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Al-Megrahi, seul coupable de l’attentat de Lockerbie?

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[image:1,f]Retour sur les faits : le 21 décembre 1988, le vol 103 de la Pan Am décolle de l’Aéroport de Londres Heathrow en direction de New York. Après seulement une demi-heure de vol, l’avion explose au-dessus de la ville de Lockerbie : 259 passagers perdent la vie, et les débris emportent la vie de onze villageois. Après le choc, le constat : la présence de vêtements dans un des réacteurs de l’avion écarte la piste de l’accident : c’est un attentat terroriste.

La pression de l’ONU

L’enquête mène à un magasin de vêtements à Malte, où le vendeur identifie formellement Abdelbaset Al-Megrahi. En novembre 1991, il est inculpé par le procureur général des États-Unis et le Lord Avocat écossais. Mais la Libye refuse son extradition et ce pendant près de 10 ans, pendant lesquels l’ONU fait tout pour la faire plier : suspension du trafic aérien vers et à partir de la Libye, interdiction de vente d’armes au pays, avoirs libyens gelés, interdiction d’importation de matériaux destinés à l’industrie pétrolière et gazière, etc. La Libye obtempère en 1999 et livre Abdelbaset Al-Megrahi.

Mais qui est Abdelbaset Al-Megrahi ?

Né le 1er avril 1952 à Tripoli, marié et père de cinq enfants, Abdelbaset Al-Megrahi a étudié aux États-Unis, dont il maîtrise parfaitement la langue. Il se revendique directeur du Centre des études stratégiques de Tripoli et clame son innocence quant aux faits qui lui sont reprochés.<!–jolstore–>

Ses accusateurs soutiennent, eux, que ce poste ne sert qu’à couvrir ses activités au sein des services secrets libyens. Sa place de chef de la sécurité des lignes aériennes libyennes lui aurait par ailleurs permis d’acheter des minuteurs électroniques MST-13, éléments déclencheurs de la bombe lors de l’attentat de Lockerbie.

Condamné à la réclusion à perpétuité

Le 31 janvier 2001, Abdelbaset Al-Megrahi est condamné à la réclusion à perpétuité par la justice écossaise et sa demande d’appel est refusée l’année suivante. En 2003, la Libye reconnaît officiellement son implication dans l’attentat et verse 2,1 milliards d’euros aux familles des victimes. La même année, Abdelbaset Al-Megrahi comparaît à la Haute Cour de Glasgow suite à l’incorporation dans le droit écossais de la Convention européenne des droits de l’Homme en 2001 : il est condamné à une peine d’au moins 27 ans de prison avant qu’une libération conditionnelle ne soit envisageable.

La maladie change la donne

Pourtant, son état de santé change la donne en 2008 : les médecins lui diagnostiquent un cancer de la prostate en phase terminale. Il est remis en liberté en août 2009 pour raisons humanitaires, et rentre dans son pays, auprès de sa famille. Abdelbaset Al-Megrahi, qui n’aurait plus que trois mois à vivre, continue de clamer son innocence, mais souhaite finir ses jours en paix.

L’indignation de la communauté internationale

En Libye, un accueil triomphal lui est accordé, ce qui gêne beaucoup à l’étranger. Pour le président américain Barack Obama, directement concerné par cette affaire, compte tenu du fait que 189 victimes étaient des ressortissants américains, cette décision est « surprenante, décevante et contrariante ». Le Premier ministre David Cameron ne mâche alors pas non plus ses mots : « C’est une mauvaise décision qui n’aurait pas dû être prise ».

Bouc-émissaire ou agent de Kadhafi ?

Qu’en est-il vraiment de cet homme qui s’est mis à dos, entre autres, le président des États-Unis et le Premier ministre britannique ? Beaucoup assurent qu’il n’est qu’un bouc-émissaire. Certains estiment que son gouvernement l’a trahi, avec à sa tête Mouammar Kadhafi, comme l’ancien ministre libyen de la Justice Mustafa Abdel-Jalil qui déclare, le 23 février 2011, au quotidien suédois Expressen : « Mouammar Kadhafi a donné personnellement ses instructions au Libyen Abdelbaset Al-Megrahi ». D’autres considèrent que ce sont les enquêteurs qui ont voulu trouver un coupable à tout prix : le témoin à charge aurait été payé, les pièces à convictions fabriquées.

Abdelbaset Al-Megrahi n’est plus, mais tant de questions demeurent. Cet homme érudit aurait tout autant pu être l’auteur de l’attentat comme une marionnette de l’autorité dont il dépendait. Une chose est sure, son nom restera associé à un des attentats les plus meurtriers du XXème siècle.

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