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De l’irresponsabilité de nos États

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[image:1,l]« Le mal triomphe toujours de l’inaction des gens de bien ». Cette citation d’Edmond Burke prend tout son sens dans les périodes particulièrement mouvementées, que nous traversons actuellement. Il n’est pas de mon propos d’accabler les hommes politiques, toutes tendances confondues, qui se sont succédés au pouvoir depuis plus de 50 ans.


Force est de constater que les racines du mal étaient largement connues. Dans son discours de l’Assemblée Nationale sur la « Nouvelles Société », Jacques Chaban-Delmas, le 16 septembre 1969, avait su, en collaboration avec un de ses principaux conseillers, Jacques Delors, trouver les mots qui, encore aujourd’hui, résonnent avec une incontestable véracité.


Une société bloquée


A la recherche de « l’Espoir » qui peut mobiliser la société, Jacques Chaban-Delmas stigmatisait « cette société bloquée » dont :
–        la fragilité de notre économie,
–        le fonctionnement souvent défectueux de l’Etat,
–        l’archaïsme et le conservatisme de nos structures sociales 


[image:2,s]Une économie fragile car il existait des tendances inflationnistes qui freinaient le plein emploi.
Mais surtout, une fragilité structurelle qui était liée à l’insuffisance de notre industrie.


Nous avons pu juguler l’inflation mais nous n’avons pas su conserver une industrie à la hauteur de nos enjeux économiques et cela, essentiellement à cause du fonctionnement défectueux de l’Etat et l’Archaïsme de nos structures sociales.


L’excessif montant des prélèvements sur le travail


Un Etat « tentaculaire et en même temps inefficace » et cela, en dépit de l’existence d’un corps de fonctionnaires parfois remarquable, tel était le constat en cette fin d’année 1969. Cette situation semble ne pas avoir fondamentalement évoluée, si l’on compare les taux de prélèvements sur le travail de 26,9% en France contre 13% en Allemagne.


Notre Etat, comme le rappelait Jacques Chaban-Delmas, n’est que le reflet de la volonté de notre société. Une masse budgétaire en croissance constante et un système fiscal marqués par l’inégalité et la fraude, voilà le constat alarmant qui était déjà fait en 1969.


Pour la « rupture »


Notre pays n’a pas su se réformer en plus d’un demi-siècle, pouvons-nous imaginer que, pour répondre aux attentes de nos concitoyens en un avenir meilleur, nous puissions aujourd’hui « renverser la table ». Nous devons accepter d’abandonner notre « extrémisme idéologique », en ne nous battant plus pour des mots, mais pour des réalités.


Avec près de 4 millions de chômeurs, notre combat doit être de rechercher toutes les solutions pouvant nous permettre de redonner de l’espoir à tous ceux qui ont le sentiment d’être laissés au bord du chemin. Les hommes politiques ont cette responsabilité, leur seul objectif doit être de nous permettre de retrouver confiance en notre avenir et en nos institutions.


La crise que nous traversons n’est que la conséquence de trop d’années de laxisme administratif et politique. A la recherche permanente d’un consensus social, nos responsables en ont oublié que l’évolution de nos économies n’a pas de contingence humaine ou politique. Nous ne pouvons plus subir cette situation, mais nous devons reprendre en mains notre avenir en acceptant de faire table rase du passé.  


Un avenir plus juste


La crise de la dette n’est que le reflet d’un mal beaucoup plus profond qui ronge nos sociétés développées : notre incapacité à faire face aux réalités du monde qui nous entourent.


[image:4,s]Tel le Numéro 6 dans la série culte le « Prisonnier », nous n’avons de cesse que de tenter de nous évader du « Village » mais, par nos votes, nous consolidons les murailles qui loin de nous protéger ne font qu’accroître notre enfermement et notre refus de toute réforme. 


Nous ne pourrons persévérer dans une telle ambiguïté, vouloir tout et son contraire. Un Etat providence et une société libérale ; toute médaille a son revers, notre modèle est en complète mutation, se voiler la face n’apporte aucune réponse aux vraies questions qui se posent à nous. Nous devons accepter les réalités, un avenir plus juste ne peut se concevoir sans des sacrifices importants et l’abandon de nombreux privilèges acquis.


L’objectif de l’ accroissement du BNB (Bonheur National Brut)


Deux objectifs prioritaires doivent être atteints :
–        la mise en place d’une nouvelle fiscalité plus adaptée aux évolutions de notre économie,
–        un retour aux bases fondamentales de notre société dont l’alpha et l’oméga doivent être l’accroissement du « BNB », le Bonheur National Brut.


Loin d’être utopique, cette tentative de définition du niveau de vie note une initiative trop peu prise en considération.


La nécessaire réforme de notre fiscalité


Nous ne reviendrons pas sur la nécessité d’une rupture avec tous les dogmes qui régissent dans notre pays la fiscalité. De plus en plus injuste, mal compris, inefficace et inégalitaire, notre système fiscal ne semble plus être qu’un patchwork de mesures sans cohérence, issu des lobbys corporatistes.


Les récentes mesures « dites d’économie », qui ne se traduisent que par un accroissement très sensible de la pression fiscale, n’en est qu’un exemple supplémentaire.
Sur un budget de 350 milliards, l’Etat n’a pu trouver que 1 milliard … d’économie alors que concomitamment, il a accru de 9 milliards les prélèvements sur le tabac, les boissons sucrées et non sucrées, les plus-values immobilières et j’en passe.


[image:3,s]Le risque d’Depuis la disparition de la cellule fiscale du Cabinet du Ministre du Budget à la suite de l’affaire Bettencourt/Woerth, le pouvoir est revenu entre les mains quasi-exclusives des techniciens de Bercy qui ont, comme caractéristique essentielle, celle de ne jamais se remettre en cause. Véritable dépositaire du dogme, ces hauts fonctionnaires n’ont pas perçu à quel point leur prisme monolithique axé essentiellement sur l’augmentation des impôts au détriment de la recherche active des économies budgétaires est de plus en plus mal vécu par nos concitoyens de toutes les catégories sociales.


Lorsque l’impôt est injuste, il pousse à la fraude ou à l’exil. Une telle attitude contribue au chômage de nos sociétés, dont l’histoire est jonchée de mouvements révolutionnaires qui ne sont que le fruit des frustrations populaires.


Vers une société plus solidaire


Est-il utopique de penser qu’une société heureuse et solidaire ne puisse pas être une société prospère ? Trop de contraintes, trop d’injustice, trop de frustrations font oublier le progrès et les remarquables avancées que nos sociétés modernes ont permis d’apporter à ses populations. Notre niveau de vie a progressé, dans les 50 dernières années, de manière très sensible apportant ainsi son lot de sécurité et de bonheur. Le système de santé n’a jamais été aussi efficace et nous comptons plus d’infrastructures publiques par habitant qu’aucun autre pays développé.


Cependant, tout cela ne saurait nous faire oublier tous nos concitoyens que la vie ou le destin a laissés au bord du chemin. Nous ne pouvons plus longtemps ignorer cette marginalisation d’une part importante de notre population. Et face à un tel constat, nombreux sont ceux qui se sentent prêts à consentir des efforts supplémentaires pour autant que ceux-ci soient efficaces et ne viennent pas une fois de plus sombrer dans le « trou noir » des déficits publics. Vaste programme, vaste ambition mais comme disait Albert Camus, « le Bonheur est la plus grande des conquêtes, celle que l’on fait face au destin qui s’impose à nous ».

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