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Les personnalités de l’année 2011

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Alors que l’Europe se débat, confrontée à une crise de la dette sans précédent, et qui menace de faire s’écrouler plus de cinquante ans de construction de l’Union, le monde change. Si le monde ne cesse de changer, il est des moments cruciaux, des tournants où ces changements, longtemps pressentis, deviennent évidences. Sur plusieurs fronts, c’est ce qui s’est passé en 2011.
Cette sélection des « personnalités de l’année » reflète la réalité des enjeux, le nouvel équilibre des forces : en 2011, la Chine est désormais pleinement éveillée et le centre du monde a basculé de l’Atlantique vers le Pacifique ; le monde arabe a connu plus d’un « printemps » en une année ; l’Europe se démène pour sauver ses rêves et continuer à exporter ses valeurs humanistes ; et le Japon a rappelé au monde les risques du nucléaire…

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Hu Jintao : l’irrésistible ascension…

À la conquête du monde

Sûrement, discrètement, la Chine avance ses pions et, à l’image de son pays, Hu Jintao, longtemps en retrait sur la scène internationale, se montre désormais plus actif. Principal atout pour charmer – enchanter ou ensorceler – ses interlocuteurs, partenaires, affiliés, la puissance économique et financière quasi-illimitée, cette superpuissance en devenir – à moins que, à l’insu de tous, elle le soit déjà.
Sa priorité : les relations sino-américaines dont les termes, de plus en plus, semblent définis à Beijing. Mais, Hu Jintao est présent ailleurs, sur tous les continents et n’hésite plus à s’exprimer comme il l’a fait sous la forme d’une interview inédite au journal Le Monde lors de sa venue en France, à Cannes, pour le sommet du G20 des 3 et 4 novembre.

En Chine, plus ça change, moins ça change…

Sur le plan intérieur, pas de grands changements. Autant de fermeté que nécessaire pour contenir toute dissidence, surtout avec les craintes d’une contagion du « Printemps arabe ». Une attention toute nouvelle aux plus défavorisés. Comme si l’année de son 90e anniversaire, le parti communiste chinois découvrait la nécessité de partager les fruits de la croissance…

Et pour 2012 ?

La retraite, une retraite dorée ! Après dix ans à la tête de l’État, Hu Jintao cédera la place. Possible successeur, Xi Jinping, chef des communistes de Shanghai. Les luttes entre courants du PC chinois valent tous les multipartismes…

Barack Obama : la crainte de perdre son emploi

« Je ferai tout mon possible pour que notre économie se développe, pour créer des emplois et renforcer les classes moyennes. C’est ma bonne résolution de l’année » déclare le président américain, le 1er janvier, dans son élocution hebdomadaire à la radio et sur Internet.

Éviter à tout prix la dépression

Sur le plan intérieur, Barack Obama s’est mobilisé pour atténuer les effets de la crise économique : le chômage grimpe jusqu’à plus de 9 % au cours de l’été et, à travers tout le pays, la misère progresse. Pour cela, il doit ferrailler dur au Congrès, contre des républicains sortis revigorés des élections de mi-mandat de novembre 2010 : plan pour l’emploi, plan d’économies budgétaires, budget font l’objet d’âpres négociations. En cette fin d’année, les indicateurs économiques semblent se rétablir : la consommation reprend, le chômage baisse. Une aubaine alors qu’il lance la campagne pour sa réélection, l’an prochain.<!–jolstore–>

La ligne bleue du Pacifique

Sur le plan international, Barack Obama n’a pas plus brillé que les années précédentes. Au premier plan ès qualités, il peine à imposer son leadership et s’est rarement montré déterminant que ce soit au G20 ou tout au long du « Printemps arabe » et des crises syriennes et libyennes. L’essentiel est pour lui de « faire le job » et de tenir ses promesses de campagnes, les retraits d’Irak et Afghanistan. Une raison d’espérer ? S’il déserte la scène européenne, il met le cap résolument à l’ouest – d’un point de vue américain – et se montre très actif sur la scène asiatique. L’Histoire lui reconnaîtra peut-être d’avoir eu une véritable vision et d’avoir contribué à faire basculer le centre du monde de l’Atlantique au Pacifique.

Et pour 2012 ?

Une année de campagne et une réélection qui se jouera sans doute, comme souvent, sur l’économie. Son objectif : quatre ans de plus à la Maison Blanche.

Recep Tayyip Erdigan : un cavalier seul ?

