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Maurizio Cattelan ou les mystères de l’art

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« L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible », disait le peintre Paul Klee.

Le musée Guggenheim de New York exposait (jusqu’au 22 janvier) les œuvres de l’Italien Maurizio Cattelan, artiste détenteur du record d’enchères dans les salles de ventes.

Maurizio Cattelan, dont c’était, selon ses dires, sa dernière exposition, est l’un des artistes contemporains les plus recherchés de sa génération, à l’instar de Jeff Koons et Damien Hirst.

Maurizio Cattelan au Guggenheim

Profitant de l’architecture particulière du bâtiment qui l’accueille, l’exposition se résumait en une pièce majeure, sorte de gigantesque mobile d’où pendaient au bout de longs filins blancs les œuvres de la collection complète du sculpteur.

Le visiteur, en montant le long couloir circulaire du Guggenheim, se retrouvait face à une statue d’Hitler en train de prier, à Kennedy dans un cercueil, au Pape Jean-Paul II écrasé par une météorite, à un buste de Stéphanie Seymour (dont la ressemblance était plutôt douteuse), à une statue en cire géante de Picasso, à un squelette de dinosaure, à des animaux empaillés dont un éléphant masqué et un cheval sans tête…

De l’art sans emerveillement

Les amateurs éclairés du genre crient au génie, pour ceux dont les lumières de l’art contemporain restent souvent opaques, comme pour moi par exemple, la perception est toute autre.

Le problème justement est l’absence de toute sensation, de toute émotion, l’absence d’émerveillement. Comment s’émerveiller quand tout est laideur, lorsque la beauté n’existe nulle part, comme s’il avait fallu la chasser pour plaire. 

Le débat sur l’art contemporain n’a pas fini de faire couler de l’encre.

Pourquoi un point noir sur une toile blanche atteint des prix vertigineux? Qu’est-ce qui attribue une côte faramineuse à un artiste dont l’œuvre se résume à faire des traits de pinceaux N°50 tous les 30 centimètres et ce depuis des décennies? A un autre qui renverse des ordures ménagères sur le sol, ou comme je l’ai vu un jour au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, à une déjection humaine posée à même le sol ; quoi que là, le génie de l’artiste fut d’avoir réussi le pari improbable d’avoir transformé de la merde en pesant d’or.

Spéculation et déraison

Sérieusement, est-ce le fait que les plus-values réalisées sur les œuvres d’art ne soient pas taxées qui a conduit les grandes fortunes de ce monde à attribuer une valeur financière à ce qui artistiquement n’en a pas ?

De la même façon que les traders de la finance ont créé des valeurs artificielles pendant des décennies, spéculé à outrance dans la plus grande impunité, inventant des produits financiers dont ils ne comprenaient plus eux-mêmes le fonctionnement, est-on en train d’assister dans le domaine de l’art contemporain à la même déraison, la même folie engendrée par l’appât du gain ?

Les Indignés des musées

Et comme les financiers nous ont mené au bord du gouffre, doit-on laisser nos musées être envahis par des œuvres sans intérêt mais déclarées géniales par ceux dont elles régalent les portefeuilles ? Doit-on laisser telle vacuité envahir nos espaces culturels ?

Et comme j’en venais à douter de ma sensibilité artistique, je n’ai pu résister à m’engouffrer dans une salle annexe, où sont exposés des tableaux de Seurat, de Picasso, de Van Gogh, de Cézanne, de Braque

Ouf, on y respire, l’art est là, le véritable, celui qui provoque une émotion durable.

En partant du Guggenheim, je me suis demandée quand défileraient les indignés des musées.    

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