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Une nouvelle expression du métier de journaliste

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Supports imprimés vs numériques


Il existe un énorme écart entre la vision théorique des années récentes, qui insistait sur les différences de nature entre le support imprimé et les supports numériques et opposait les deux formes de journalisme supposées irréductibles, et la pratique actuelle qui montre que le journalisme transcende ces différences.


Les journalistes le savent parce que beaucoup l’ont déjà expérimenté : lorsque le contenu, la « story », se trouve au cœur du métier, celui-ci se décline et s’adapte beaucoup plus simplement qu’on le prédisait : le support n’est qu’une plate-forme pour la création, qu’il soit numérique ou imprimé n’est donc pas si déterminant.


Les outils modernes des rédactions ont adopté ce principe : ces CMS (Content Management System) séparent contenu et présentation et offrent ainsi aux journalistes de créer les contenus (y compris à partir de multiples accès à des bases de données, liens, moteurs de recherche, etc.) puis de travailler leur édition, notamment à destination de plates-formes hétérogènes.


Adaptation et diffusion sur tous les canaux


Ce fonctionnement est désormais très largement connu et répandu dans les salles de rédaction.


Les grandes sociétés du secteur proposent des solutions qui adaptent et diffusent des contenus presse sur tous les canaux disponibles, y compris mobiles. Qu’elles soient opérationnelles et utilisées chaque jour dans le monde entier démontre à quel point ce qui semblait irréaliste, voire inconcevable, il y a peu fait déjà partie, et de plus en plus, de la vie des newsrooms.


Bien loin de modèles utopiques ou irréalistes, il est aujourd’hui parfaitement possible de faire concevoir par des équipes éditoriales intégrées des contenus issus d’une même « matrice » et de les distribuer ensuite sur des supports variés, du papier jusqu’aux écrans de toute nature.


On dispose même aujourd’hui des retours d’expérience de grandes rédactions qui ont « basculé » sur des modèles de ce type.


N’allons pas plus loin que les rives du lac Léman : le journal Blick (groupe Ringier) a construit en 2009 une newsroom intégrée qui rassemble 220 collaborateurs et produit 24 heures sur 24 des contenus texte, image, audio, vidéo, infographies à destination de l’imprimé, du Web et de supports mobiles.


Le Monde, dans la perspective des élections de 2012, lance un projet pilote de newsroom directement comparable.


Le Figaro a durant l’été déménagé l’ensemble de ses rédactions d’information : toutes les équipes Web et « papier » se sont physiquement rapprochées, et certaines (la « culture », par exemple) ont même totalement fusionné.


Une évolution constructive et positive


Avec une année de recul, Ringier a tiré de l’expérience un bilan très précis et documenté, appuyé sur le vécu quotidien d’une équipe de 220 collaborateurs. Extrêmement intéressant et positif, il montre que la pratique du travail des journalistes a évolué, tout en restant fondamentalement fidèle à sa nature.


L’analyse montre un mode de journalisme qui fonctionne davantage en réseau, plus coordonné et en équipe, plus centré sur le sujet, plus proche de l’actualité, plus rapide, plus varié, plus exigeant, plus interactif et plus numérique.


J. Pilet, autorité éditoriale du groupe, observe ce qu’il appelle un « retour au journalisme ». Selon lui, le cœur du métier ne change pas : il est toujours de chercher, trier, donner du sens, ce qui est encore plus nécessaire lorsque les audiences sont submergées d’information en continu.


Olivier Costemalle (Libération, 9 juin 2011) explique à propos d’une séquence passée sur Liberation.fr dans le cadre de l’affaire DSK : « Les téléphones portables permettent de tourner des images là où, naguère, on se serait contenté de l’écrit. Mais la nature du travail journalistique n’en est pas changée pour autant : il s’agit toujours d’enquêter, d’aller voir et de rendre compte. »

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