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Lettre ouverte à mes confrères de la finance

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Les résultats du sondage Harris Interactive réalisé pour JOLPress.com sur le thème « Les Français et la taxe financière » qui est publié aujourd’hui ne constituent pas une surprise pour beaucoup d’entre nous.

Dénigrement de la finance

Ils seront nombreux à considérer qu’il ne s’agit là que de la conséquence de la campagne permanente de dénigrement dont notre profession fait l’objet depuis de nombreuses années.

Je pense que, malheureusement, la réalité est beaucoup plus profonde que cela et que quelque part, ces rancœurs accumulées par nos sociétés vis-à-vis de notre profession doivent nous interpeller.

En effet, depuis 2008, le sauvetage du système financier mondial a été perçu comme une grande injustice par le manque d’équité qui s’en est suivi.

Pour reprendre la phrase de Chawki Amari (journaliste romancier Algérien), « La promesse et le conditionnel, l’injustice et la peur se sont alliés dans le meurtre du futur »…

La finance ébranle le monde

Plus que jamais, cette phrase sonne à nos oreilles comme les prémices d’un mouvement qui, s’il se produisait, serait bien plus grave que la défaillance d’un établissement financier aussi important soit-il.

Notre société a changé, notre monde est en complète mutation et l’émergence des techniques modernes de communication rendent possible l’impossible.

Qui aurait pu imaginer que le XXIème siècle verrait la chute de dictateurs en Egypte, en Tunisie, en Libye, faire chanceler un régime comme en Syrie ? Qui aurait pu prédire que plusieurs pays européens dont la Grèce, l’Italie, l’Espagne, la Hongrie perdraient leurs dirigeants démocratiquement élus de la seule volonté de la finance ?

Bien évidemment, tout cela semble éloigné des questions qui se posent aujourd’hui à nos concitoyens, dont les préoccupations principales, pour une très grande majorité d’entre eux, se résument à déterminer comment ils pourront vivre au jour le jour.

Cette situation crée une anxiété et une crise de confiance sans précédent et nous en sommes, si ce n’est les responsables, du moins les acteurs principaux, parce que nous avons oublié les principes mêmes de fonctionnement de nos sociétés.

La confiance populaire est le ciment de la finance

Nous ne pouvons exister que parce que la confiance est là, que les populations acceptent de nous faire dépositaire de leurs richesses parce que nous savons, avec cette compétence qui est la nôtre, permettre d’irriguer le tissu économique pour éviter qu’il ne se dessèche. Cela implique des contraintes mais aussi des obligations, parmi lesquelles l’une d’entre elles, malheureusement, a tendance à être trop souvent mise de côté, celle de se montrer exemplaire dans notre comportement.

Comment peut-on juger aujourd’hui les déclarations récentes dans les médias de l’un de nos Présidents de Banque qui affirme : « Les banques n’ont pas vocation à investir dans la dette souveraine à long terme » ?

Doit-on lui rappeler que les Etats et donc, les concitoyens, n’avaient pas vocation à intervenir en 2008 et encore aujourd’hui pour sauver notre système financier mondial, qui avait su pendant de nombreuses années privatiser ses profits et qui lorsque « la bise fut venue se trouvant fort dépourvu », a demandé à mutualiser ses pertes ?

Dogmatisme contre pragmatisme

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Je pense qu’il est bon de nous rappeler, comme le prouvent les éléments statistiques dont nous disposons, comme le montre le graphique ci-dessus, que de 2002 à nos jours, la masse monétaire créée par la Banque Centrale Européenne et donc, la Zone euro a été équivalente à celle créée au même moment par la FED, mais que l’affectation de ses ressources fut totalement différente, puisque la FED en injecta l’essentiel dans le soutien aux différentes actions publiques, alors que, pour notre part, elles furent toutes versées aux systèmes financiers.

Pour que nul ne l’ ignore, il convient ici de rappeler que cette manne aurait pu permettre de rembourser la totalité de la dette publique grecque, portugaise et que le solde aurait pu être largement affecté à des plans de relance, comme ce fut le cas aux Etats-Unis depuis 2008 avec les résultats marquants qui semblent se dessiner aujourd’hui.

Chacun doit prendre conscience que ces choix qui ont été faits peuvent conduire, aujourd’hui, à se poser la question du bien-fondé de la démarche qui s’en est suivie.

A la lumière de ce qui précède, les dogmatismes claniques ne devraient-ils pas maintenant laisser leur place à un pragmatisme collectif ?

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