Site icon La Revue Internationale

La fulgurante croissance économique du Rwanda

[image:1,l]Il y a 18 ans cette semaine, vendredi 6 avril, le Rwanda plongeait dans un génocide sanglant. 100 jours, jusqu’au 4 juillet 1994, durant lesquels près de 800 000 Tutsis et Hutus ont été massacrés.

Le génocide rwandais a trouvé sa place durant une guerre civile qui a opposé le gouvernement rwandais composés de Hutu, aux Tutsis regroupés derrière la bannière du Front patriotique rwandais.

17 ans de croissance

Ces dernières 17 années, le Rwanda a réussi à redresser son économie de ses ruines pour en faire l’une des plus dynamiques et florissantes d’Afrique, enregistrant au moins 8% de croissance de son PIB depuis ces cinq dernières années.

Cela n’a pas été une tâche facile et le Rwanda a encore un long chemin à parcourir. Une majorité de Rwandais vivent toujours avec moins de 50 centimes par jour, selon de récentes statistiques de l’ONU.

Ce petit pays, d’environ 26 000 km², compte la plus grande densité de population de toute l’Afrique subsaharienne. Près de 86% des Rwandais vivent de l’agriculture traditionnelle et malgré un sol volcanique fertile et d’abondantes pluies, la production de nourriture ne suffit pas à alimenter l’ensemble de la population. Le pays est obligé d’avoir recours à l’importation.

Le Rwanda n’a pas de ressources en pétrole ou en matières premières intéressantes. Le gouvernement du président Paul Kagame a donc parié sur une croissance économique basée sur le tourisme et les services pour créer de l’emploi.

Le Rwanda, un modèle pour l’Afrique

Les efforts du Rwanda semblent désormais payer. Au moins un million de Rwandais sont sortis de la pauvreté en tout juste cinq ans, selon une enquête, réalisée sur les conditions de vie des ménages dans le pays, publiée par le gouvernement plus tôt cette année.

Expert en développement international, Paul Collier, auteur de l’ouvrage « Le milliard d’en bas », décrit la transformation rwandaise comme une croissance « très impressionnante  » qui a permis au Rwanda de largement réduire les inégalités au sein du pays.

« Cela devrait être le cas pour tous les pays d’Afrique » a-t-il déclaré lors de la parution du rapport. « Mais cela n’arrive nulle part ailleurs. »

La santé des Rwandais s’est également améliorée, comme le montrent de nombreux indicateurs. La mortalité infantile a chuté de 86‰  en 2005 à 50‰ en 2011. L’utilisation de moyens de contraceptions s’est développée, passant de 25% à 45% en trois ans seulement.

L’accès à l’éducation s’est nettement amélioré. 79% des garçons et 82% des filles sont scolarisés dans le primaire. L’accès au secondaire a également doublé entre 2006 et 2011.

La route est encore longue

 « Nous nous réjouissons des nombreux progrès dont témoignent ces chiffres  » a déclaré Paul Kagame à l’annonce des résultats de ce dernier rapport. « Nous sommes également conscients des efforts qu’ils nous restent à faire. »

Paul Kagame espère désormais permettre à la croissance de son pays de se développer sans le soutien de la communauté internationale, en invitant à l’investissement et au renforcement des infrastructures du pays. En 1995, le budget total du gouvernement provenait de l’aide internationale. En 2011, ce chiffre est tombé à 40%. Dans cette lancée, le gouvernement ambitionne de devenir de plus en plus autonome jusqu’à n’avoir plus besoin d’aide étrangère.

L’objectif du président rwandais est de faire du Rwanda un pôle de hautes technologies pour l’Afrique Centrale. Ce désir a notamment été stimulé par une décision de l’université américaine Carnegie-Mellon d’ouvrir un campus d’informatique à Kigali. L’université proposera des masters d’informatique et d’ingénierie électrique à partir du mois d’août prochain.

« De nombreuses personnes partent d’Afrique pour poursuivre leurs études. Plus de 200 000 jeunes Africains partent en Europe, en Asie et en Amérique chaque année » explique Michel Bezy, directeur adjoint l’université Carnegie-Mellon au Rwanda. « C’est une véritable fuite des cerveaux car nous estimons que 50% de ces étudiants ne reviennent jamais dans leur pays. »

Paul Kagame, tout comme l’université Carnegie-Mellon, veulent permettre aux étudiants les plus brillants de se former dans leur propre pays. Une façon de retenir les jeunes diplômés et d’aider ainsi à la construction et au maintien des infrastructures informatiques du pays.

Attirer les investisseurs étrangers

Le Rwanda a investi dans un important réseau de fibre optique en Afrique, ce qui a notamment attiré le géant mondial de la carte de paiement, Visa. Depuis décembre dernier, la société a construit un partenariat avec le gouvernement rwandais pour aider le pays à effectuer sa transition entre une économie monétaire et une économie numérique plus efficace.

« Ne vous méprenez pas : c’est une activité absolument commerciale de notre point de vue » explique Elizabeth Buse, président du groupe Visa pour l’Asie pacifique, l’Europe Centrale, le Moyen orient et l’Afrique. « Ce nouveau partenariat ne bénéficiera pas seulement aux Rwandais. Il conduira à une croissance des revenus de tout le réseau Visa. »

Elizabeth Buse ajoute également que le Rwanda est fort « d’un cadre économique extraordinaire. Il y a des opportunités pour développer des partenariats public-privé, ce qui est très inhabituel de la part du gouvernement rwandais, et il y a un fort accent donné au développement des infrastructures technologiques. »

La croissance profitera à tout le Rwanda

Les secteurs du commerce et des services représentent les deux tiers du PIB du Rwanda. Il s’est substitué à l’agriculture. Le tourisme représente désormais une grande part du secteur des services. La chaîne Marriott construit actuellement un de ses trois premiers hôtels d’Afrique subsaharienne à Kigali. Ce choix est stratégique pour Marriott qui a décidé de s’installer au Rwanda grâce à sa volonté de devenir un grand centre de services, de transports et de logistiques pour l’Afrique Centrale.

Alors que l’économie rwandaise croit et dépasse celle de ses voisins dans quasiment tous les domaines, de grandes lacunes persistent néanmoins.

La population est encore majoritairement composée de travailleurs agricoles qui vivent dans une profonde misère. Les années à venir seront décisives et permettront de voir si le Rwanda peut faire participer les ruraux les plus pauvres au boom économique de Kigali. Actuellement, de nombreux analystes s’accordent à croire que si la croissance poursuit son envolée, même les fermiers les plus démunis du Rwanda devraient bénéficier des succès du pays.

« Le Rwanda est vraiment un atout positionné pour une croissance commerciale très forte  » explique Clay Parker, directeur général de Bridge2Rwanda, une ONG concentrée sur le développement économique durable. « Leur style de management est construit à partir d’un minimum de bureaucratie et d’un maximum de protection. Les gens veulent apprendre et travailler dur. Ils veulent être innovants et ne pas être en concurrence avec l’Afrique mais avec le monde entier. »

Global Post / Adaptation Sybille de Larocque – JOL Press

Quitter la version mobile