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Un temps de chien pour Mitt Romney

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[image:1,l]Il y a trois semaines, la course semblait bien être « pliée ». Mitt Romney, le multimillionnaire ex-gouverneur du Massachusetts, remportait haut-la-main la primaire de Floride et empochait l’intégralité des cinquante délégués en jeu. Les sondages le plaçaient largement en tête, frôlant, à lui tout seul, la majorité absolue. Ses adversaires n’avaient plus qu’à admettre leur défaite… Depuis, l’étoile du champion des modérés a franchement pâli : d’abord, l’ultraconservateur et très catholique Rick Santorum a réédité dans le Colorado et le Minnesota son « hold-up » de l’Iowa ; ensuite, et de manière plus inquiétante, Mitt Romney ne cesse de voir s’accumuler de nouveaux obstacles sur sa route, obstacles placés par ses adversaires ou par lui-même…  Les chiens sont lâchés !

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« Dogs against Romney »

Comme tout candidat à la Maison-Blanche, Mitt Romney savait que son passé serait scrupuleusement épluché. Mais, il est une anecdote dont il n’a sans doute pas imaginé qu’elle puisse sérieusement venir le hanter. Et pourtant… Des militants pour la défense des animaux lui reprochent d’avoir maltraité son chien lors d’un voyage en voiture de 12 heures, en 1983, durant lequel Seamus – c’est le nom du toutou, un setter irlandais – aurait été transporté dans une cage attachée sur le toit de sa voiture.

L’aspirant président se défend. Il explique que cinq enfants voyageaient dans la voiture et que, dès lors, le chien aurait manqué de place, assure que sa « cage » était hermétique et tout confort… presque s’il ne rappelle la fréquence et la durée des pauses-promenades.

Trop tard… Scott Crider, un spécialiste du marketing Internet et des réseaux sociaux, fondateur en 2007 du mouvement « Dogs against Romney » – « Les chiens contre Romney » – a ressorti l’affaire et, désormais, le moindre rendez-vous canin, concours de beauté pour toutous et vieilles dames est le prétexte d’une nouvelle salve contre le maître indigne, « Mitt le tortionnaire de chiens ».

35 millions d’ennemis

Dans cet épisode, ses partisans veulent voir le signe de son pragmatisme et de son « sang-froid », tandis que ses adversaires dénoncent son manque de cœur et son insensibilité. Tout en subtilité, le Boston Globe , pro-Romney, s’est fendu d’un éditorial : « Ce que la fascination envers Seamus le chien de Mitt Romney révèle sur notre culture ». Tout est dit…

Cela serait purement anecdotique si 35 millions d’Américains ne possédaient pas de chien. Un nombre significatif : ils représentent 16% des 212 millions d’électeurs ! S’il a tenté de s’en défendre, tout en ne niant pas les faits, ses arguments ont peu convaincu les Américains.

Mitt Romney, un gaffeur à répétition

De plus en plus, Mitt Romney apparait comme incapable d’être en phase avec les électeurs, incapable de se sortir des situations difficiles.

Depuis le début des primaires, il a montré une capacité apparemment sans fin à proférer des gaffes reprises contre lui par ses adversaires. On se souvient encore de son « Je ne me soucie pas des très pauvres » du 1er février dernier sur CNN, malvenu de la part d’un homme dont le patrimoine est estimé à environ 200 millions de dollars. Ou encore, lorsqu’il avait lancé à un groupe de chômeurs, en juin dernier en Floride : « Moi aussi, je suis au chômage. En ce moment, je fais du réseautage, parce que j’ai un boulot précis en vue ». 

George W. Bush avait habitué les Américains à ses propos inconsistants, mais les bourdes de Mitt Romney le ramènent toujours à sa condition de businessman richissime. Pas idéal en temps de crise.

Face aux attaques que ses écarts provoquent, il ne semble avoir d’autre réponse que les dépenses supplémentaires de son comité de soutien pour acquérir des espaces publicitaires télévisés, en Floride en janvier, dans le Michigan et les autres Etats avant le « Super Tuesday ».

En perte de confiance

Beaucoup de responsables républicains doutent désormais ouvertement de la capacité de Mitt Romney à s’imposer comme le meilleur candidat face à Barack Obama.

Pire, il apparait déboussolé. En quelques jours, sa confiance semble s’être envolée, sa stratégie et son message avoir perdu toute cohérence. Ses tables rondes dans le Michigan sont soporifiques, loin des meetings endiablés de Floride. Il expédie ses discours comme s’il était pressé, lance des remarques incompréhensibles comme ce « Je vous aime » adressé à des hommes d’affaires ou un encore plus obscur « les arbres sont à la bonne hauteur » au Michigan.

Les stratèges républicains ont aussi été interloqués par deux récentes tribunes : dans le Detroit News, principal quotidien du berceau de Ford, il a défendu son opposition à un renflouement fédéral de l’industrie automobile ; dans le Wall Street Journal, il a critiqué la politique de Barack Obama à l’égard de la Chine en pleine visite du n°2 – et probable futur n°1 – chinois, Xi Jinping. Tout cela pour plaire aux plus conservateurs…

Déjà candidat en 2008, en campagne depuis cinq ans et demi, Mitt Romney se trouve peut-être, tout simplement, « au bout du rouleau ».

Une alternative qui peine à s’imposer

Pour la première fois, des sondages, publiés le 13 février, plaçaient Rick Santorum en tête des intentions de vote des électeurs républicains au niveau national, avec 30 % contre 28 % à Mitt Romney – le même Romney qui menait 31 % à 14 % en janvier, un mois auparavant.

Et Rick Santorum est donné vainqueur des deux prochaines primaires du mardi 28 février. Dans le seul Michigan, l’avance de Rick Santorum, qui a grimpé jusqu’à 15 points, n’est désormais que de 4 points – 37 % contre 33 % à Mitt Romney. Mais pour ce dernier qui l’avait emporté en 2008 dans cet Etat face à John McCain, une défaite cette année serait un coup dur, notamment psychologique.

Dans l’Arizona, l’avance de Santorum ne cesse de grimper. Le président du comité de soutien de Mitt Romney a été contraint de démissionner. Celui-ci, homosexuel, est accusé d’avoir menacé un ex-amant mexicain de l’extrader vers son pays d’origine s’il révélait les détails de leur relation. Pas du meilleur effet pour un candidat qui cherche à séduire l’électorat le plus conservateur…

[image:3,s] Avec l’appui de Newt Gingrich, l’avance de Rick Santorum serait considérable, mais l’ancien président de la Chambre des représentants n’entend pas se désister et vient de bénéficier d’un nouvel afflux d’argent, le nerf de la guerre. Comme si Newt Gingrich se positionnait en allié objectif de Mitt Romney.

Mercredi 22 février, depuis Mesa, dans l’Arizona, Mitt Romney et Rick Santorum débattront en direct sur CNN.

Pendant ce temps-là, Barack Obama se plait à faire circuler des photos d’un chien bienheureux, son célèbre Bo, présenté en grande pompe aux journalistes. Les amis des toutous apprécieront. 

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