[image:3,s] Et de trois ! À 57 ans, après huit années à la tête du gouvernement turc, Recep Tayyip Erdogan a remporté les élections législatives du 12 juin 2011. Son Parti de la Justice et du Développement (AKP) dispose désormais, à lui seul, d’une majorité qualifiée, suffisante pour réformer la constitution et instaurer, par exemple, l’élection au suffrage universel direct du président. À quoi rêve Erdogan, Premier ministre ou, un jour, président ? Nul ne le sait, tant l’Ottoman est difficile à décrypter : islamiste, mais « modéré » et admirateur de Mustapha Kemal, nationaliste mais pro-européen, aspirant à prendre la tête d’une alliance entre pays musulmans et fidèle atlantiste, allié d’Israël, mais soutien du Hamas à Gaza… Le « Printemps arabe » a renforcé sa stature internationale et, désormais, les Islamistes tunisiens, marocains et, dans une moindre mesure, égyptiens, se réfèrent à lui pour rassurer. On espère savoir pourquoi…

Mahmoud Abbas : la reconnaissance tardive

Les négociations avec Israël au point mort, le président de l’Autorité palestinienne risquait de voir sa légitimité contestée. Peu importe la responsabilité du gouvernement Netanyahu et ses faucons…

Un coup de poker à l’ONU

[image:4,s]Mahmoud Abbas, 76 ans, en poste à Ramallah depuis 6 ans, a tenté le passage en force et a présenté, le 24 septembre, une demande officielle d’adhésion de l’État de Palestine à l’ONU. Si cette initiative se heurte à l’opposition des États-Unis et d’Israël, l’UNESCO a montré la voie en devenant la première agence internationale à accueillir les Palestiniens le 31 octobre.

La paix avec le Hamas

L’enjeu est international mais tout autant national. Abbas doit faire face à l’opposition du Hamas au pouvoir à Gaza qui a marqué des points en échangeant le soldat franco-israélien Gilad Shalit contre 1 045 prisonniers politiques. Si la stratégie – du pire – israélienne pouvait consister à favoriser les Palestiniens les plus radicaux pour justifier ainsi un statu quo, et la poursuite de la colonisation, le président palestinien œuvre avec détermination à la réconciliation nationale palestinienne. Une réunion au Caire entre les représentants de son parti, le Fatah, du Hamas et des autres factions politiques a été l’occasion d’une manifestation d’unité. Le processus de réconciliation en cours…

Et pour 2012 ?

La poursuite des efforts en vue d’une reconnaissance internationale de la Palestine, une authentique réconciliation nationale et… la préparation de la relève, car le moment de passer approche pour le vieux leader.

Rached Ghannouchi : la victoire en priant

Il y a un an, le 17 décembre 2010, Mohammed Bouazizi, modeste vendeur de rue, s’immolait à Sidi Bouzid. Sa mort mettait le feu aux poudres et ainsi débutait une vague d’agitation révolutionnaire sans précédent, le « Printemps arabe ».

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L’ombre de Khomeini…

Rached Ghannouchi est en exil à Londres depuis plus de 20 ans. Le 14 janvier, Ben Ali s’enfuit mais ce n’est que 17 jours plus tard, le 31 janvier, que le chef historique des Islamistes tunisiens rentre à Tunis. Ses partisans l’accueillent en héros, les laïques s’inquiètent et, à Paris notamment, certains intellectuels évoquent le souvenir du retour de l’Ayatollah Khomeini à Téhéran le 1er février 1979. La Tunisie sera-t-elle le nouvel Iran ?

… le discours d’Erdogan

Ghannouchi se veut rassurant. S’il inquiète ou, simplement, dérange, il déclare rapidement n’être candidat à aucun poste officiel et laisse les commandes à son lieutenant, Hamadi Jebali. Le 23 octobre, les premières élections libres de l’histoire du pays donnent la victoire à Ennahda, leur parti, avec près de 40 % des voix. En coalition avec deux partis laïques centristes, les Islamistes contrôlent l’assemblée constituante et Jebali devient officiellement Premier ministre, le 14 décembre. Rached Ghannouchi veille sur l’idéologie du parti.

Et pour 2012 ?

Les Islamistes tunisiens resteront-ils sur cette ligne modérée, avec pour référence Recep Tayyip Erdogan ? Rached Ghannouchi se satisfera-t-il de sa position d’observateur ?

