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Les sapins américains inondent le Mexique

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Dans un marché bondé de la capitale mexicaine, une longue file de clients attend devant un stand de sapins de Noël.
À gauche, les sapins cultivés dans les forêts proches de la ville : plus petits, plus verts et plus doux.
À droite, des sapins plus secs, plus grands et plus forts. Ils sont importés du Canada et des États-Unis.


Les Mexicains aiment les grands sapins


[image:3,s]« Donnez-moi le géant là-bas » demande un homme en pointant du doigt un de ces sapins.
Un employé aide le client à charger sur ses épaules l’arbre de deux mètres puis celui-ci se fraie un chemin à travers la foule, et repart avec son achat.
« C’est une honte, mais la plupart des gens préfèrent les grands arbres, ceux qui sont importés » témoigne le propriétaire du stand Diego Prado. « Les arbres mexicains sont des produits de bonne qualité, mais on en vend pas beaucoup ici. »
Les sapins de Noël américains et canadiens ont inondé le Mexique depuis quelques années, grâce à l’augmentation du commerce nord-américain.
Selon les chiffres du ministère pour l’Environnement mexicain, cette année, plus d’un million d’arbres ont traversé le Rio Grande afin de venir décorer les maisons des Mexicains qui s’apprêtent à célébrer la naissance de Jésus-Christ.
Les importations ont désormais dépassé la production locale (700 000 sapins cette année).


Le Sénat appelle le ministère des Forêts à défendre la production locale


Mais cette migration des sapins de Noël vers le sud n’est pas la bienvenue pour tous.
Certains producteurs et politiciens mexicains se plaignent de devoir faire face à cette compétition déloyale provenant des plantations américaines subventionnées.
Cette question a été soulevée par le Sénat mexicain.  Les sénateurs ont envoyé une requête officielle au ministère des Forêts, le 16 décembre, afin de demander le soutien des producteurs mexicains. Pour le Sénat, aider ces petits producteurs, c’est aussi soutenir l’économie locale.
« Ce type de plantations est une source d’emploi rural très importante » selon le document cité par l’agence de presse gouvernementale Notimex. « Ces plantations génèrent plus de 500 000 pesos (27 000 euros) par hectare. »


Les échanges entre le Mexique et les États-Unis ne cessent de grimper


[image:2,s]Les échanges autour du Rio Grande ont beaucoup augmenté depuis la signature du Traité de libre-échange nord-américain en 1994, suivi par la suppression graduée des taxes sur la plupart des produits.
En 1993, le Mexique et les États-Unis échangeaient des biens pour une valeur de 80 000 milliards de dollars. En 2010, ces échanges ont atteint une valeur de 392 000 milliards.
Les États-Unis importent plus qu’ils n’exportent au Mexique. En 2010, ils ont ainsi exporté des biens vers le sud pour une valeur totale de 163 000 milliards et acheté pour une valeur de 229 000 milliards.
Plusieurs industries automobiles se sont déplacées de Détroit jusqu’à certaines villes mexicaines telles que Puebla, laissant de nombreux salariés sans emploi.
Les avocats mexicains sont souvent plus gros et plus juteux que les avocats américains. C’est un produit de choix pour une grande partie des États-Unis.
Mais, pour ce qui concerne la culture des arbres de Noël, les pays du nord sont, de loin, les gagnants.
Cristian Fernandez, producteur de sapins dans une ferme de l’État de Mexico, affirme que les plantations américaines sont plus compétitives car leur production est plus vieille.
« Il y a quelques décennies, la tradition du sapin de Noël n’existait pas vraiment. Puis, la demande a grimpé » explique-t-il. « Nous sommes en train d’étendre la production, mais nous ne pouvons pas encore satisfaire tout le monde. Nous cherchons aussi des espèces différentes qui pourraient concurrencer celles qui sont importées. »
Les producteurs de sapins de Noël mexicains cultivent des espèces de sapins et de pins qui résistent aux altitudes et aux conditions climatiques du massif central mexicain.
Malgré leurs pousses riches et leurs feuilles vertes foncées, les arbres mexicains sont généralement plus petits que les espèces américaines, comme le sapin Douglas.
L’imposant sapin Douglas est tellement populaire au Mexique qu’il a atteint les 477 000 exemplaires importés cette saison.


Les écologistes s’alarment


[image:4,s]Pour les politiciens mexicains, la question des arbres de Noël ne se limite pas à un problème d’importation.
Les écologistes dénoncent l’abattement illégal de sapins dans les parcs nationaux, conséquence directe, selon eux, de la demande croissante. Ces sapins sont ensuite vendus sur les marchés. Cette déforestation a particulièrement endommagé les parcs de l’État vert de Puebla, à l’ouest de Mexico-city.
Elias Abaid, représentant du parti des Verts au Parlement de l’État de Puebla, a incité les consommateurs à exiger, lors de l’achat d’un arbre, le certificat qui garantit sa provenance.
« Nous invitons les personnes à faire cet effort lorsqu’ils achètent des arbres […] Cela garantit la conservation et la production de ces espèces » affirme Elias Abaid.
Dans un supermarché Wal-Mart, une chaîne très présente au Mexique, une famille a remplacé les traditionnels arbres mexicains et américains par un sapin en plastique, fabriqué en Chine.
La mère, Alberta Aguilera, une architecte de 34 ans, affirme que son choix n’a pas été dicté par les politiques concernant les sapins de Noël. Si elle a acheté un sapin en plastique, c’est parce qu’il est plus pratique, moins cher et plus propre.
« J’aime bien les vraies plantes et j’en ai beaucoup chez moi, affirme-t-elle. Mais à quoi bon acheter un arbre qui sera mort dans un mois ? »


GlobalPost/Adaptation Melania Perciballi pour Jol Press 

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