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Mariano Rajoy dépourvu face à la crise de la dette

[image:1,]Ce n’est pas la première fois que l’on utilise les mots « Espagne » et « contagion » dans une même phrase. Au début des années 1900, la grippe espagnole s’était répandue partout dans le monde. La pandémie n’avait certes pas débuté en Espagne, cependant c’est au cœur de ce pays que la gravité de la maladie a été mesurée. Il semblait impossible d’en stopper la contagion.  

Aujourd’hui, alors que l’Espagne est aux premières loges de la crise économique européenne, l’analogie s’imposerait presque. Les économies malades de la Grèce, du Portugal et de l’Irlande répondront peut-être aux plans de sauvetage économique initiés par l’Union européenne. Toutefois, si les tentatives de l’Espagne de surmonter la crise échouent, l’Union européenne ne sera probablement pas assez forte pour empêcher la propagation de l’infection à l’Italie, la France et aux autres pays. « La grande question est de savoir si l’Europe pourra constituer un rempart de protection contre l’Espagne et empêcher la contagion » s’interroge Carsten Brzeski, économiste à Bruxelles pour la banque allemande ING.

Dans l’œil du cyclone

L’an dernier, l’Espagne s’est retrouvée dans l’œil du cyclone. Après l’arrivée du Premier ministre conservateur Mariano Rajoy au pouvoir, en décembre 2011, promettant de redresser l’économie, la situation s’était améliorée. Le pays a aussi profité du trillion d’euros versé par la Banque Européenne.    

En mars 2012, la manne financière de la banque européenne a considérablement diminué. Mariano Rajoy a annoncé qu’il ne parviendrait pas à réduire le déficit à 4,4 %, malgré des coupes budgétaires s’élevant à 27 milliards d’euros. « L’Espagne souffre à nouveau d’un manque de confiance en elle » analyse l’économiste Luis Garicano. Les intérêts que doit payer l’Espagne sur l’argent emprunté peuvent en effrayer plus d’un. Mardi 17 mars, le pays a réussi à emprunter 3,2 milliards d’euros. Un soulagement. Mais le prêt est à court terme et le taux d’intérêt atteint des sommets. L’Espagne risque de devoir à nouveau compter sur l’Union Européenne et le FMI pour la renflouer. Or, selon l’entreprise de consulting CMA, le risque d’un défaut de paiement de l’Espagne est de 37%.

À l’origine, l’éclatement de la bulle immobilière espagnole

D’un point de vue européen, le déficit public de l’Espagne n’est pas si terrible que ça. Il ne représente que 66 % du PIB, soit moins que celui de l’Allemagne et beaucoup moins que celui de la Grèce (150%) ou de l’Italie (119%). Le problème de l’Espagne ne se situe donc pas à ce niveau. Au début des années 2000, un éclatement de la bulle immobilière a plongé les familles et les banques dans la crise. La dette brute des ménages a atteint en moyenne 80 % des revenus en 2007. Elle s’élève aujourd’hui de 126%. En Espagne, le chômage est le plus important de toute la zone euro. Il touche presque un quart de la masse salariale et la moitié des moins de 25 ans. Entre temps, les puissants gouvernements régionaux refusent de se plier aux restrictions décidées par Mariano Rajoy.   

Une crise, deux possibilités

« Nous devrions nous inquiéter » estime Carsten Brzeski. « Cela ne veut pas dire qu’ils vont avoir besoin d’un sauvetage imminent, mais à un moment précis, ils auront nécessairement besoin d’une aide européenne : le marché immobilier continue à s’écrouler, le déficit est haut… ». Basé sur le renflouement de l’Irlande et du Portugal, le plan de sauvetage de l’Espagne pourrait coûter à l’UE, 300 milliards d’euros sur trois ans. Cela pourrait être couvert par le pare-feu de 800 milliards d’euros que l’UE espère mettre en place, l’été prochain, mais si l’Italie venait à connaître les mêmes difficultés, le budget viendrait à manquer pour fournir l’aide. La seconde option consisterait à soutenir l’Espagne dans la lourde tâche de recapitaliser ses banques. Cependant, aucune des deux solutions ne résoudra ce qui semble être le problème fondamental de l’Espagne : redresser l’économie pour favoriser l’embauche à nouveau. 

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