Bachar al-Assad : la mort rôde…

[image:6,s]Le vilain de l’année

Ben Laden et Kadhafi morts, Ben Ali et Moubarak sortis, Ahmadinejad et Kim Jong-il discrets… Bachar al-Assad termine 2011 dans le rôle du vilain, du vilain fou. Cette année n’avait pas trop mal commencé au royaume du président Assad fils, alors que la colère grondait à Tunis, au Caire, à Tripoli et au-delà, Damas semblait bien calme. Et pour cause, le pays est bien « tenu » après quarante ans de pouvoir familial.

Son bilan : 5 000 morts

En mars, tout bascule. C’est le printemps en Syrie et les premiers appels à manifester pour la liberté et la démocratie sont lancés. Immédiatement, le régime réagit, usant et abusant de toutes les armes de répression que met à sa disposition son système totalitaire. L’armée entre en scène et mène une guerre sans nom au peuple désarmé.
Dix mois plus tard, l’ONU estime à plus de 5 000 morts le bilan du soulèvement. La communauté internationale, occupée en Libye et empêchée par le soutien indéfectible de la Russie à son fidèle allié, ne fait rien d’autres que de voter des sanctions. La Turquie d’Erdogan hausse le ton, la Ligue arabe exclut ; on meurt toujours, de plus en plus, en Syrie et Bachar al-Assad affirme qu’il se battra jusqu’au bout. Aucun doute, l’homme reste muré dans son obstination.

Et pour 2012 ?

Le 15 décembre, la Russie présente un projet de résolution pour dénoncer la situation dans le pays. Une première étape vers un feu vert de Moscou à une intervention internationale, une intervention directe ou un appui logistique à l’armée syrienne libre. Le risque ? L’extension du conflit au cœur de la poudrière proche-orientale, au Liban et… à Israël. Version optimiste : 2012 marquera la fin de partie pour les Assad.

Angela Merkel & Nicolas Sarkozy : Madame et Monsieur Merkozy

[image:7,s]Ballottés sur leurs scènes politiques nationales respectives, la chancelière allemande et le président de la République française se sont démenés sur la scène internationale. Ensemble, ils ont franchi une étape supplémentaire dans les relations franco-allemandes. Si les symboles n’ont pas manqué depuis le traité de réconciliation signé à l’Élysée en 1963, jamais, les exécutifs des deux pays n’avaient autant donné l’impression de travailler conjointement.

Changer l’Europe

Confrontés à la crise sans précédent que traverse l’Union européenne, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont relégué au second plan Bruxelles et les structures communautaires. S’ils ne sont pas d’accord sur tout – loin s’en faut -, ils ont affiché inlassablement leur volonté de débattre et de s’entendre, au point de poser les bases d’une nouvelle gouvernance européenne marquée par le retour de « l’intergouvernementalité ».

Mention spéciale pour la Libye

Après quelques difficultés, un certain attentisme, dans les premières semaines du « Printemps arabe », la France s’est également distinguée par le rôle moteur qu’elle a joué dans la recherche d’une solution à la crise libyenne et la décision d’intervenir de l’OTAN et de ses alliés.

Et en 2012 ?

L’élection présidentielle en France se déroulera le 22 avril et le 6 mai 2012. À ce jour, le président n’a pas encore annoncé s’il serait, ou pas, candidat à un second mandat. En Allemagne, les prochaines élections au Bundestag sont prévues pour l’automne 2013.

Christine Lagarde : SOS économies

[image:9,s]Avec élégance et détermination, c’est ainsi que Christine Lagarde a relevé le gant quand il s’est agi de trouver à Dominique Strauss-Kahn un successeur à la direction générale du FMI. En prenant ses fonctions à Washington le 5 juillet, elle lavait, d’une certaine manière, l’affront fait aux femmes, et à la France, dans une chambre d’hôtel new-yorkaise…

En première ligne face à la crise

Alors qu’à l’été 2010, la presse française pressentait Christine Lagarde comme possible successeur au Premier ministre François Fillon, elle avait déclaré ne pas se sentir prête à exercer cette fonction et souhaitait demeurer ministre des Finances afin d’aller au bout des négociations du G20. Au cours des six derniers mois, elle a participé ès qualités au sommet de Cannes, clôturant la présidence française du G20, qu’elle avait orchestrée avec l’Élysée, mais, surtout, elle continue à parcourir le monde, et en particulier l’Europe, pour tenter d’aider ses anciens collègues, grands argentiers, à faire face à la crise de la dette, à sauver l’euro et à repousser le spectre d’une dépression globale.

Et en 2012 ?

Son mandat au FMI est de cinq ans. On imagine assez mal qu’elle n’aille au bout…

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