une augmentation de ces « escadrons de la mort » d’autodéfense ne fasse que déchaîner plus de violences au Mexique, à l’instar de ce qui s’est passé pendant la guerre civile colombienne.


La menace des narco-justiciers a attiré l’attention internationale le mois dernier lorsque les assassins ont déversé trente-cinq corps dans une rue marécageuse de Veracruz, en laissant une note dans laquelle ils affirmaient que les victimes étaient des escrocs et des ravisseurs d’un gang appelé les Zetas.


Suite à ce massacre, un groupe qui se faisait appeler les Mata Zetas ou Zeta Killers, a réalisé une vidéo de propagande dans laquelle ils affirment qu’ils tuent les violeurs et les ravisseurs mais qu’ils soutiennent les forces armées.


La vidéo, publiée sur Internet, montre cinq membres du groupe avec des masques de ski assis à table avec des bouteilles d’eau, face à la caméra.


« Pour des principes éthiques, nous prohibons l’extorsion, l’enlèvement, le vol et le viol », affirme un membre du groupe. « Nous sommes des combattants anonymes et sans visages, mais nous sommes fièrement Mexicains. »


Pourtant, les militaires mexicains disent que ce groupe d’auto-défense est une véritable milice rattachée au cartel de Sinaloa, la plus vieille organisation de narcotrafiquants du pays, rival acharné du cartel des Zetas.


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Selon les militaires, ce groupe de paramilitaires attaque les Zetas pour prendre le contrôle de leurs routes du trafic de la drogue.


La porte-parole présidentielle Alejandra Sota est du même avis : « Nous craignons qu’il s’agisse de bandits appartenant à un groupe criminel qui veut prendre le contrôle des activités délictueuses d’un autre groupe ».


Des ressemblances inquiétantes avec les groupes paramilitaires colombiens


Les marins mexicains, qui ont été adextrés par les Américains, ont arrêté plusieurs personnes accusées de faire partie du groupe des Zeta Killers.


L’emploi de ce groupe d’autodéfense fait par les cartels mexicains présente des similarités évidentes avec le système paramilitaire colombien.


Dans quelques proclamations, les gangsters mexicains déclarent qu’ils sont en train de « nettoyer » la région des éléments antisociaux – exactement les mêmes mots utilisés par les paramilitaires colombiens pour justifier leurs actions.


D’après Adam Isacson, qui fait partie de l’ONG Washington Office on Latina America « Les parallélismes entre les gangs de ces deux pays sont évidents. Si vous allez dans un territoire contrôlé par les cartels de la drogue mexicains vous pouvez voir une ressemblance étonnante avec les territoires contrôlés par les paramilitaires en Colombie ».


Isacson a souligné que les groupes paramilitaires qui ont pris le pouvoir en Colombie dans les années 1990 étaient souvent contrôlés par les trafiquants de drogue. Les milices ont ensuite développé une idéologie anticommuniste et ont lutté contre les guérillas de gauche enlevaient les riches propriétaires terriens.


Au Mexique, il n’y a pas de menaces réelles de guérillas communistes. À la place, les nouveaux narco-vigilants mexicains prétendent mener leur guerre contre les Zetas à cause des enlèvements et autres actes de violences qu’ils commettent.


Le soutien des narco-justiciers de la part de la population devrait inquiéter le gouvernement mexicain


Cela lui a valu la sympathie des Mexicains exaspérés par l’effusion de sang dans certaines régions dévastées par la drogue.


Des centaines de commentaires acclament les gangsters comme des héros.


« Très bons garçons. Nous avons besoin de quelqu’un qui se débarrasse de ces idiots qui terrorisent la société, » dit un commentaire. « Si le général Pancho Villa était encore en vie, il aurait voulu tuer ces Zetas. »


Jaine Guerrero, un comptable qui vit à Cordoba, dans la région de Veracruz, affirme que les gens en ont tellement marre qu’il peut comprendre pourquoi ils soutiennent des groupes d’autodéfense. Il affirme qu’il ne supporte pas les paramilitaires, mais qu’« il faut faire quelque chose : il y a des enlèvements partout, les policiers sont corrompus et ne font rien pour arrêter tout ça. Les gens sont très désespérés, et maintenant ils vont prendre des mesures désespérées. »


Cependant, les observateurs préviennent que lorsque les citoyens commencent à soutenir les groupes paramilitaires pour attaquer les criminels cela peut virer à la tragédie.


En Colombie, les paramilitaires ont perpétré des massacres brutaux contre les civils accusés de soutenir la guérilla, avant de se dissoudre définitivement en 2006.


« L’État mexicain doit faire valoir son monopole de la force légitime », dit Isacson, « Si les groupes paramilitaires prolifèrent au Mexique, peut-être qu’on devra commencer à parler d’un État en faillite. »


GlobalPost/Adaptation Melania Perciballi – JOL Press

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