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Une voiture chinoise made in Bulgarie

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Une étrange installation sur le parvis du Palais National de la Culture de Sofia. Une voiture, un crossover argenté, y était exposée et, dessus, on pouvait lire en grand le message suivant : « Made in Lovech – Bulgarie ».

En association avec la firme bulgare Litex, Great Wall Motors, l’un des principaux constructeurs automobiles chinois, a bâti une usine à 145km de Sofia. Ce crossover est le premier à sortir de la chaîne de montage, l’occasion de célébrer un mariage industriel étonnant.

Première incursion chinoise sur le marché automobile européen

C’est la première fois qu’une marque chinoise tente l’aventure sur le secteur européen de la construction automobile. Si Great Wall Motors réussit son pari, elle gagnera une avantage très recherché dans la conquête du marché européen.

Les fabricants d’automobiles chinois ont essayé au cours des dernières années de s’imposer en Europe alors que la crise de la dette poussait la zone euro dans la récession. Les industriels chinois y ont vu l’opportunité de commercialiser leurs voitures bon marché.

Dans le passé, d’autres sociétés chinoises ont essayé mais elles ne sont pas parvenus à remplir les normes de sécurité européennes. Great Wall Motors serait le premier fabricant à passer les tests de sécurité du NCAP (New car assessment program) d’après Bill Russo, un expert en industrie automobile chinoise et ancien cadre dans la division de l’Asie du nord-est de Chrysler.

En assemblant les voitures dans les plus pauvres pays d’Europe, Great Wall Motors s’assure une main d’œuvre disponible et bon marché, tout en évitant les taxes d’importation pour ses voitures.

Une usine chinoise au cœur d’une campagne désolée

[image:2,s]La nouvelle usine est située dans une zone industrielle en dehors du village en ruine de Bahovitsa où résident encore 1 100 habitants. Jusque-là, on n’y croisait que quelques piétons âgés suivis de leurs poulets, quelques enfants faisant du vélo ou quelques conducteurs aux volants de Lada, les vestiges automobiles de l’ère soviétique.

« Il est probable que beaucoup de personnes doutaient qu’une telle entreprise, la seule en Bulgarie, s’installerait ici » confie lliya Terziev, le responsable de Litex Motors.

Cette année, seules 2 000 voitures sortiront de l’usine mais Terziev espère en voir 50 000 quitter la chaîne de montage d’ici trois à quatre ans, quand celle-ci fonctionnera à plein régime.

Dans le cadre d’une coopération avec Litex, Great Wall Motors assemblera trois modèles en Bulgarie, en commençant par la Voleex C-10, une petite cinq portes qui sera vendue environ 8 500 euros. L’an prochain, la société commencera également à distribuer deux autres modèles : Steed, un pickup, et le crossover Hover à 17000 euros – mais toujours 4000 euros de moins que le populaire modèle japonais, le Forester de Suburu.

Une aubaine pour les diplômés bulgares

A l’intérieur de l’usine, spacieuse et aérée, des groupes de jeunes hommes s’affairent autour des voitures colorées, installant pare-brises, sièges et moteurs. 120 employés ont, pour le moment, été embauchés par la société chinoise et 2000 de plus devraient suivre si la production augmente.     

Atanas Novakov, 26 ans, récemment diplômé de l’Université technique de Sofia, a été engagé l’an dernier et a gravi les échelons jusqu’à devenir chef d’équipe. La fuite des cerveaux a été un souci pour la Bulgarie tout au long de la dernière décennie, provoquée par un manque d’emplois qualifiés pour les étudiants diplômés. « C’est une grande opportunité pour les gars comme moi, et une chance très spéciale pour la Bulgarie » témoigne le jeune chef d’équipe.

Une concurrence rude

Reste que lancer une telle initiative en pleine crise économique européenne n’est pas sans risques. Pour réussir son pari, Great Wall va devoir évincer ses concurrents grâce à une audacieuse politique de prix, affirme Russo. La Voleex C-10 sera ainsi vendue quelques milliers d’euros de moins que le modèle du même style de Toyota Yaris.  

Great Wall a également mis un terme à d’autres habitudes, tout en respectant la législation européenne. Avec un coût initial de cocneption avoisinant les millions d’euros, de nombreux constructeurs chinois ont commencé à copié les modèles des entreprises rivales. Certains produits de Great Wall ont été accusés d’imiter ceux de ses concurrents. Ce fut le cas en 2006 avec la Peri, que Fiat a accusé d’être une copie de sa Panda. Une cour italienne a ainsi interdit sa commercialisation en Italie.  

Great Wall n’exporte plus que des modèles uniques qui ont eu un certain succès en Italie, en Australie et en Ukraine. Mais le public sera encore plus réceptif quand il  y aura des emplois à la clef selon Krastev. C’est ce qui a été promis, mais «quand [ ?],  ils ne l’ont pas dit. »

Krastev conduit une camionnette Great Wall – empruntée à la société – qu’il n’achèterait sûrement pas en d’autres circonstances. La différence entre le prix du pétrole et les salaires est trop importante, en particulier pour les fonctionnaires. « Elles ne sont pas si chères, mais nous sommes en Bulgarie » conclut-il.

GlobalPost/Adaptation Antoine Le Lay pour JOL Press

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