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Le Parlement vote la rigueur, Athènes s’enflamme

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[image:1,l]Jeudi dernier, les chefs des trois partis de la coalition au pouvoir avaient donné le feu vert à l’adoption d’un nouveau plan de rigueur, condition sine qua non au versement d’une nouvelle aide par les créanciers de la Grèce – Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international. Il ne restait plus au Parlement grec que de voter cette nouvelle cure d’austérité.

Un vote acquis magré une majorité réduite

C’est chose faite depuis dimanche soir. Un vote dans la difficulté, puisque la majorité se fissure : le Premier ministre Lucas Papademos n’a recueilli que 199 voix sur les 236 qui lui sont, en théorie, assurées. Un recul relatif qui fait suite à la démission, jeudi, de six ministres, deux socialistes et quatre d’extrême droite. Le gouvernement avait mis en garde les parlementaires contre le scénario du « chaos » en assurant que, en cas de rejet du texte, le pays serait alors rapidement conduit à se déclarer en cessation de paiement et à sortir de l’euro.

Des milliers de manifestants devant le Parlement

La rue s’est élevée avec violence contre le vote des parlementaires. Plus dizaines de milliers de manifestants – 80 000 selon les estimations de la police – s’étaient massés à Athènes, aux abords de la place Syntagma, devant le Parlement.

[image:2,l]Peu après le rassemblement, la place a été noyée sous les gaz lacrymogènes par les forces de police. Pour échapper aux fumées, le compositeur Mikis Théodorakis, 86 ans, fondateur d’un nouveau parti nationaliste, qui s’apprêtait à prendre la parole sur la place, s’est réfugié dans l’enceinte de l’hémicycle « pour voir dans les yeux ceux qui s’apprêtent à condamner à mort la Grèce ». De même que le héros de la résistance Manolis Glezos, 89 ans, connu pour avoir décroché le drapeau nazi de l’Acropole en 1941 : « Est-il possible d’imposer ces mesures à coups de gaz lacrymogène ? Elles n’ont pas reçues le vote du peuple grec ».

Samedi, des membres du syndicat communiste, le PAME, avaient accroché une banderole sur le Parthénon : « A bas la dictature du monopole de l’Union européenne ». 

Scènes de désolation dans une capitale assiégée

Les affrontements avec les forces de l’ordre, d’une rare violence, se sont poursuivis jusque tard dans la soirée et près d’une vingtaine de batiments ont été incendiés suite à des jets de cocktails Molotov. Dans la nuit de dimanche à lundi, l’Attikon – un magnifique cinéma à l’ancienne du centre de la capitale – était encore ravagé par les flammes, tout comme un immeuble désaffecté à quelques dizaines de mètres. Les pompiers continuaient leur intervention au siège d’Alphabank, d’où les flammes avaient cessé de sortir.

Sur la place Korai, devant l’université, les incendies qui s’étaient déclarés dans un autre cinéma, dans un magasin de la chaîne américaine Starbucks ou dans une succursale d’Eurobank, avaient été circonscrits, mais la place était dévastée. Les rues du centre-ville étaient jonchées de morceaux de marbre arrachés des immeubles voisins, de débris de verre, de restes calcinés de barrages improvisés. Dans les magasins, les alarmes sonnaient dans le vide.

Sortie de crise ou début de faillite ?

Comme promis lors de la réunion à Bruxelles de l’Eurogroupe, jeudi 9 février, l’Union européenne devrait débloquer une nouvelle aide de 130 milliards à la Grèce. Cette aide devrait, en théorie, permettre au pays de faire face à ses dettes. 

Aleka Papariga, chef du parti communiste KKE, un des derniers partis staliniens en Europe, a appelé au soulèvement populaire contre la politique du gouvernement et les conditions imposées par les créanciers internationaux.   

Si, une fois de plus, le gouvernement affirme que la Grèce est tirée d’affaire par le vote de son Parlement, c’est désormais la réaction populaire qui suscite les pires inquiétudes. Les Grecs supporteront-ils longtemps la cure d’austérité qui leur est imposée ? Pour beaucoup, la Grèce a déjà fait faillite…

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