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Tomislav Nikolic, un populiste pour affronter la crise

[image:1,l]La Serbie, acculée par la crise, s’est trouvée un sauveur, dimanche 20 mai, en la personne de Tomislav Nikolic.

Le vote sécuritaire a tranché

Après plusieurs échecs lors des précédentes élections présidentielles, ce nationaliste populiste prend désormais les rênes d’un pays aux portes de l’Union Européenne et emporté dans le tourbillon de la crise mondiale. En course contre le président sortant, Boris TadicTomislav Nikolic a remporté le scrutin avec 49,4% des voix contre 47,4% pour le candidat du Parti démocrate.

Une victoire pas si surprenante… Depuis plusieurs semaines, le candidat populiste, longtemps mis au ban de la société pour ses positions anti-européennes et nationaliste a réussi à gagner du terrain sur le parti gouvernemental grâce à son discours rassurant face à la crise qui touche la société serbe de plein fouet avec un taux de chômage à 24%.

« En temps de crise, les gens optent avant tout pour la sécurité et la stabilité » a déclaré le nouveau président après sa victoire.

Ascension politique chez les radicaux

Cet ancien allié du président Slobodan Milosevic a réussi à franchir les paliers et trouver sa place dans la vie politique serbe, en un peu plus de vingt ans.

Né le 15 février 1952, Tomislav Nikolic a démarré sa carrière dans une entreprise de construction en 1971. Ce n’est qu’en 1990 qu’il adhère au Parti radical populaire, juste avant que celui-ci ne s’unisse au Mouvement Tchetnik et devienne ainsi le Parti radical serbe avant de se transformer en Parti serbe du Progrès en 2008. Il adhère à cette nouvelle formation le 23 janvier 1991, année à partir de laquelle il devient député à l’Assemblée serbe.

À côté de ses fonctions parlementaires, Tomislav Nikolic est élu par le Congrès de son parti pour être vice-président de la formation, poste pour lequel il sera réélu trois fois.

En mars 1998, le Parti radical serbe forme une alliance avec le Parti socialisteTomislav Nikolic devient ainsi vice-président du gouvernement. Un peu plus d’un an plus tard, il devient également vice-président du gouvernement fédéral de la République de Yougoslavie jusqu’en 2000.

Changement de programme sur le dossier européen

Les ambitions de Tomislav Nikolic le poussent à se présenter devant le peuple serbe à l’occasion de l’élection présidentielle. En 2004 comme en 2008, il est battu par son principal opposant, Boris Tadic du Parti démocrate, parti pro-européen.

L’année 2012 couronne de succès les efforts d’un nationaliste qui a tout fait pour adapter son discours à l’électorat serbe et sanctionne un président sortant qui n’a pas su apporter de réponse à la crise.

Si Tomislav Nikolic a longtemps représenté le refus de l’entrée de la Serbie en Europe, son discours a pris une tournure très différente depuis plusieurs mois. Décidé à laisser se poursuivre le processus pour que la Serbie, officiellement candidate depuis mars dernier, achève son entrée dans l’Union Européenne, le candidat n’a pas échappé aux railleries de ces détracteurs pendant sa campagne.

« La Serbie n’a pas d’avenir dans l’Union Européenne. » Cette phrase, répétée à de nombreuses reprises parmi tant d’autres discours anti-européens, n’ont pourtant pas permis à l’opposition au nouveau président de décrocher la victoire.

Aujourd’hui, Tomislav Nikolic l’affirme, la Serbie entrera dans l’Union Européenne. « La Serbie maintiendra sa voie européenne […] Le scrutin n’a pas porté sur qui conduira la Serbie vers l’Union Européenne mais sur qui résoudra les problèmes économiques crées par le Parti démocratique. »

La ligne rouge du Kosovo

Pourtant, avant le deuxième tour, Tomislav Nikolic avait choisi la dangereuse option de s’allier avec un parti fortement hostile à l’Union Européenne. Un choix à double tranchant qui n’a pas empêché son électorat de lui faire confiance, plus soucieux de son quotidien en crise que d’une éventuelle intégration à la communauté européenne, bien lointaine.

Une intégration qui pourrait être mise en péril si les positions du président Tomislav Nikolic ne changent pas sur le délicat sujet du Kosovo.

Si Boris Tadic avait réussi à convaincre l’Union Européenne de faire confiance à la Serbie, en livrant au Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (TPIY) les anciens chefs politiques et militaires serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, poursuivis par un mandat d’arrêt international pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, condition de son entrée dans l’Union européenne, Tomislav Nikolic pourrait mettre en péril le crédit accordé au pays par l’UE.

Le président serbe désormais au pouvoir refuse de reconnaître l’indépendance du Kosovo, proclamée en 2008 par la majorité albanaise du territoire. Une position confirmée par ses récentes déclarations, à l’annonce des résultats. La Serbie « protègera ses citoyens au Kosovo ». Le dossier Kosovo est donc une ligne rouge à ne pas franchir pour le nouveau président serbe, qui place ainsi son pays dans une position difficile face à la communauté internationale.

L’Europe attend désormais des signes de souplesse de la part du dirigeant serbe qui est maintenant occupé à construire son gouvernement à partir de sa majorité parlementaire (73 députés sur 250).

Viendra ensuite le temps des choix pour ce président du peuple, l’heure pour sortir 7,5 millions d’habitants de la crise et pour entamer les négociations d’entrée dans l’Union Européenne. Les cinq prochaines années de Tomislav Nikolic s’annoncent longues et douloureuses.

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