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France Soir et le Grand Soir

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[image:1,l]La décision a été prise. Le vieux titre historique, si présent dans les moments qui ont compté dans notre mémoire collective ces dernières décennies, va supprimer son édition papier et réduire l’essentiel de ses effectifs. Destiné à n’exister que sur les supports numériques, il va trouver encore des ressources pour financer (10 millions d’euros) cette reconversion dans ce qui semble être un ultime effort, poussé par l’instinct de survie.

France Soir apporte ainsi une réponse à la question de savoir comment orienter un groupe de presse papier « classique » vers les supports numériques. Le moins que l’on puisse dire est que son choix est radical ! En disparaissant des kiosques, France Soir va-t-il s’effacer, ou, au contraire, s’engager sur la voie de l’avenir ? Comme souvent en France, le scepticisme est de mise.

L’heure du doute

Les syndicats jettent la première pierre en disant douter des comptes et sous-entendent que la situation actuelle ne serait pas si noire. Surtout, la plupart des observateurs se gaussent et doutent du succès futur d’un France Soir « pure player du Web », même si quelques exemples ont fonctionné, dit-on, sans d’ailleurs réellement connaître les chiffres. En effet, rares sont les cas réussis d’une reconversion aussi drastique.

Une tentative désespérée ?

Personnellement, je suis d’abord attristé par la démarche : c’est dans l’urgence et sous la plus forte des contraintes que France Soir amorce son mouvement. Ce n’est aujourd’hui pas par choix et selon une stratégie planifiée que le quotidien décide de basculer. Que l’on sache, le numérique n’était jusque-là pour ce titre ni une forte priorité ni une grande réalité. Mais sur le principe, je suis moins négatif : il n’y a pas de raison théorique qui empêcherait un journal populaire de proposer ses contenus et de les monnayer sur des supports numériques. Ceux-ci ont, en effet, un taux de pénétration élevé dans la population. À l’inverse, en entretenant des rédactions aux effectifs élevés et en proposant la vente de leurs contenus exclusivement sur un support papier qui reste déclinant, France Soir n’avait à peu près aucune chance de remonter la pente. La problématique de son propriétaire est double et ne lui est pas propre, bien au contraire il est assez symptomatique de ce que l’on voit ailleurs :

– sa stratégie numérique n’a été pensée que sous la contrainte,

– lorsqu’il s’y est décidé et a voulu avancer à marche forcée vers les supports numériques, doutes et résistances internes l’en ont empêché, comme au sein de tous les groupes de presse française à l’économie fragile, même lorsque leur survie est en jeu. Il n’en est pas le seul exemple.

[image:2,l]Que l’on ne s’y trompe pas : il ne suffit pas d’afficher un site Web, voire une application iPad, pour se prévaloir d’une stratégie numérique, et encore moins en recueillir des revenus.

Les opportunités du numérique

Dommage, car des exemples de modèles vertueux commencent à fleurir. Le Financial Times revendique ainsi plus de 230 000 abonnés payants et multiplie les formules sur abonnement en totalité ou partiellement, et les ajuste jusqu’à trouver le bon équilibre. Selon John Ridding, son CEO, l’iPad et les smartphones ont libéré et fait exploser la courbe d’abonnements numériques. Il prédit (interview au Digital Age et article des Échos 14-15 octobre 2011) que 40 % au moins des revenus de son groupe proviendront en 2014 de sources numériques.

Pour s’en être rendu compte un peu tard, France Soir tente aujourd’hui son Grand Soir…

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