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Antauro Humala : le frère embarrassant du président

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[image:1,l] « On ne choisit pas sa famille ». Cette maxime prend tout son sens lorsqu’il s’agit de celle du président péruvien, Ollanta Humala. Le frère du chef d’État, Antauro Humala, est réputé pour ses positions politiques radicales, ses actions de rébellions et ses démêlées avec la justice.

Accusé d’avoir tenté de renverser l’ancien président Alejandro Toledo, afin de protéger les intérêts économiques du Pérou, Autauro Humala purge actuellement une peine de 19 ans de prison. Bien que son initiative ait échouée, ce soulèvement a provoqué la mort de quatre officiers de police.

Le pays découvre alors ce personnage au discours extrêmement ancré à gauche et suit ses nombreuses frasques et dérapages, largement relayés par les médias locaux.

L’épine dans le pied d’Ollanta se transforme peu à peu en plaie béante. Le frère encombrant du président péruvien, élu démocratiquement le 28 juillet 2011 et dont le mandat s’achèvera fin 2012, pourrait lui coûter une future réélection à la fonction suprême.

Un frère embarrassant

Le nouveau scandale qui agite la presse péruvienne, concerne cette fois-ci, les conditions de détention d’Antauro. L’homme bénéficierait d’un traitement de faveur et semble conserver une réelle influence en dehors des murs de la prison.

[image:4,l]Selon des informations obtenues via le piratage du compte e-mails personnel d’Antauro, le frère du président a en sa possession un Iphone qui le relie au monde extérieur. Il utilise le téléphone portable (strictement prohibé en détention) à des fins personnelles – des échanges intimes avec sa petite amie – mais également pour les affaires, avec la Chine et les États-Unis notamment. Des passe-droits, sans grandes incidences.

Les journalistes portent en revanche des allégations plus graves à l’encontre d’Antauro Humala. Il aurait entretenu des correspondances par e-mails avec Carlos Espinoza Sanchez, le responsable de la sécurité de Yanacocha, un conglomérat dirigé par une exploitation minière de Denver, aux États-Unis. Le groupe contrôle également la plus grande mine d’Amérique Latine, située dans les Andes péruviennes.

Lors de ces échanges, Carlos Espinoza Sanchez, commandant de l’armée à la retraite, sollicite Antauro et lui demande d’influencer les promotions de postes dans les forces armées : « C’est le moment d’assurer des postes clés pour les officiers fidèles », écrit-il. Il va même jusqu’à proposer une liste de généraux pour différents postes stratégiques.

La réaction de l’entreprise minière ne se fait pas attendre, dès lors que certains éléments confirmant l’authenticité de ces messages ont été rendus publics. La firme nie toute implication, et déclare n’avoir « rien à voir avec ces mails personnels ».

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Comment Antauro Humala parvient-il à peser sur des décisions gouvernementales ou à récolter l’argent nécessaire pour payer ses correspondants, nul ne le sait précisément.

Ces accusations, qui concordent avec le récent transfert d’Antauro de sa prison de haute sécurité de Piedras Gordas, à une unité militaire fermée placée hors de la juridiction des prisons péruviennes, ont néanmoins déclenché une tornade médiatico-politique.

« Il bénéficiait déjà de nombreux avantages et même de pouvoir, à Piedras Gordas. Et cela n’est pas sur prêt de changer aujourd’hui car ils l’ont transféré dans le collège militaire où il a été formé » dénonce l’ancien président Alejendro Toledo. « J’espère seulement que Dieu éclairera le président Humala, afin qu’il prenne une décision à ce sujet ».

Une histoire de famille

Dans la famille embarrassante du président Ollanta Humala, on demande cette fois-ci le père Isaac. Ce père de famille qui ne jure que par les valeurs de l’armée pour préparer ses fils à l’exercice du pouvoir, a déclaré : « Les lois naturelles obligent Ollanta à aider son frère. Si il ne peut pas apporter la justice aux citoyens péruviens, il pourrait au moins le faire pour son propre frère. »

Par ailleurs, les journaux télévisés péruviens se délectent d’anciennes séquences montrant Antauro, renversant les chaises et les tables du tribunal de première instance, alors que les policiers regardent sans intervenir, apparemment effrayé de l’approcher. 

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Durant la campagne présidentielle de l’année dernière, Antauro n’a  cessé d’injurier son frère, et inciter les Péruviens à voter contre Ollanta. Pourtant, en voyant l’imminence des élections, Antauro a choisi de privilégier les liens de sang et de mettre en avant sa relation avec son frère.

Pour Marisol Perez Tello, députée du parti Chrétien de Centre-Droit, « Antauro est un homme qui a besoin qu’on le regarde, qu’on l’écoute, qu’on l’applaudisse, et qui utilise le fait d’être le frère du président pour obtenir cette notoriété ».

À l’origine, les frères étaient d’ailleurs assez proches, et ont mené ensemble une rébellion pendant les derniers jours de la présidence d’Albert Fujimori, en 2000. Un gouvernement perçu comme illégitime par nombre d’observateurs qui a fini par s’effondrer à la suite d’allégations de fraudes électorales.
Si Ollanta a constamment modéré son image depuis, Antauro a de plus en plus adopté des positions autoritaires et ultra-nationalistes. Il apparaît mégalomane, prétentieux et ose se comparer à Pachacutec, le dernier empereur Inca.

Pour le président Humula, éviter d’être éclaboussé par les scandales engendrés par Antauro, ne s’avère pas aisé. Il justifie sa discrétion à l’égard de son frère en expliquant que « le président de la République, en tant que chef d’État, ne devrait pas évoquer ses problèmes familiaux. Il doit se concentrer sur les questions qui concernent uniquement l’État.»

Pourtant, en ne prenant pas position sur les agissements de son frère et les privilèges dont il bénéficie, Ollanta Humala a négligé une histoire de famille, qui se transforme en véritable affaire d’État.

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