Le barrage des Trois-Gorges, situé au centre de la Chine, est au cœur d’une grande polémique depuis le début de sa construction, en 1994. La plus grande centrale électrique du monde se révèle être un désastre pour l’écologie et l’économie de la région qui l’entoure. Et ce symbole de la fierté nationale voit son image se fissurer de toutes parts.
[image:1,l] Le niveau du lac Poyang, situé dans l’est de la Chine, est étrangement bas en ce mois de janvier 2012. Les pêcheurs, habitués à travailler sur la plus grande étendue d’eau douce du pays, 3 500 km², sont bien démunis. Devant eux, une vaste étendue vide. Le lac ne mesure plus que 200 km² depuis la sécheresse foudroyante qui s’est abattue sur le pays au printemps 2011. Du jamais vu depuis soixante ans ! Un désastre climatique qui ruine la vie économique et écologique locale.
Le barrage des Trois-Gorges, à 500 km du lac
Mais la sécheresse n’est pas l’unique raison de cette vision apocalyptique. À 500 km en amont du lac, en suivant le Yang Tsé, le fleuve Bleu, a été construit le plus grand barrage hydraulique et la plus grande centrale électrique du monde. Le barrage des Trois-Gorges, long de 2 335 mètres et haut de 140 mètres, s’impose de toute sa puissance dans la province du Hubei.
Ce barrage, qui a fait la fierté du gouvernement chinois lors de sa mise en marche en 2006, se trouve être le grand coupable de cette catastrophe écologique, économique et sociale.
Afin de produire de l’électricité, le barrage retient l’eau du Yang Tsé grâce à son réservoir de 39 milliards de m3 et réduit son flot. Le niveau du fleuve est donc plus bas et les eaux du lac Poyang se déversent dans le lit pour combler le manque et non le contraire.
Catastrophe écologique
Depuis la construction du barrage des Trois-Gorges, les conséquences ont été désastreuses. La baisse du niveau des eaux réduit le nombre de poissons dans le lac, qui est un lieu de passage pour beaucoup d’oiseaux migrateurs ainsi privés de nourriture. D’autre part, la grande quantité d’eau stockée dans le réservoir peut provoquer des glissements de terrains et des tremblements de terre, fréquents dans la région.
Depuis la création du site, le dauphin de Chine, une race évoluant exclusivement dans les eaux du Yang Tsé, s’est éteint. Cette extinction aurait été provoquée par l’accumulation d’algues dans le fleuve et par la pollution due à l’installation du barrage.
Bouleversement économique
L’économie locale a également largement souffert du barrage des Trois-Gorges. Depuis le début du chantier, en 1994, un millier de villes et de villages ont disparu ou ont été désertés, provoquant la fuite de 1,4 million de personnes. Près du lac Poyang, les pêcheurs ne peuvent plus sortir et sont contraints de cher de nouveaux emplois.
Le gouvernement qui faisait la sourde oreille sur le sujet depuis des années commence à prendre conscience de la situation et à admettre les conséquences catastrophiques de l’installation du barrage. Dans un communiqué publié au printemps dernier, la Chine a reconnu certains effets nocifs dans la région. Désormais, pour rattraper la situation, certains chercheurs en hydrologie imaginent la construction d’un nouveau barrage, installé à l’endroit même où la lac Poyang est relié avec le Yang Tsé. Une idée qui ne fait pas l’unanimité au sein la communauté scientifique. Les conséquences d’un tel chantier ne pourraient-elles pas empirer une situation déjà critique ?
