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Elio Di Rupo ou «l’American dream à la belge»

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Un Wallon qui ne parle pas flamand

À 60 ans, l’homme au désormais célèbre nœud papillon rouge représente l’espoir d’un renouveau pour le royaume de Belgique. Espoir à la sortie d’une crise politique pendant laquelle la Belgique s’est retrouvée sans gouvernement pendant plus d’un an et demi. Espoir également pour un pays qui se trouve au croisement d’une autre double crise. Crise institutionnelle d’une part et menace de contagion de la crise de la zone euro d’autre part.

Fait nouveau et remarquable, Elio Di Rupo est Wallon et francophone. Une première depuis Edmond Leburton en 1974. Il justifie ce handicap par un apprentissage tardif de la langue néerlandaise et un problème de surdité partielle. Dans une Belgique à grande majorité flamande, le nouveau Premier ministre devra se faire entendre parmi les deux communautés. Un défi qu’il pourra sans doute relever haut la main, il a désormais prouvé qu’il pouvait être une force de coalition dans le pays.

The Belgian dream

Elio Di Rupo, c’est « l’American dream à la belge », comme le dit le ministre libéral et flamand, Vincent Van Guickenborne. Issu d’une famille italienne modeste installée en Belgique depuis 1947, il est né à Morlanwelz, un camp pour immigrés, le 18 juillet 1951. Le petit Elio perd son père à un an dans un tragique accident de vélo. Seule pour élever la fratrie, sa mère, analphabète, devra se séparer de deux de ses enfants qui partiront en orphelinat. « On n’avait rien, mais j’avais l’amour de ma mère » raconte-t-il dans un livre d’entretiens qui vient juste de sortir en Belgique (Elio Di Rupo, Une vie, une vision).

Il comprend très vite qu’il devra redoubler d’efforts pour s’en sortir. C’est pendant qu’il poursuit des études de sciences, à l’université de Mons (il est docteur en chimie), qu’il rencontre la politique. Il est immédiatement attiré par le Parti Socialiste et devient militant. C’est à Mons que commence sa carrière, en 1982, il est conseiller communal avant de devenir échevin de la santé, de la rénovation urbaine et des affaires de la commune en 1986.<!–jolstore–>

Socialiste dans l’âme

[image:2,s]Puis, il grimpe les échelons, un par un, et devient successivement député européen, ministre de l’Enseignement et président de la région wallonne. En 1999, il abandonne tout et se consacre entièrement au Parti Socialiste dont il vient de prendre la tête. Le PS belge est un parti de masse qui accueille une grande majorité de francophones et qui a recueilli jusqu’à 40 % des suffrages en Wallonie.

Elio Di Rupo est précédé de son impeccable réputation. En 1996, lors de la sortie de l’affaire Dutroux qui ébranle le pays, il est accusé de pédophilie par un jeune. Ces accusations sont relayées par la presse qui n’épargne pas Elio Di Rupo. Quatre mois plus tard, il est complètement blanchi par la justice belge. À cette occasion, il doit révéler son homosexualité au grand public. Il avait été interviewé, à l’époque, par Florence Aubenas et Jean Quatremer, journalistes à Libération et avait déclaré : « Ce sont des moments où l’on pourrait sombrer corps et âme. On se dit que plus rien ne peut arrêter la mécanique […] Maintenant, on est bien forcé de vivre avec tout ce qui s’est dit ».

L’homme de la coalition

[image:3,s]Chargé par le roi de former un gouvernement, il réussit à écarter son principal rival, le Flamand et indépendantiste Bart de Wever. Socialiste dans l’âme, Elio Di Rupo n’en est pas moins ouvert, pragmatique et soucieux du moindre détail. Il est aussi très exigeant envers lui-même et ne prendra jamais une décision sans avoir préalablement étudié le sujet sous tous ses angles et avoir interrogé toutes les personnes concernées. Des qualités qui font de lui un homme responsable et réfléchi bien que difficilement à l’aise dans des situations d’improvisation.

Malgré tout, il se trouve à la tête d’un gouvernement qui compte douze ministres (six francophones et six néerlandophones) socialistes, libéraux et démocrates-chrétiens. Son objectif, désormais, sera de relever l’économie du pays : « Il y a une seule chose dont un gouvernement doit s’occuper : l’économie, l’économie, l’économie… Il faut avoir comme priorité de faire venir des entreprises, de créer de l’emploi, de créer de la richesse » disait-il en 1999 avant de prendre la tête du gouvernement wallon. Il aura désormais le loisir de mettre ses paroles en pratique, et de tenir la barque belge à flot, alors que la tempête de la crise menace de s’abattre sur le pays.

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