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Principe de précaution et principe du parapluie

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L’affaire des prothèses mammaires PIP est, au regard des grands scandales sanitaires tels que le sang contaminé, l’hormone de croissance ou la vache folle, une sorte d’anecdote. Elle est en revanche exemplaire si on la replace dans la perspective de l’application du désormais fameux « principe de précaution ».


Inscrit dans la constitution depuis février 2005, notre principe de précaution national était déjà une originalité [seuls l’Allemagne et le Brésil l’ont également porté au plus haut niveau de la norme juridique] mais l’affaire des implants au gel de silicone frelaté est en passe de s’imposer comme une exception mondiale.


En France, 30 000 femmes concernées, 60 millions d’euros engagés


Alors qu’aucun risque grave pour la santé – notamment de cancer – n’a été démontré sur la planète en cas de rupture ou de suintement des implants, le ministre français de la Santé décide la prise en charge par l’Assurance-maladie du retrait des prothèses incriminées. 30 000 femmes sont concernées et devront repasser sur la table d’opération ; 60 millions d’euros, au bas mot, sont engagés.


Après tout, que la France fasse cavalier seul dans le domaine de la protection sociale où sa performance a longtemps été présentée comme un modèle pourrait être un sujet légitime de fierté.


Pourtant, il n’en est rien et des voix s’élèvent même pour mettre fermement en cause cette décision. Force est d’ailleurs de constater que les arguments critiques invoqués ne manquent pas de poids.


La décision logique aurait été de choisir une surveillance renforcée


Alors que le Comité d’experts français, réuni en urgence le 22 décembre, a conclu clairement que le lien soupçonné entre les implants PIP et la survenue de cancers ne peut être établi, la décision logique aurait été de conseiller une surveillance renforcée des femmes concernées. Une position choisie par la totalité des pays concernés sur les cinq continents (84 % des 100 000 prothèses produites chaque année par PIP étaient vendues à l’étranger).


On peut gloser à l’infini sur les niveaux respectifs de traumatismes générés par la conscience d’avoir un corps étranger défectueux dans l’organisme en cas de non-opération et par la perte d’une image positive de soi en cas d’explantation [la Sécurité sociale ne prendra évidemment en charge que le retrait des prothèses PIP, pas la pose de nouveaux implants]. On ne peut en revanche pas nier que, médicalement, la mobilisation générale du dispositif sanitaire ne s’imposait pas.


Alors, preuve de courage ou, au contraire, de couardise politique ? Stricte application d’une obligation constitutionnelle, le principe de précaution, ou triste illustration d’une posture politicienne, le principe du parapluie ?

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