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Le dragon chinois va-t-il boire la tasse ?

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[image:1,l]Lorsque la Chine a annoncé qu’elle avait enregistré un déficit commercial de 31,48 milliards de dollars en février, principalement à cause d’un bond des importations de pétrole, nombreux étaient les analystes à penser que la deuxième économie mondiale était en perte de vitesse. Certains ont vu ce déficit – le plus important depuis 1989 – comme un signe annonciateur prédisant un ralentissement rapide des exportations, qui constituent une partie importante du produit intérieur brut (PIB) chinois.

Un déficit à relativiser

Pour d’autres experts économiques, une balance commerciale négative et un ralentissement des exportations ne sont pas des éléments aussi inquiétants qu’il y paraît.

Pour commencer, un déficit commercial mensuel ne signifie pas nécessairement que la situation va se répéter. Et même si les exportations ralentissent, cela ne vise pas directement la croissance.

A ce stade de développement, l’investissement est la clef, selon l’analyste Damien Ma, de l’Eurasia Group. « La Chine peut enfin repousser le modèle d’exportation, ce qu’elle veut faire depuis longtemps. Elle ne veut pas rester l’usine du monde pour toujours. »

L’annonce faite le 10 mars a sonné comme un drame. Le déficit commercial de février représente en effet 145,96 milliards de dollars d’importation – soit un bond de 39,6 % – et 114,7 milliards de dollars d’importations.  

La Chine a enregistré un déficit mensuel à deux autres occasions depuis juillet 2005, le premier mois pour lequel l’administration a fourni les chiffres en ligne. En février 2011 et en mars 2010, les importations ont dépassé les exportations, respectivement de 7,3 et de 7,2 milliards de dollars.

Le problème avec le déficit, c’est qu’il alimente les craintes de voir le gouvernement faire marche arrière et laisser le yuan perdre de la valeur. Ce qui, dans un contexte de conflits commerciaux grandissants, augmenterait la tension avec les Etats-Unis, où un projet de loi destiné à pénaliser la Chine pour ses politiques monétaires a été adopté par le Sénat en octobre.

La Chine en période de décélération prolongée

Le Nouvel An chinois, qui paralyse le pays, peut tomber en janvier ou en février et fausser l’analyse, mais prendre les deux mois ensemble contribue à diluer l’effet. Le déficit cumulé de janvier et février atteint les 4,21 milliards de dollars alors qu’il était de 890 millions l’an dernier à la même période.

« Vous avez deux ou trois semaines pendant le Nouvel An où l’activité économique est réduite », a ajouté Damien Ma. « Les deux premiers mois du premier trimestre sont donc faussés… Dès que nous verrons [l’ensemble] du premier trimestre, nous aurons une meilleure idée. »

Franck Song, professeur et directeur de Centre pour la recherche financière de l’université de Hong Kong, a déclaré que les chiffres négatifs de février ne signalaient pas nécessairement que la Chine s’avance vers de nouveaux déficits commerciaux. Cependant, lui et d’autres ont convenu qu’une augmentation des exportations est suivie d’une période prolongée de décélération.

« Le coût de production est devenu moins compétitif »

Avec des coûts de production grandissants en Chine, les usines se déplacent vers des lieux moins chers. Le pays devrait donc moins produire et moins exporter. « Le coût de production est devenu moins compétitif », analyse Franck Song. Et cela peut sembler inquiétant, car ce sont les exportations qui ont fait de la Chine une telle puissance économique.

La valeur des exportations équivaut à un quart du PIB chinois de l’an dernier, selon les chiffres fournis par Banny Lam, économiste chez CCB International Securities. Une inspection plus poussée laisse cependant penser le contraire. L’an dernier, 35,8% du commerce extérieur était consacré à importer des produits qui étaient ensuite réexportés. Pour certains, l’excédent commercial – la valeur des exportations moins les importations – fournit des données bien plus claires.

Une population vieillissante

Et l’une des raisons pour laquelle un ralentissement des exportations n’est peut-être pas une si mauvaise chose, c’est que la population croît à un rythme plus lent.

Selon un recensement récent, la population chinoise a augmenté en moyenne de 0,57% par an de 2000 à 2010, moitié moins que pendant la décennie précédente. La proportion de personnes âgées de 14 ans et moins, la main-d’œuvre future, a chuté de 6,29% sur la même période.

Qui plus est, les travailleurs qui migraient vers les côtes ne sont pas tous de retour vers ces zones industrielles, préférant rester à la maison et « l’offre d’emploi diminue », d’après Li Hongbin, professeur d’économie à l’université de Tsinghua.

Des objectifs revus à la baisse

Pékin a déclaré vouloir réduire son objectif de croissance du PIB à 7,5% contre 8%, son objectif pour les sept dernières années. Le 12e plan quinquennal, dévoilé ce mois-ci, vise à encourager la consommation intérieure et le soutien à sept secteurs prioritaires, dont la biotechnologie et la fabrication d’équipements haut de gamme.

GlobalPost/Adaptation Antoine Le Lay pour JOL Press

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