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La Palestine devient membre à part entière de l’Unesco

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[image:1,l]À peine un mois et demi après le dépôt par Mahmoud Abbas, le 23 septembre 2011 à New York, d’une demande d’adhésion d’un État de Palestine comme 194e État membre de l’Organisation des Nations unies, l’Autorité palestinienne remporte un nouveau succès diplomatique : une agence du réseau de l’ONU, et l’une des plus prestigieuses, admet en son sein et, par là-même, reconnaît, par un vote de ses instances, l’existence d’une entité étatique du nom de Palestine…


À l’ordre du jour de la 36e session annuelle de la Conférence générale de l’Unesco


L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), dont le siège est à Paris, tient jusqu’au 10 novembre la 36e session annuelle de sa Conférence générale. Le vote a eu lieu lundi 31 octobre aux alentours de 13 heures, après l’intervention du ministre palestinien des Affaires étrangères, Riyad al-Maliki, devant toutes les délégations réunies.


Le conseil exécutif de l’Unesco s’est prononcé favorablement


Pour entrer en vigueur, l’adhésion palestinienne à l’Unesco doit être votée à la majorité des deux tiers des votants parmi ses 193 membres. Selon des sources diplomatiques, les Palestiniens sont assurés d’obtenir ce quorum.
Ils ont déjà, en effet, recueilli plus de voix qu’ils n’en espéraient au cours du vote du conseil exécutif de l’agence onusienne le 5 octobre favorables à l’adhésion. Sur 58 membres, seuls quatre avaient voté contre (États-Unis, Allemagne, Lettonie et Roumanie) et 18, dont la France et l’Espagne, s’étaient abstenus.


Un enjeu symbolique pour les Palestiniens


Au-delà des raisons objectives, telles que celles liées à la protection du formidable patrimoine, notamment biblique, de la région, les Palestiniens comptent, surtout, s’appuyer sur ce succès pour faire avancer leur demande d’adhésion à l’ONU. Comme une manière pour eux de faire du « forcing » en prétendant que, puisque des agences de l’ONU les ont acceptés, la maison mère ne pourrait que suivre.
[image:2,s]Le président palestinien Mahmoud Abbas a été ferme, jeudi : « Nous ne renoncerons pas à la demande d’adhésion de la Palestine à l’Unesco, où la bataille est très intense », a-t-il déclaré, affirmant n’entrevoir « aucune justification » à l’abandon de cette candidature.


Un vote prématuré selon les États-Unis et certains pays européens


Les fonctionnements institutionnels de l’ONU et de l’Unesco sont profondément différents. Les pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU – États-Unis, Russie, Chine, France et Royaume-Uni – ne disposent pas à l’Unesco de droits de veto, et leur influence en est d’autant diluée.
Jusqu’à la dernière minute, de fortes pressions diplomatiques des États-Unis et de certains pays européens s’exerceront sur les Palestiniens qui ne disposent actuellement que d’un statut de « mission d’observation » à l’Unesco, pour qu’ils renoncent à leur candidature en tant qu’État membre.
Washington, Paris ou Berlin jugent ainsi ce vote prématuré pour la raison que la demande d’adhésion des Palestiniens en tant qu’État membre à part entière à l’ONU est toujours en cours d’examen par le Conseil de sécurité.
« L’Unesco, ce n’est ni le lieu ni le moment. Tout doit se passer à New York. On espère que les choses vont bouger, mais il faut continuer à convaincre », a déclaré vendredi le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero. Un week-end de négociations a suivi.


Le risque d’une crise avec les États-Unis…


L’adhésion de la Palestine à l’Unesco risque de provoquer une grave crise avec l’arrêt immédiat du financement de l’agence onusienne par les États-Unis, ce qui priverait l’agence de 22 % de son budget, soit un trou de 70 millions de dollars dès 2011.
Deux lois américaines du début des années 1990 interdisent en effet le financement d’une agence spécialisée des Nations unies qui accepte les Palestiniens en tant qu’État membre à part entière.
Il y a des « lignes rouges » à ne pas franchir, a averti mercredi le porte-parole du département d’État, Mme Victoria Nuland. « Nous sommes préoccupés par notre capacité à continuer à faire bénéficier l’Unesco du plein soutien américain », a-t-elle dit, en un langage où la litote se fait menace.


… et Israël


Israël a paru résigné. Ses représentants s’attendaient à un vote en faveur de l’adhésion de la Palestine comme membre à part entière de l’Unesco, et devrait se joindre aux États-Unis pour retirer sa contribution financière à l’organisation. Son ambassadeur auprès de l’Unesco, Nimrod Barkan, avait annoncé le scénario : « Lorsque les discours seront terminés vers 12 h 30-13 heures, il y aura un vote et les Palestiniens vont gagner. C’est le comptage que nous avons », a-t-il indiqué.


La directrice générale de l’Unesco : inquiète


[image:3,s]Pour la directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, un départ des États-Unis et d’Israël – à eux deux, 25 % du budget de l’agence – aurait « de graves conséquences ». « Il faudra couper des programmes, réajuster l’équilibre de notre budget. Mais ce n’est pas seulement une affaire de budget, c’est une attaque contre l’universalité de notre organisation », a-t-elle dit à l’AFP, en jugeant qu’il est « de l’intérêt des États-Unis » de rester au sein de l’Unesco.


Le compromis avancé par les Européens


Les Européens imaginaient convaincre les Palestiniens de se contenter d’adhérer dans l’immédiat à trois conventions de l’Unesco, dont celle du Patrimoine mondial, ce qui est possible pour un « État non membre ».
Ce pis-aller eût permis aux Palestiniens de déposer des demandes de reconnaissance au Patrimoine mondial, dont certaines pour des sites dans les territoires occupés par Israël. Ramallah a une vingtaine de dossiers à déposer, dont le tout premier concerne l’église de la Nativité à Bethléem. C’eût été un moyen aussi de tester les véritables motivations de l’Autorité palestinienne… 


Peu après 13 h 30, lundi 31 octobre, le vote est tombé… La Palestine obtient son adhésion de membre à part entière de l’Unesco. La France a voté « oui ». Les États-Unis regrettent le vote et, dans la même journée, annoncent la suspension du versement de leur contribution financière à l’agence. Le représentant rappelle que l’UNESCO a pour mission de s’occuper de science et qualifie de « science-fiction » que d’admettre « un Etat qui n’existe pas ». À suivre…


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