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Mondial et JO : le Brésil a-t-il été trop gourmand ?

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[image:1,l]Le Brésil accueillera en l’espace de deux ans deux évènements majeurs de la scène sportive : la Coupe du monde de football, du 12 juin au 13 juillet 2014 et les Jeux olympiques de l’été 2016. L’occasion, selon le gouvernement, de relancer l’économie du pays. Mais l’opposition pointe du doigt les préparatifs astronomiques, accusés de creuser davantage l’écart entre les classes sociales.

Les plus pauvres privés de foot

[image:3,s]Pour les Brésiliens, qui ont le football comme deuxième religion, ne pas pouvoir assister à la Coupe du monde dans leur propre pays est inconcevable. Mais c’est ce qui va sûrement se passer en 2014. En cause, le prix bien trop élevé des billets de matchs, culminant à près de 100 dollars l’unité. Une très large partie de la population ne pourra pas se permettre d’assister aux matchs du Mondial. Sur les trois millions de billets mis en vente, seul un million sera vendu. Le reste des billets invendus sera redistribué entre la FIFA et d’autres associations nationales de football dans le monde. Ce qu’a déploré Christopher Gaffney, professeur américain étudiant les préparations des deux tournois au Brésil à l’université fédérale Fluminense : « Quel public en bénéficie ? »

Face à la pauvreté de la population, la FIFA a autorisé la vente au Brésil de 300 000 billets à 25 dollars l’unité. 100 000 autres billets seront destinés aux défavorisés, peuples indigènes et individus en situation d’extrême pauvreté. Mais tout cela n’est pas suffisant pour la légende du football brésilien. Romário de Souza Faria, vainqueur de la Coupe du monde en 1994, à présent député fédéral du Parti socialiste brésilien, critique l’élitisme de la FIFA : « Les retraités brésiliens n’auront pas les moyens financiers de dépenser autant, et seront, par conséquent, exclus de la Coupe du Monde », a-t-il récemment twitté.<!–jolstore–>

Des dépenses astronomiques

Les dépenses du gouvernement pour les infrastructures, la rénovation et la construction de nouveaux stades font grincer des dents. Initialement prévue à trois milliards de dollars, la facture des équipements sportifs ne cesse de grimper pour atteindre maintenant les quatre milliards. Christopher Gaffney critique sévèrement la décision du gouvernement brésilien d’utiliser les dernières technologies de pointe dans ses douze stades. La plupart des infrastructures seront équipées de toits à panneaux solaires et de sièges rétractables. Il faudra rajouter au prix déjà très élevé des nouvelles technologies 10 % pour leur entretien.

« En dix ans, vous aurez payé deux fois le prix de chaque stade », a déclaré Gaffney à GlobalPost. Selon lui, le Brésil aurait dû accueillir les championnats dans des infrastructures plus simples, gardant en tête la réalité sociale du Brésil où le SMIC est de 680 dollars et où des millions de Brésiliens ne se contentent que d’une petite partie pour vivre.

Rien qu’à São Paulo, 280 millions de dollars d’argent public ont été dépensés pour rénover le stade de l’équipe de foot des Corinthians, l’un des stades qui accueillera les matchs du Mondial. « Cet argent aurait pu servir à financer des nouveaux logements, des écoles et des universités », a regretté Tita Reis, membre du Comité du peuple de São Paulo pour la Coupe du monde au journal brésilien O Globo.

Un retard considérable sur les travaux

[image:2,s]Malgré des moyens énormes pour la préparation des deux tournois, le retard du Brésil sur leurs travaux ne fait que s’acccentuer. En octobre 2011, l’ancien ministre des Sports brésilien, Orlando Silva, alors chargé d’organiser le Mondial de football et les Jeux olympiques, avait démissionné face aux accusations de détournements de fonds et de corruptions étalées dans la presse, mettant encore plus en péril l’organisation des deux championnats. Le président de la FIFA, Jospeh Blatter, avait remis les pendules à l’heure : « Je voudrais dire à mes collègues brésiliens que la Coupe du monde 2014, c’est demain, les Brésiliens pensent que c’est seulement après-demain ».

Des expulsions violentes

Ces travaux de grande envergure ont mené à l’expulsion de près de 15 000 personnes rien qu’à Rio de Janeiro. Selon Alexandre Mendes, ancien directeur du bureau de la défense du droit au logement du Brésil, « plusieurs de ces expulsions n’ont pas respecté les principes et droits fondamentaux des lois internationales et locales ». Des familles entières auraient été expulsées tard dans la nuit, alors que les bulldozers attendaient dehors pour commencer leur travail. Ces violentes expulsions ont ainsi obligé les habitants à déménager dans des maisons précaires, loin de leur communauté, en échange d’une maigre compensation financière.

Des grèves ont eu lieu sur les chantiers consacrés au Mondial, dues au mécontentement des salariés face à ces procédures.

Le ministre des Sports, Aldo Rebelo, a déclaré que les profits dont bénéficiera le Brésil valaient bien quelques inconvénients : « C’est une opportunité énorme et nécessaire pour le Brésil. Cela nous permettra d’améliorer nos techniques de construction et de télécommunication. Cela nous remettra dans la course ». Les autorités brésiliennes ont estimé à 3,4 millions le nombre de touristes attendus au Brésil pendant les six semaines de championnat. Autant de chances pour booster l’économie du pays qui en a grand besoin.

GlobalPost/Adaptation Sabrina Alili pour JOL Press

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