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Dow Chemical, le gênant sponsor des J.O. 2012

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Des Jeux pas si Verts…

Les organisateurs des Jeux Olympiques de Londres 2012 leur ont donné le nom de « Jeux Verts », défendant une pratique durable du sport et plaçant ainsi l’enjeu environnemental au cœur de la célébration sportive. Le gouvernement vietnamien trouve la situation tristement ironique : en effet le principal sponsor de ces JO dits verts s’appelle Down Chemical. Le géant amércain de ditsribution de produits chimiques a favorisé la diffusion de produits qui ont provoqué des ravages parmi la population vietnamienne : des centaines de milliers d’enfants naissent avec le palais fendu, des handicaps mentaux, des hernies, un cancer du poumon, du larynx ou de la prostate, des côtes manquantes ou encore des doigts de pieds et de mains supplémentaires.

Le Vietnam s’ajoute ainsi à la longue liste des pays qui protestent contre les sponsors des Jeux accusés de « greenwashing », phénomène qui consiste à minimiser son propre impact écologique, ou à nier certains dégâts environnementaux, par souci de légitimité. Dans une lettre obtenu par notre correspondant GlobalPost, le Ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme a fortement dénoncé le Comité International Olympique (CIO), basé à Lausanne, pour avoir été complice du « verdissement » de Dow Chemical, sponsor majeur de l’événement.

Dow Chemical et la Guerre du Vietnam

Dow Chemical a produit environ le tiers des 80 millions de litres de défoliants d’Agent Orange pulvérisés en Vietnam du Sud, pendant ce que les Vietnamiens appellent La Guerre Américaine. Les Brigades Rouges du Vietnam estiment à 3 millions, le nombre de Vietnamiens qui auraient été touchés par Agent Orange, dont au moins 300 000 enfants nés avec des malformations.

Les estimations du Ministère des Affaires Étrangères vietnamien sont bien plus grandes. Ce dernier dénombre 4,8 millions de gens touchés, dont 400 000 sont morts ou blessés et environ 500 000 malformés de naissance, la plupart desquels continue de naître encore aujourd’hui, c’est-à-dire quatre générations plus tard.

« Agent Orange… a détruit l’environnement, a volé la vie de millions de Vietnamiens et a laissé un impact ravageur sur des millions d’autres, qui souffrent actuellement de maladies incurables. Des centaines de milliers d’enfants de la quatrième génération sont nés avec des déformations congénitales graves,»a écrit Hoang Tuan Anh, ministre de la Culture, des Sports et du Tourisme, dans une lettre adressée au CIO.

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Un comportement irresponsable protégé par les États-Unis

«Dow Chemical a exprimé de l’indifférence et a refusé de verser une compensation aux victimes d’Agent Orange et d’assainir les endroits contaminés. Dow  Chemical continue en outre à détruire l’environnement. En 2010, l’Agence de Protection Environnementale américaine a classé Dow Chemical second pire pollueur du monde,» le ministre affirme dans la lettre.

Le Vietnam n’a pas réussi à conduire Dow Chemical et d’autres producteurs d’Agent Orange en justice devant les tribunaux américains. Mais certains activistes disent que l’État communiste, qui estime à 2 millions le nombre de civils tués durant la guerre, est légalement impuissant. Les producteurs d’Agent Orange tiennent le gouvernement américain pour responsable de son usage, alors que l’immunité souveraine protège Washington d’une poursuite judiciaire.

Les résolutions de l’ONU introduites à partir de 1966 condamnant les États-Unis pour violation du Protocole de Genève sur l’utilisation d’armes chimiques et biologiques n’ont été suivies d’aucune punition. Une cour à Manhattan a énoncé que, bien que les herbicides contiennent un poison connu, ce dernier ne visait pas les humains. Le jugement affirma que, comme il n’y avait aucune intention d’empoisonner des humains, les herbicides n’avaient pas le statut d’arme chimique, et donc leur utilisation ne constituait pas une violation de la loi internationale.

