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L’Afrique du Sud rongée par la corruption de la police

[image:1,f]À Johannesburg, la lutte contre le crime a une nouvelle cible : la police.

Une arrestation massive

Plus de 630 policiers ont été arrêtés dans la province sud-africaine de Gauteng en 2011, principalement pour fraudes et corruption mais aussi pour viols et meurtres, comme révèlent les dernières statistiques.

« C’est une bonne nouvelle » affirme le lieutenant-général Mzwandile Petros, commissaire de police de Gauteng, la province où sont situées les villes de Johannesburg et de Pretoria« S’il y a bien une chose dont les gens sont fatigués, c’est bien de la corruption de la police », a-t-il dit aux journalistes. Mzwandile Petros cherchait sûrement à rassurer les citoyens sud-africains, mais ce commentaire n’a fait que mettre en évidence l’ampleur du problème.

Un problème qui ne fait que s’accroître

La colère du pays gronde chaque jour un peu plus face à une police aussi corrompue qu’incompétente, aussi bien à l’échelle des agents de la circulation, qui demandent des pots-de-vin aux automobilistes, ou à celle des responsables les plus hauts placés qui honorent des rendez-vous plus que douteux.

Le chef de la police nationale, Bheki Cele, a été suspendu l’année dernière car soupçonné de transactions immobilières « illégales ». Son prédécesseur, Jackie Selebi, purge une peine de 15 ans de prison pour corruption.

De lourdes accusations

Richard Mdluli, à la tête des services de renseignement, est aujourd’hui confronté à ce que l’Institut d’Études de Sécurité basé à Pretroria appelle « une liste effarante d’accusations ». Lui et ses collègues seraient impliqués dans des affaires de meurtres, viols, trafic d’influence, détournement de fonds, et auraient accordé de nombreux passe-droits et faveurs aux membres de leurs familles, leur offrant des postes à responsabilité.

En guise de sanction : une simple une mutation, qui n’est d’ailleurs pas attribuée à ses actions, mais à un complot qui aurait été monté contre lui par d’autres membres de la police.

Une mauvaise image à l’international

« Ce problème commence à nuire à l’Afrique du Sud au niveau international » s’inquiète David Lewis, directeur général de Corruption Watch, une association à but non lucratif lancée cette année par le syndicat majoritaire, Cosatu.

« Les gens s’indignent de plus en plus de cette situation, et ont le sentiment que la corruption ne fait qu’empirer. C’est un problème qui est présent partout, au-delà des races, des classes, et des revenus. »

Un automobiliste johannesbourgeois sur quatre a été victime de la corruption policière en 2010, selon les statistiques du gouvernement. Et 50% des forces de police de la capitale auraient été impliquées, selon un rapport publié par Corruption Watch. Ces incidents ne donnent jamais suite. Et les efforts pour combattre le problème ne sont pas non plus suivis.

Une unité anti-corruption pas assez indépendante

Un comité parlementaire réfléchit actuellement à un projet de loi visant à créer une unité anti-corruption, au regard du jugement qui avait déclaré que le corps actuel n’était pas suffisamment indépendant du gouvernement.

Mais les groupes de société civile redoutent la création de cette unité qui serait toujours sous la coupe de police, et non totalement indépendante.

Un vrai risque pour le pays

« Les entreprises nationales et les investissement étrangers souffriront tous deux si l’Afrique du Sud ne parvient pas à avoir une vraie agence indépendante, chargée de lutter contre la corruption », affirme Chandre Gould, spécialiste du crime et de la justice à l’Institut d’Études de Sécurité.

Elle met en avant l’Indice de perception de la corruption qui plaçait l’Afrique du Sud, 54ème sur 182 pays en 2010, et qui la place maintenant 64ème (étude Transparency International). Chandre Gould fait, par ailleurs, remarquer que le gouvernement n’est pas le seul responsable : des entreprises privées et des hommes d’affaires sont également à l’origine de la corruption sud-africaine.

Une police également trop violente

Pour ne pas arranger les choses, la police est également accusée de recourir à la violence, notamment lors d’interpellations ou interrogatoires où les appréhendés sont torturés.

Huit policiers sont en procès pour le meurtre d’Andries Tatane, un enseignant battu à mort alors qu’il manifestait l’année dernière près de Ficksburg. Le mois dernier, une vidéo filmée avec un portable a pris en flagrant délit quatre policiers en train de tabasser un vendeur de journaux, causant un soulèvement public. Un rapport de police, également accablant pour les services d’ordres, explicite que des milliers de policiers ne sont pas qualifiés pour utiliser leur arme de service.

Des arrestations sans fin

Un jour seulement après l’annonce des 600 policiers arrêtés, trois de plus le furent pour corruption, agression, et fraude. Une histoire dérangeante, mais typique : ils sont accusés d’avoir interpellé un homme qui urinait sur la voie publique, puis de l’avoir tabassé, jeté en prison et lui avoir extorqué son argent. « Quelle honte de la part de ces policiers », déclara Zweli Mnisi, porte-parole du chef de police, Nathi Mthethwa, selon le journal sud-africain The Sowetan. « Il faut continuer de travailler sans relâche pour arrêter les criminels, y compris les policiers. Rien n’est plus consternant que de voir que ceux qui doivent maintenir l’ordre, qui sont en définitive responsables de nombreuses atrocités. »

Global Post / Adaptation Amélie Garcia – JOL Press

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