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Monti, témoin du bras de fer Merkel-Sarkozy sur la BCE

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[image:1,l]Avec le départ de Silvio Berlusconi et l’arrivée de Mario Monti, économiste et ancien commissaire européen, l’Italie retrouve la table des « grands d’Europe ». À moins que ce soit la voix de Bruxelles qui ne s’exprime à travers le nouveau venu, un fervent européen, de longue date. Dans tous les cas, si Allemands et Français partagent des analyses proches sur la nature et la gravité de la crise actuelle, des divergences demeurent sur les solutions à y apporter. Le chef du gouvernement italien fait figure de possible conciliateur.


Constat partagé : la crise de la dette est devenue politique et institutionnelle


Allemagne, France et Italie « pèsent » à eux seuls 70 % de l’euro. Si, bien évidemment, le contact est permanent entre les trois partenaires, rien ne vaut une rencontre pour se dire les choses les yeux dans les yeux – et, surtout, envoyer un signal fort de détermination aux observateurs, marchés financiers au premier rang. Les principaux responsables de la zone euro sont conscients de la gravité de la crise et agissent afin d’y trouver des parades efficaces – et durables.
La preuve est désormais faite que le malaise européen n’est pas la seule addition des problèmes nationaux puisque, malgré les plans d’aide et les changements de gouvernements dans certains des pays les plus touchés, il persiste. Circonscrire le « foyer grec » ou établir un « pare-feu » ne suffit apparemment plus, la crise est devenue éminemment politique et institutionnelle. Au-delà de l’euro, c’est bien l’avenir de l’Union qui se joue.


Si le défi est collectif, il reste à se mettre d’accord sur un plan de bataille unique. Or, les trois dirigeants arrivent à Strasbourg avec quelques divergences, notamment sur le rôle de la BCE. C’est à un véritable bras de fer que se livrent Nicolas Sarkozy et Angela Merkel.


Nicolas Sarkozy est favorable à des interventions de la BCE


[image:2,s]De plus en plus menacée sur les marchés financiers et alors qu’elle est sur le point d’entrer dans une période troublée, à cinq mois de l’élection présidentielle d’avril et mai 2012, la France tient à stopper la contagion – et à préserver son triple A décerné par les agences de notation.
Lors du Sommet européen des 26 et 27 octobre, Nicolas Sarkozy s’était fait l’avocat d’une mise en place rapide du fonds européen de stabilité financière (FESF). Puisque celui-ci peine à se mettre en place, le président français plaide, désormais, à en croire les déclarations de ses proches, notamment de son ministre des finances, François Baroin, pour le recours – ou la menace du recours – à des interventions massives de la Banque centrale européenne, transformée ainsi en prêteur de dernier recours. Ces interventions sont, en théorie, illimitées. Ce serait la solution pour que la crise ne s’étende pas à l’Espagne, à l’Italie… et à la France.


Angela Merkel refuse de renoncer à la discipline budgétaire


[image:3,s]Pour la chancelière allemande, le recours à la BCE  pour le rachat d’emprunts publics est une solution de court terme, puisque, inévitablement et rapidement, les États – au premier rang desquels l’Allemagne – devraient payer.
Cette fermeté pourrait n’être que stratégique. Mercredi 23 novembre, le Trésor allemand a, pour la première fois, eu des difficultés à se financer. Alors que Berlin mettait sur le marché 6 milliards de Bund, obligations d’État allemandes, seuls 3,89 milliards d’euros de titres ont trouvé preneur. Un signal d’alarme, mâtiné par le fait que les taux restaient très faibles à 1,98 % – bien en-deçà de ceux des autres partenaires européens.
On entend dire à Bruxelles que, dès que Berlin aura des certitudes sur une gestion rigoureuse de leurs comptes par ses partenaires, Angela Merkel et la coalition au pouvoir agiront. Le prix, la condition : sans doute une plus grande intégration européenne, des réformes institutionnelles de grande ampleur.


Mario Monti pourrait jouer le rôle du conciliateur


[image:4,s]Deux fois commissaire européen, le nouveau président du Conseil italien a su défier le tandem franco-allemand. Mais, là, son expérience de la mécanique communautaire et ses fortes convictions fédéralistes pourraient lui permettre de pousser à un compromis entre ses deux partenaires.
Par ailleurs, il s’est montré particulièrement favorable à la mise en place d’euro-obligations – une idée présentée mercredi 23 novembre, par la Commission dans un « Livre-vert ».
C’est dans l’intérêt de Mario Monti et de l’Italie de mettre en avant ses compétences, de chercher à s’imposer comme deal-breaker sur la scène européenne. Le manque de crédibilité de Silvio Berlusconi a coûté cher à l’économie et aux finances italiennes, son successeur n’ignore pas l’importance de la dimension psychologique de la crise actuelle.


Comme si le défi auquel sont confrontés les trois dirigeants n’était pas suffisant, il leur faudra, en plus, une fois les décisions prises, convaincre leurs opinions publiques de la justesse de leur choix. Il n’est pas sûr que, face à la gravité sans précédent de cette crise, leurs bonnes intentions, leur détermination à agir ne soient suffisantes pour en tirer le plein crédit.     

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