Une responsabilité partagée avec le gouvernement américain

Les hélicoptères et avions américains ont aspergé de défoliants environ 20% du Vietnam du Sud sur plus de 10 ans. Le but était de raser la jungle du Vietnam du Nord et de limiter l’accès à l’approvisionnement alimentaire. Un but moins souvent invoqué était celui de rattacher la population rurale, potentiellement sympathisante avec Hanoï, aux villes du Sud contrôlées par les États-Unis.

Des millions d’aires de culture ont été détruites, un geste qui a accablé Saïgon de millions de pauvres migrants ruraux, et a créé de graves crises sanitaires, alimentaires et de santé dans la ville.

Le problème éthique que pose la participation de Dow Chemical aux J.O.

« C’est ironique que Dow soit autorisé à sponsoriser des événements sportifs dont certains sont para-olympiques, alors que l’entreprise est à l’origine de générations d’enfants gravement malformés, tout en refusant de faire quoi que ce soit pour les aider » a écrit un représentant de l’Association vietnamienne pour les Victimes d’Agent Orange/Dioxin dans un mail. « Permettre une telle entreprise de sponsoriser les J.O. et les Jeux Para-olympiques – un événement culturel d’ampleur mondiale, est une insulte à la conscience humaine »

Dow Chemical, le CIO et le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques et Para-olympiques de Londres ont ignoré les nombreuses demandes de justification.

Le business avant tout

Dow Chemical a négocié un contrat de 10 ans avec le CIO en 2010. L’accord engage l’entreprise basée aux États-Unis à verser 100 millions de dollars tous les quatre ans en tant que sponsor principale des Jeux Para-olympiques d’Été et d’Hiver.

Dow Chemical  a prévu une augmentation globale des ventes d’environ 1 milliard de dollars en faisant la promotion, amplement contestée, de produits écologiques. Ils sont décidés à fournir une bannière décorative en plastique, autour du stade Olympique, avant la cérémonie d’ouverture, ainsi que des places de stade spéciales.

Mais c’est le contrat de 11,25 million de dollars promis à Dow Chemical  pour les 336 panneaux géants qui vont compenser les dépenses pour la bannière. La Commission pour un Londres Durable 2012, en charge de la supervision du respect environnemental des Jeux, a assisté à la résignation de sa commissionnaire Meredith Alexander le mois dernier, en opposition à l’assignation du contrat du stade à Dow Chemical .

Dow Chemical  face à ses multiples responsabilités environnementales

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Ceux qui font campagne en opposition pensent que Dow Chemical  devrait assumer ses autres responsabilités, avant de prétendre à une telle participation aux J.O., plus précisémment celles liés à l’accident de l’Union Carbide à Bhopal, en Inde, en 1984, qui a eu comme bilan 20 000 morts et des dizaines de milliers de blessés gravesDow Chemical a acheté Union Carbide en 1999 et nie la responsabilité de ce dernier pour des dommages causés selon lui par les fuites de gaz mortel de plantes.

« Les Jeux Olympiques modernes ont été fondé ici au Royaume-Uni pour promouvoir la paix et la tolérance entre les peuples du monde. Les valeurs Olympiques sont tournées autour de la célébration de notre humanité commune, » a déclaré Alexander au Guardian après sa résignation.

« Mais les Jeux Olympiques sont aussi un énorme business. Il y a une machine coûteuse derrière les Jeux qui est financée par les sponsors corporatifs. Malheureusement, lorsque ces sponsors sont sélectionnés, l’argent importe plus que les valeurs »

Des collaborations et déclarations peu encourageantes 

Énorme business, en effet. Les sponsors Olympiques de Dow Chemical incluent BP et Rio Tinto, deux entreprises d’extraction de ressources que les groupes humanitaires décrivent comme ayant un bilan environnemental, sécuritaire et humanitaire désastreux.

« Dow Chemical  refuse d’accepter ses responsabilités. Ils affirment suivre les ordres du gouvernement américain en matière de création chimique et n’ont et ne vont jamais verser un centime de compensation, » écrit Len Aldis, secrétaire de la Société de l’Amitié Angleterre-Vietnam, dans un mail à GlobalPost. « Malgré leur bilan, l’argent domine les considérations éthiques et écologiques. Le CIO devrait annuler la participation du sponsor Dow Chemical aux Jeux ».

Global Post / Adaptation Annabelle Laferrère – JOL Press

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