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Quel Premier ministre pour le Président Hollande?

[image:1,f]Rumeurs, rumeurs, tout n’est que rumeurs… François Hollande a-t-il choisi son premier ministre. En a-t-il déjà informé l’heureux élu – ou heureuse élue – appelé à exercer ce qui est, de l’avis général, la difficile fonction de la République ? Nul ne le sait. Rien n’est officiel.

Cette décision relève de la pleine et entière autorité du Président de la République mais elle est pour celui-ci un outil politique. Les différentes stratégies possibles permettent d’identifier une « short list » des favoris pour Matignon.  Revue de troupes.

Un sondage Ipsos/Logica Business Consulting, rendu public dimanche soir, place la maire de Lille et le maire d’Evry en tête des préférences des Français avec 26% chacun. Pour autant, difficile de les considérer tous les deux sur le même plan. Différence de carrure. Et puis, ces deux-là ne sont pas les seuls à pouvoir rêver…

Martine Aubry, une cohabitation difficile à la tête de l’Etat

Martine Aubry n’a pas la réputation de toujours être une très bonne camarade. De plus, elle a une très forte idée d’elle-même et de son action. Ainsi, souvent, a-t-elle raillé celui qui n’avait jamais été ministre et qui n’était « que » premier secrétaire du parti socialiste quand elle était n°2 du gouvernement Jospin.

Les circonstances de son élection à la tête du PS ont laissé un goût amer à son prédécesseur, François Hollande, soutien actif de Bertrand Delanoë. Mais, certes, elle a indéniablement remis en ordre de marche le PS et puis, malgré ses critiques acerbes, ses attaques vives durant la campagne des primaires citoyennes à l’automne 2011, elle a soutenu le candidat Hollande avec une certaine loyauté.

Martine Aubry a quasiment fait acte de candidature en indiquant qu’elle ne souhaitait pas rester rue de Solférino.

Ses points forts : sa pugnacité et son expérience, son positionnement plus à gauche et plus social que le président élu. Sa bonne connaissance des rouages européens – où elle a pu aussi profiter des réseaux de son père, Jacques Delors.

Ses points faibles : le peu d’atomes crochus avec François Hollande et pourtant ils se connaissent si bien. Après tout, le père de Martine Aubry n’a-t-il pas été le « mentor », le véritable « père en politique » de François Hollande. C’est de là que remonte leur inimitié.

Martine Aubry rêverait aussi d’un grand Ministère de la Culture.

 

Jean-Marc Ayrault, le fidèle lieutenant depuis 15 ans

Président du groupe socialiste depuis juin 1997, le maire de Nantes – 62 ans – travaille main dans la main depuis quinze ans avec François Hollande. Leur proximité est évidente quand on les observe, assis côte à côte dans l’hémicycle du Palais-Bourbon durant les questions au gouvernement.

Les atouts de Jean-Marc Ayrault sont légions. Il n’a jamais été ministre mais il connait mieux que quiconque les rouages du travail parlementaire. Face à une opposition de droite et une gauche de la gauche que l’on imagine combattives, voilà qui constituerait un atout considérable. Sa connaissance des députés socialistes lui assurait aussi leur loyauté. C’est un fin politique.

Archétype de ces grands élus locaux socialistes, il serait aussi en mesure de mobiliser tout le réseau des collectivités territoriales indispensables à la reprise de l’économie française.

Par ailleurs, professeur d’allemand, bon connaisseur de l’Allemagne, il pourrait jouer un rôle important dans les futures relations entre François Hollande et Angela Merkel.

Manuel Valls veut y croire

A l’inverse, le maire d’Evry est le candidat de la droite. Nicolas Sarkozy avait bien tenté de le débaucher dans le cadre de son ouverture mais il avait tenu bon. Son résultat au primaire lui a permis de gagner en notoriété et de préempter la droite du parti socialiste.

Au cours de la campagne, en charge de la communication, il se serait rendu indispensable au candidat, prenant en charge toute une partie de l’intendance des meetings et le protégeant dans ses relations avec la presse.

Pour autant, sa nomination ne passerait sans doute pas dans les rangs socialistes – notamment à la gauche du parti et du côté du Front de Gauche, à la gauche de la gauche. L’hypothèse Valls serait prématurée, elle peut se révéler opportune, dans certaines circonstances, au cours du quinquennat.

Manuel  Valls y croit et fait en sorte qu’on y croit. Les Anglo-saxons qui l’avaient découvert au cours de la campagne avaient été séduits par son discours social-libéral.

Michel Sapin, l’ami de plus de 30 ans

Ils étaient à l’ENA ensemble, François Hollande et Michel Sapin. Ensemble, ils ont aussi fait leur service militaire, à Coëtquidan. Ils sont très proches, de véritables amis intimes. Fidèle des bons et mauvais jours, il s’impose dans cette short-list.

Ses atouts : son expérience – il a tout de même été le ministre de l’économie de Pierre Bérégovoy dans le dernier gouvernement socialiste du second septennat de François Mitterrand.  

Sa fidélité au président. Si ce n’est pas Matignon, ce sera sans doute Bercy ou un autre grand ministère technique.

Pierre Moscovici, un collègue de 20 ans

Discret directeur de campagne, Pierre Moscovici n’est pas le favori mais, lui aussi, constitue une hypothèse non négligeable. Ancien proche de Dominique Strauss-Kahn, cet énarque a été l’un des jeunes loups socialistes du gouvernement Jospin dont il était ministre des affaires européennes. Au fil des années, brillant mais accusé parfois d’être arrogant, il ne s’est pas fait que des amis au parti socialiste.

Ses atouts : sa connaissance de la politique étrangère et de l’économie. Economie, c’est d’ailleurs la matière qu’en tandem avec François Hollande il enseignait aux étudiants de 3ème année de Sciences-Po au début des années 90.  

Laurent Fabius, l’expérience, la tête et les jambes

Plus jeune Premier ministre de l’histoire de la République, nommé à 36 ans par François Mitterrand en 1984, il a l’avantage de connaitre le poste. Il est probablement le plus expérimenté pour le poste, même si cette expérience remonte déjà à 26 ans.

 Cette qualité n’en fait pas le favori, compte tenu de ses relations notoirement mauvaises avec François Hollande. Les dernières fortes secousses remontent au référendum sur la constitution européenne, en 2005, lorsque François Hollande était patron du PS et Laurent Fabius partisan du « non ».

Pourtant, Laurent Fabius, après avoir renoncé à se présenter à la primaire citoyenne, a travaillé activement sur les premiers cent jours du président. Ses chances sont plus fortes pour le Quai d’Orsay que pour Matignon.

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