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Aung San Suu Kyi est élue députée, «une victoire du peuple»

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[image:1,l]Représentants de la presse étrangère, équipes de télévision, services de sécurité birmans… il y avait foule, ce dimanche 1er avril 2012 – et depuis le début de la campagne -, dans la circonscription rurale de Kawhmu, d’ordinaire aussi calme que poussiéreuse. C’est là, à deux heures de la capitale Rangoon, qu’avait décidé de se présenter Aung San Suu Kyi, l’icône de la résistance à la dictature militaire et du combat pour la démocratie en Birmanie, à l’occasion des élections législatives partielles.

« Voter pour la mère Suu »

Dès tôt le matin, les habitants se sont pressés en masse pour, de leur propre aveu, « voter pour la mère Suu », parce qu’ils l’aiment et parce qu’ils lui sont reconnaissants d’être venus dans leur village.

Forcée d’interrompre prématurément sa campagne en raison de problèmes de santé mineurs, elle semblait à nouveau en bonne forme alors qu’elle déambulait, vêtue d’une robe rouge dans les villages de sa circonscription.

Le scrutin s’est déroulé dans de bonnes conditions, sans débordements jusqu’à sa clôture à 16 heures heure locale.

Une « élection de maréchal » pour Aung San Suu Kyi et son parti

Sans attendre les résultats officiels, la Ligue nationale pour la démocratie (LND) a annoncé, dès dimanche soir, la victoire triomphale d’Aung San Suu Kyi avec un score qui devrait dépasser les 80%. Dans un communiqué, l’opposante et prix Nobel de la Paix a salué « la victoire du peuple » et exhorté ses troupes à s’abstenir de tout débordement : « Je voudrais demander à tous les membres de la LND d’être particulièrement attentifs, en particulier au fait que la victoire du peuple soit une victoire digne ».

Dimanche soir, la LND affirmait qu’en plus du triomphe d’Aung San Suu Kyi dans sa circonscription de Kahwmu, ses candidats étaient en tête partout ailleurs dans le pays. Des milliers de partisans ont hurlé leur joie et chanté jusque tard dans la soirée devant le siège du parti à Rangoun.

43 sièges sur 44 pour la Ligue nationale pour la démocratie (LND)

Lundi matin, le pouvoir et la commission électorale n’ont effectué aucune communication. Pourtant, la victoire de la LND semblait se confirmer.

Un total de 45 sièges étaient en jeu dans tout le pays, dont 44 brigués par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d’Aung San Suu Kyi : 37 à la chambre basse du parlement (sur un total de 440), six à la chambre haute et deux dans des chambres régionales. La LND présentait des candidats dans 44 de ces circonscriptions.

Seul un siège semblait toutefois pouvoir leur échapper. « Nous avons gagné 43 sièges sur 44, nous attendons les résultats pour le dernier, dans le Nord de l’Etat Shan », a précisé Kyi Toe, responsable communication de la LND. Un responsable du Parti national démocratique shan (SNDP), deuxième force du parlement actuel, a de son côté assuré que son candidat était « en tête » dans le Nord de ce même Etat.

Pour Aung San Suu Kyi, une première étape en attendant 2015

Considérée il y a encore deux ans comme l’ennemie publique numéro un par la junte alors au pouvoir, libérée de sa résidence surveillée en novembre 2010, Aung San Suu Kyi était très largement favorite, même si elle affrontait le verdict des urnes pour la première fois.

A l’occasion de ce scrutin – compte tenu du faible nombre de sièges en jeu -, le gouvernement, des anciens militaires réformateurs arrivés au pouvoir il y a un an, n’avait rien à craindre. Le Parti de la solidarité et du développement de l’Union (USDP), créé de toutes pièces par l’ancienne junte, avait revendiqué environ 80% des sièges en 2010. Et un quart des parlementaires sont, en vertu de la Constitution, des militaires d’active désignés en marge du processus électoral.

Cette nouvelle équipe a proposé à Aung San Suu Kyi d’intégrer l’échiquier politique officiel. Selon les analystes, le gouvernement a lui-même intérêt à voir l’opposante triompher sous le regard de la communauté internationale. Si elle a déjà rejeté l’hypothèse d’une entrée au gouvernement, Aung San Suu Kyi et la LND pourraient tenter d’influencer le nouveau régime de l’intérieur, d’ici aux législatives de 2015, qu’ils comptent remporter et après lesquelles ils espèrent être capables de former leur propre gouvernement.

La stratégie hasardeuse du gouvernement

Selon les analystes, le gouvernement a lui-même intérêt à voir l’opposante triompher sous le regard de la communauté internationale. Ces anciens militaires réformateurs, arrivés au pouvoir il y a un an, tente de prouver que ses réformes justifient la levée des sanctions occidentales qui étranglent l’économie du pays.

Symboliquement, lundi, la Birmanie a d’ailleurs lancé son nouveau système de taux de change flottant contrôlé, en établissant un taux de référence du kyat à 818 pour un dollar, a indiqué la Banque centrale sur son site internet. Ce nouveau système rapproche le taux officiel de celui du marché noir, autour de 800. C’est une étape majeure vers l’unification de taux multiples qui paralysaient son économie.

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