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L’Inde, une 3e voix entre Chine et États-Unis

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[image:1,l]  Octobre a été placé sous le signe de l’Europe avec une série de sommets européens et un G20 à Cannes phagocyté par la crise européenne, dans ses versions grecque et italienne en particulier. Novembre est asiatique et pacifique. Enfin, pacifique pour « océan Pacifique » et cette zone immense qui, de manière inexorable, s’impose comme le nouveau centre du monde, supplantant le bon vieil Atlantique. Pacifiques, si les discussions le demeurent, elles n’en sont pas moins tendues et à la hauteur des nouveaux enjeux, des nouvelles rivalités en passe de voir le jour sur cette nouvelle scène mondiale.


Les États-Unis se recentrent sur l’Asie


Le recentrage des États-Unis sur l’Asie met l’Inde dans une position charnière qui pourrait accroître son influence dans la région et dans le monde entier. Mais cette nouvelle position est également très risquée.


Cette semaine, le président Barack Obama a réussi à inverser deux décennies de dérive politique. Il marque ainsi « le retour empathique des États-Unis au centre de la scène asiatique » selon C. Raja Mohan, chercheur au Centre de New Delhi pour la recherche politique. Les enjeux pourraient même être plus importants que pendant  feue la Guerre Froide.


« Comme les États-Unis commencent à prendre en compte la mesure de ce défi, il y a, par conséquent, une course à l’armement et une militarisation générale de la région. La Chine est tenue de répondre, ajoutait-il. Cela aboutira à de nouveaux affrontements au niveau régional. »


Équilibre calculé au Sommet de l’Asie de l’Est


[image:2,s]Après avoir passé quelques jours en Australie, juste le temps d’annoncer l’installation d’une nouvelle base militaire américaine dans le pays, Barack Obama a atterri en Indonésie pour participer au Sommet de l’Asie de l’Est vendredi 18 novembre.


Les États-Unis et la Russie ont répondu à l’invitation de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Les deux pays viennent ainsi imposer une présence forte face à la Chine et à ses revendications territoriales en mer de Chine méridionale.


C. Raja Mohan déclarait à ce sujet : « L’invitation des États-Unis est une illustration, lorsqu’on est en face d’un gorille de plusieurs centaines de kilos, il vaut mieux avoir pensé à inviter un autre gorille pour équilibrer. »


L’Inde profite de la méfiance générale au sujet de la Chine


Washington, mais aussi l’Australie, le Japon, la Malaisie et le Vietnam, soutiennent tous la Trans-Pacific Partnership, une alternative à « l’ASEAN Plus 3 », menée par la Chine.


Ces bouleversements géostratégiques pourraient offrir une formidable opportunité à l’Inde qui cherche à étendre son influence en Asie avec sa « politique de Look East ». Mais cette occasion n’est pas sans risques.


Le repositionnement américain en direction de l’Asie pourra faire de l’Inde un « partenaire stratégique » attractif pour les États-Unis. Les autres nations asiatiques craignent la montée de l’agressivité chinoise. New Delhi pourrait alors obtenir un nouveau rôle, une sorte de couverture contre Pékin pendant que Manmohan Singh, Premier ministre indien, essaie d’organiser un accord de libre-échange entre les pays de l’ASEAN.


Une stratégie risquée pour l’Inde


[image:3,s]Néanmoins, l’Inde ne peut pas se permettre de se jeter dans les bras des États-Unis. Cela augmenterait les craintes de la Chine. Elle ne doit pas non plus laisser croire qu’elle se ligue, au côté des petits pays d’Asie, contre la Chine.


L’Inde n’entretient pas de relations très amicales avec la Chine. Les deux pays se sont déjà affrontés pour un litige territorial en mer de Chine méridionale. Il semblerait également que New Delhi soit en train de recruter 100 000 nouveaux soldats qui seront installés le long de la frontière chinoise.


Dans ce contexte, les réunions successives du Premier ministre indien Manmohan Singh avec Barack Obama puis le Premier ministre chinois Wen Jiabao, vendredi 18 novembre au matin, ont donné quelques indications sur la future ligne que pourrait suivre l’Inde.


« Comme nous l’avons vu pendant la réunion entre Barack Obama et Wen Jiabao, l’Inde va s’engager des deux côtés, déclarait C. Raja Mohan, bien qu’elle renforce sa relation avec les États-Unis, elle va tenter de normaliser ses relations avec la Chine. »


Ainsi, après des semaines de tensions accrues alors que l’Inde poursuivait ses projets pétroliers communs avec le Vietnam, dans une zone de la mer de Chine revendiquée par Pékin, Manmohan Singh a pris soin de souligner que l’engagement en cours de l’Inde avec l’ASEAN ne se ferait pas au détriment de la Chine.


Manmohan Singh a déclaré à Wen Jiabao que l’Inde voulait travailler à de « meilleures relations » entre les deux pays. Il a également souligné combien, sur des questions telles que le changement climatique, les deux pays avaient coopéré sur la scène mondiale.


Pourtant, quelques minutes auparavant, le leader indien s’efforçait de donner des gages aux États-Unis.


Le pays du juste milieu


Tout comme pendant la Guerre Froide, lorsque l’Inde était une figure de proue du Mouvement des pays non-alignés, qui ont évité alors de choisir entre les États-Unis et l’Union soviétique, New Delhi va essayer de piloter une troisième voie entre les nouvelles superpuissances mondiales.


Néanmoins, C. Raja Mohan met cette idée en perspective : « si la Chine persiste à être hostile aux intérêts de l’Inde dans le sous-continent, ou n’est pas disposée à promouvoir des options raisonnables pour régler le différend frontalier, on peut imaginer un scénario dans lequel l’Inde serait non-alignée, mais du côté des États-Unis. »


Global Post / Adaptation Sybille de larocque – JOL Press

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