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À Bruxelles, les 27 espèrent tourner la page de la crise

[image:1, l]Les chefs d’État et de gouvernement des Vingt-sept pourront juger par eux-mêmes des effets de leurs politiques d’austérité sur les relations sociales : la capitale belge, où ils se retrouvent aujourd’hui, lundi 30 janvier 2012, pour un sommet européen, est paralysée par une grève générale et les autorités du royaume ont mobilisé les grands moyens, policiers et militaires, pour garantir le bon déroulement des travaux.

Plus question, cette fois-ci, de « sommet de la dernière chance » ou de « sauvetage de la zone euro », la réunion est officiellement une rencontre « informelle » pour évoquer la situation de la zone euro. Les partenaires européens estiment qu’ils ont su prendre les mesures nécessaires le 8 décembre dernier et qu’il s’agit pour eux, désormais, de mettre en œuvre les remèdes qu’ils avaient alors adoptés pour tourner le dos à la crise de la dette.

Finaliser le « pacte budgétaire »

Ce pacte, officiellement intitulé « Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire », devrait être adopté ce lundi. Il le sera sans doute sans grand enthousiasme.

Angela Merkel l’a rappelé, mercredi 25 janvier, lors du discours qu’elle a prononcé à l’occasion de l’ouverture de la 42e édition du Forum de Davos : l’Allemagne a fait de la finalisation du nouveau pacte budgétaire une condition sine qua non de sa solidarité à l’égard de ses partenaires européens en difficulté. Les moins enthousiastes seront contraints de suivre puisque la ratification de ce texte, négocié par 26 pays – le Royaume-Uni a refusé, par avance, d’y adhérer —, sera nécessaire pour qu’un pays puisse bénéficier d’aides financières de ses partenaires.

Le pacte devrait imposer la mise en place d’une règle d’or sur le retour à l’équilibre budgétaire et introduire des sanctions quasi automatiques contre les comptes publics qui dérapent. Reste notamment à savoir quel sera le champ exact de ce nouveau régime de sanctions : servira-t-il à punir les seuls dérapages de déficits ou de la dette globale aussi ?

Le MES sur la rampe de lancement

Certaines voix estiment que l’Europe gaspille son temps avec un texte exigeant de lourdes procédures de ratification pour des résultats, somme toute, limités – et qui auraient peut-être pu s’obtenir avec de simples directives. C’est la position de la Commission européenne, quelque peu marginalisée par les grandes capitales, et de nombreux membres du Parlement européen. Les syndicats, quant à eux, craignent les effets à long terme d’une généralisation de la règle d’or budgétaire.

Cette initiative a sans doute rassuré les marchés et contribué à l’accalmie observée depuis un mois, malgré les dégradations des notes souveraines d’États membres. Beaucoup de pays espèrent que ce traité rassurera la Banque centrale européenne (BCE) et l’encouragera à intensifier son action face à la crise de la dette. L’Allemagne pourrait aussi accepter à terme d’augmenter de 500 à 750 milliards d’euros les ressources du Fonds de secours permanent de la zone euro (MES, pour Mécanisme européen de stabilité), qui sera mis sur les rails lundi lors du sommet, alors qu’elle s’y refusait jusqu’alors malgré les appels du pied du FMI et de la France. Le traité pourrait sans doute « créer une dynamique », résume un diplomate européen de haut rang.

L’objectif principal : la croissance et l’emploi

Les dirigeants espèrent consacrer l’essentiel de cette réunion à la croissance et à l’emploi, deux sujets longtemps occultés par la crise de la dette et les plans d’austérité qui frappent les populations.

L’objectif des Vingt-sept, au-delà de leurs désaccords, est surtout d’envoyer un message d’optimisme à la population européenne – un peu à la manière de Barack Obama aux États-Unis. L’idée est de tourner lentement la page de deux années de crise, en essayant d’avancer sur des questions à la dimension plus sociale, comme le chômage des jeunes. Il semble, pour autant, qu’il ne faille pas s’attendre à des chiffres précis ou décisions spectaculaires. Là encore, il s’agirait avant tout d’un nécessaire affichage politique. Parmi les réflexions en cours, la redirection des budgets de certains fonds européens vers des projets de création d’emplois, tels des dispositifs d’aide aux petites et moyennes entreprises.

Accord sur les objectifs, division sur les méthodes

La tâche devrait être difficile tant les pays européens ne privilégient pas les mêmes recettes pour favoriser la croissance. Le Royaume-Uni du conservateur David Cameron ne jure que par la libéralisation et le marché unique européen ; l’Allemagne d’Angela Merkel souahite aussi davantage de déréglementation, mais mise avant tout sur l’austérité budgétaire ; la France de Nicolas Sarkozy aimerait que l’on se penche aussi sur un rapprochement des politiques fiscales pour éviter le dumping.

Malgré leur détermination à tourner la page de la crise, les chefs d’État et de gouvernement doivent encore garder un œil sur l’urgence de la situation grecque, dont le sort dépend des résultats des négociations avec ses créanciers privés pour effacer ses quelque 100 milliards de dette. Nul doute qu’une fois encore les discussions se poursuivront jusque tard dans la nuit, et que, sur place, les conférences de presse nocturnes, voire matinales, seront autant de manifestations d’optimisme renouvelé. 

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