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Mort de Ben Laden: le récit de son incroyable traque

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[image:1,l]La traque d’Oussama Ben Laden a connu de bien nombreux rebondissements. Chaque réponse apportait de nouvelles questions, et les découvertes se succédaient, toutes plus surprenantes les unes que les autres. Mais qu’est-ce qui a fait de cette chasse à l’homme, non pas une « simple » affaire politique, mais un évènement « incroyable » et « extraordinaire » ?

Le fait que la Maison Blanche ait gardé un tel secret pendant cinq mois ? Un secret si bien gardé qu’il n’a pas été dévoilé par les médias avant son accomplissement ?

Le fait qu’un président ait pris tant de temps pour s’assurer qu’il avait la bonne cible dans sa ligne de mire et qu’il ait eu la patience de viser avant d’appuyer sur la gâchette ?

Le fait que cette décision ait été prise à de tels niveaux de confidentialité que la majorité des membres du Conseil de sécurité nationale ignorait tout de l’opération 24 heures avant son déroulement ?

Le fait que l’homme le plus recherché du monde se cachait à la vue de tous à Abbottabad, à seulement 50 kilomètres de la capitale du Pakistan et à 700 mètres de la meilleure école militaire du Pakistan ? Ou serait-ce encore, le fait que le général Ashfaq Parvez Kayani, à la tête des forces armées du Pakistan, ainsi que les services de renseignement aient ignoré la présence du terroriste à cet endroit ?

Les citoyens veulent en savoir plus sur leur gouvernement

En tant que spécialiste en la matière, je trouve cette affaire tout à fait « incroyable ». J’ai passé plus de 100 heures à interviewer des responsables à la Maison Blanche, au Pentagone, ainsi qu’à la CIA pour déterminer ce qui avait décidé le président Barack Obama à lancer l’assaut, et je me suis exprimé sur ce sujet dans le Times, à l’occasion de l’anniversaire de la mort d’Oussama Ben Laden.

Pour les spécialistes, cette décision radicale adoptée par le chef d’État américain donnera lieu à de nombreuses études et à de grands débats. Pour le grand public, les citoyens américains, c’est l’occasion d’en savoir un peu plus sur leur gouvernement.

Les cinq clés du succès

Il y a essentiellement cinq points à retenir :

> Rendre « l’impossible possible » 

Le gouvernement américain a fait son travail. Il a réussi une tâche de la plus haute difficulté, et ce, dans les règles de l’art : les citoyens peuvent en être fiers. Le président Obama, avec l’aide de ses conseillers, est celui qui prend toutes les décisions clé, mais en amont, c’est une équipe composée de milliers de personnes qui a rendu « l’impossible possible », comme l’Amérique sait si bien le faire. En un peu plus de dix ans, ce sont eux qui ont inventé les méthodes les plus sophistiquées pour avoir yeux et oreilles partout, pour suivre toutes les pistes et faire les rapprochements nécessaires, pour créer des drones et des hélicoptères toujours plus performants, pour devenir, somme toute, des têtes chercheuses de haut niveau.

> Des moyens uniques

L’intégration des nouvelles technologies ainsi que l’aide de professionnels en la matière (qui ont passé des milliers d’heures à s’entraîner lors d’opérations nocturnes en Irak et en Afghanistan) ont permis à Barack Obama de disposer d’options que ses prédécesseurs n’avaient jamais eues. Si de telles conditions s’étaient présentées à Bill Clinton après le bombardement de l’ambassade américaine en Afrique, ou à George Bush lors de l’encerclement de Ben Laden à Tora Bora, le terroriste aurait sûrement été abattu.

> Du calme et de la discrétion

Le secret est primordial. Cette affaire démontre qu’il est nécessaire, pour réussir, de percer des secrets, de laisser le temps à un président d’y réfléchir dans le calme, l’aidant ainsi à aboutir à une décision et à agir en conséquence, sans subir la pression des médias. Le président a besoin d’intimité dans ces moments où il doit prendre des décisions importantes pour le pays.

> Anticiper toutes les conséquences

Cette affaire nous montre aussi qu’à force de vouloir garder le secret dans un cercle très restreint, dans l’espoir d’éviter toute fuite, certains points de vue risquent d’être occultés. Dans ce cas précis, les conséquences d’une telle opération sur nos relations avec le Pakistan n’ont pas été mesurées à leur juste valeur, au point de compromettre aujourd’hui une fin paisible à notre intervention en Afghanistan.

> Craindre que le Pakistan échappe au contrôle des services de renseignement

Mais ce qu’il faut vraiment se demander au regard de tout cela, c’est si nous avons bien raison de continuer à penser que quelqu’un maîtrise vraiment la situation au Pakistan. Il est difficile à croire qu’aucun responsable pakistanais ne savait où se cachait Oussama Ben Laden, pourtant aucune preuve impliquant une quelconque complicité locale n’a été retrouvée à Abbottabad. Si une nation ignore la présence du terroriste sur son territoire pendant neuf ans, alors qu’il a déménagé cinq fois avec ses trois femmes, et qu’il a mis au monde quatre enfants (dont deux dans des hôpitaux publics), peut-on vraiment penser qu’une telle nation soit maîtresse de ses 100 bombes nucléaires ?

Une victoire mais pas la guerre

Il est normal de féliciter le gouvernement américain pour son immense succès dans cette affaire incroyable, mais il faut tout de même prendre conscience que nous serons certainement confrontés à des épreuves encore plus difficiles dans les années à venir.

Global Post / Adaptation Amélie Garcia – JOL Press

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