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L’Église catholique n’a plus la cote

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L’évêque, pantalon et chemise bleus, arpente le promontoire en marbre. On l’entend à peine… Dans cette église de la taille d’un stade, ses mots, bien qu’amplifiés par un micro, sont presque couverts par les gémissements de milliers de fidèles en pleurs, les mains jointes et priant. « Descends, Esprit Saint », hurle-t-il. Les fidèles, membres des mouvements évangéliques les plus prisés du Brésil, lancent, dans un tonnerre d’applaudissements et d’acclamations : « Merci, Jésus ! »

Le pays change : l’Église catholique perd ses fidèles…

La popularité des prêches charismatiques comme celui de l’évêque Darlan Avila constituent l’un des principaux facteurs de la recomposition religieuse en cours au Brésil, pays qui était, il y a peu encore, le plus grand pays catholique du monde.

Le nombre de Brésiliens à se déclarer catholiques est passé de 83 % en 1990 à 68 % en 2009, selon une étude récente menée par la Fondation Getulio Vargas, une université de Rio de Janeiro. Ce recul de l’influence du Vatican est le plus fort au monde, selon cette étude. Pourtant, un nombre considérable de Brésiliens demeurent profondément catholiques.

Selon ce rapport, au cours des deux dernières décennies, aucune autre variable socio-économique n’a changé aussi radicalement que la composition religieuse du pays.
Le Brésil, puissance économique émergente, est en train de tourner le dos à la religion autrefois dominante. Des responsables de l’Église catholique ont reconnu récemment que le Brésil connaît un « processus de désinstitutionalisation ».

… et les confessions protestantes en gagnent de nouveaux

Ce changement met en lumière la transformation qu’a connu le Brésil avec son passage du statut d’économie en voie de développement à celui d’acteur puissant sur la scène mondiale.

De plus en plus, quantité de Brésiliens apprennent l’anglais et travaillent à l’étranger. Le gouvernement courtise les entreprises étrangères et se prépare à accueillir la Coupe du monde de football en 2014 et les Jeux Olympiques, à Rio en 2016. L’ouverture internationale du Brésil amène les Brésiliens à revoir leurs schémas de valeurs, à remettre en cause certaines de leurs traditions.

Des experts et des chefs religieux affirment que la hausse des revenus et l’élévation du niveau d’éducation, ainsi que le positionnement idéologique plus libéral des confessions protestantes ont poussé de nombreux Brésiliens à s’éloigner de l’Église catholique au profit d’autres traditions chrétiennes.
Alors que le nombre de catholiques déclarés diminuait, le nombre des protestants ou des adeptes du pentecôtisme a augmenté, passant de 9 % en 1990 à 20 % en 2009.
« Ce changement s’explique par l’attitude des églises protestantes, qui accordent beaucoup plus d’autonomie à leurs fidèles. En permettant, notamment, aux pasteurs de se marier et en autorisant le divorce », avance Cecilia Mariz Loreto, professeur à l’université de Rio de Janeiro.
Le pasteur Michel Medeiros – qui a découvert la Bible, alors qu’il était encore adolescent, pour comprendre les références à Jésus dans le mouvement Rastafari – remarque que la majorité des convertis dans son église protestante de Rio de Janeiro sont issus de familles traditionnellement catholiques.

Les femmes, vecteurs principaux de ce changement

Marcelo Neri, économiste à la Fondation Getulio Vargas et auteur de l’étude, a également fait remarquer qu’il existe une corrélation entre le pouvoir grandissant des femmes dans les sphères économiques et professionnelles et leur éloignement de la tradition catholique. Mais, elles n’en restent pas moins religieuses.
Dans ce sondage, parmi les catholiques déclarés, les femmes sont minoritaires par rapport aux hommes. Mais, sur l’ensemble de la population, les femmes se considèrent davantage religieuses que les hommes. Elles sont également mieux représentées que les hommes dans presque tous les principaux groupes religieux du pays.

Parmi elles, Ana Teresa Oliveria Rosa, qui a quitté l’Église catholique à un moment particulier de son existence. Elle s’était retrouvée au chômage et sa fille était tombée malade. Elle était partie chercher un prêtre, pour qu’il prie avec elle, et on lui a répondu que celui-ci dormait et qu’il ne pouvait pas venir prier avec elle. Elle a rejoint alors une église évangélique de son quartier.
« Je me suis convertie pour trouver quelque chose de différent, quelque chose qui a rempli mon cœur », explique-t-elle, aujourd’hui, alors qu’elle est, elle-même, devenue pasteur d’une église baptiste.

L’éloignement de la religion

Certains Brésiliens se détournent totalement de la religion, même s’ils conservent leurs croyances spirituelles. Environ 7 % des Brésiliens interviewés dans le cadre de cette étude prétendent n’avoir aucune religion. Le même pourcentage était négligeable, dans la société brésilienne, jusque dans les années 1980. Il s’agit, pour l’essentiel, de Brésiliens qui ont été catholiques jusqu’à récemment, le plus souvent, par obligation culturelle, mais qui ont perdu leur foi.
Parmi eux, Luis Fernando, un jeune étudiant en journalisme de Rio de Janeiro, a été baptisé catholique. Sa mère prie plusieurs fois par jour, pas lui. Il se déclare en désaccord avec certains des enseignements de l’Église et confie tout simplement : « Je me considère sans religion. »

Global Post/Adaptation Melania Perciballi 

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