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Les rebelles racontent la mort de Kadhafi

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[image:1,l]La capture du colonel Mouammar Kadhafi, retrouvé recroquevillé dans une canalisation, a marqué la fin soudaine et surprenante de la guerre en Libye, le jeudi 20 octobre 2011.


Kadhafi capturé vivant dans un collecteur de vidange par des rebelles


Kadhafi a été retrouvé seul dans un collecteur d’égoût, entouré par les corps de ses gardes qui avaient été abattus lorsqu’ils tentaient de fuir Syrte vers l’ouest. Selon les insurgés, lorsqu’il a été retrouvé, il errait déjà blessé, aux jambes, au torse et à la tête.


Dans une vidéo prise par un jeune de 21 ans, Ali Algadi, l’on voit Kadhafi tiré de sa cachette, ensanglanté et hébété. Des voix s’élèvent : « Ne le tuez pas ! Nous avons besoin de lui vivant. »


« Je ne sais pas exprimer le bonheur de ce moment », exulte le jeune auteur de la vidéo, assis à côté du collecteur, désormais tagué de slogans anti-Kadhafi. « Quand on est arrivés, ici on pensait trouver seulement des tireurs d’élite. Puis un homme a commencé à crier : Mouammar Kadhafi ! Mouammar Kadhafi ! Il l’avait pris par la jambe et il le sortait du trou. Il se cachait comme un rat. »


Ibrahim Abuziad est un de ces hommes qui ont hâlé le colonel hors de la gaine de béton. Il raconte que quand ils sont allés l’arrêter, le colonel disait : « Qu’est-ce que vous me voulez ? Qu’est-ce qu’il se passe ? Qu’est-ce qu’il vous arrive ? » Abuziad est arrivé sur place peu après la capture de Kadhafi : « Il était comme fou. Il agitait un sac blanc au-dessus de sa tête. »


Les circonstances de sa mort restent floues


[image:2,s]Dans la vidéo, l’on voit Kadhafi frappé à coups de bottes et de poings. Quelqu’un lui jette de la terre pendant qu’une foule d’assaillants l’amènent dans une voiture.


Tirana Hassan, de Human Rights Watch, a déclaré que la mort de Kadhafi a été confirmée par des vidéos et par des rapports du comité de Misourata du Conseil national de transition. « Le CNT a confirmé que le colonel a été capturé vivant, mais qu’il est mort sur la route pour Misourata. Je ne suis pas un expert médical, mais il a surement reçu une balle dans la tête et deux dans l’abdomen », a déclaré Hassan.


Peu de temps après la capture de Kadhafi, les combattants ont célébré l’événement, ils s’étreignaient, ils tiraient en l’air, faisaient « non, non » de la tête, incrédules et ravis.


Certains combattants ont écrit le nom de leur bataillon sur les murs en béton autour du collecteur, étiqueté « trou de Kadhafi ».


Un homme brandit une chaussette marron nouée autour de son fusil : « C’est la chaussette de Kadhafi, je le jure ! »


« Prenez du gâteau de Kadhafi ! », criait un autre, en tendant une cuillère de dessert, apparemment tirée du stock personnel du colonel.


Les corps des trois gardes de Kadhafi gisaient encore autour du conduit de vidange. Ils étaient tous trois habillés en civil. Leurs corps avaient été respectueusement couverts par les combattants.


Son fils Moatassim serait mort dans la même zone


[image:3,s]Dans un champ, à proximité, un amas de corps. Il s’agit probablement d’insurgés anti-Kadhafi. Selon plusieurs combattants, Moatassim, l’un des fils de Kadhafi, aurait été capturé dans cette zone. Lufty Alamin, qui a transporté son corps à Misourata, a déclaré qu’il a reçu une balle dans la poitrine lorsqu’il tentait la fuite.


À l’aube de jeudi matin, lorsque les attaquants éliminaient les derniers tireurs embusqués dans les ruines de la ville, 40 pick-up avaient rejoint le centre de Syrte depuis l’est.


« Chaque voiture qui partait a été protégée par des tireurs sur les toits, explique Farg Saud Megarif, un jeune de 26 ans. Ils sont restés pour protéger les voitures. Ce fut une mission suicide. J’ai pensé qu’il devait y avoir quelqu’un d’important, un haut fonctionnaire ou quelque chose dans le genre, pour que ces hommes soient prêts à sacrifier leur vie ».


Megarif dit que 12 voitures étaient parties de leur section, mais le feu de couverture les a empêchés d’arrêter les véhicules. Quarante voitures en tout ont fui le long de la plage, mais des hélicoptères Apache de l’Otan ont immobilisé le convoi et tué des dizaines de personnes.


Le long de la route et dans les environs, des véhicules brûlaient encore, et les corps de leurs occupants étaient étendus à côté. Un homme, encore vivant, mais incapable de bouger, a avoué que Kadhafi était avec eux dans le convoi, mais qu’il s’était échappé avec Moutassim.


La mort de Kadhafi marque la fin inattendue du conflit


Algady, qui fait partie de l’unité dont la base était installée à côté du collecteur où Kadhafi a été trouvé : « J’ai cru qu’on allait tous mourir, raconte-t-il, en montrant les dégâts des tirs sur le bâtiment, leurs voitures étaient en train d’arriver ici. Puis l’Otan les a frappés à la dernière minute. »


Les autres hommes ont fui dans les champs. Plusieurs prisonniers capturés la veille au soir avaient confirmé que Moutassim était encore dans Syrte. Lorsqu’Algady et les autres poursuivaient les fuyards, ils s’attendaient à le trouver. Personne n’avait prévu que Kadhafi en personne faisait partie du convoi. « J’étais persuadé qu’il était en Algérie ou quelque part à l’étranger. » Shakir Mohammed, un insurgé, semble encore sous le choc de la fin inattendue et dramatique du conflit : « Je voudrais célébrer cette victoire, mais même si je l’ai vue, avec mes yeux je n’arrive toujours pas à y croire. »


Syrte détruite par les combats


[image:4,s]Dans Syrte, les corps jonchaient les rues. Le corps d’un tireur est resté couché sur un toit. Le passage d’une maison à l’autre est rendu possible par des planches en bois jetées en travers de l’espace entre les bâtiments. Dans les cours, les résistants avaient ménagé des issues dans les murs pour créer des voies d’évacuation. Les hommes du CNT remorquent les voitures endommagées. Les maisons, pour la plupart déchiquetées par des roquettes ou des tirs, semblent vidées de tous leurs biens.


Plusieurs magasins alimentaires disposent encore de stocks d’huile de cuisine, de riz, de haricots et de sauce tomate. Les combattants rebelles ont déclaré avoir trouvé des armes et des munitions enterrées dans de nombreuses maisons, ce qui confirme que les loyalistes comptaient encore quelques réserves.


Les rumeurs selon lesquelles Saif Kadhafi aurait été également capturé n’ont pas été confirmées.


[image:5,s] À Misourata, les célébrations retentissent à travers la ville. Il semble que toute la population ait envahi les rues, drapeaux libyens en main.


« Ce qui est arrivé à Kadhafi, c’est comme ce qui est arrivé à Saddam », affirme Abuziad en taguant le nom de son bataillon sur l’ultime cach de Kadhafi. « L’un et l’autre ont été récupérés dans des trous. En fin de compte on a découvert qui est le rat. »


 


GlobalPost/Adaptation Melania Perciballi – JOL Press

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