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FIFA: un procureur de la CPI pour éradiquer la corruption?

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Une organisation en reconstruction

L’organisation internationale avait annoncé en mars 2012 une refonte complète de ses institutions. Souvent critiquée pour son immobilisme, notamment en matière d’aide technologique à l’arbitrage, et pour la (trop ?) grande longévité de ses dirigeants – Sepp Blatter, 76 ans, en est, par exemple, le président depuis 14 ans – la FIFA veut par-là prouver sa capacité à se rénover et se renouveler. Au-delà des changements liés à la gouvernance ou aux institutions, l’un des cœurs de cette réforme est clairement la question de l’éthique.

Le ballon rond en eaux troubles : scandales et corruption

Il existe en effet, et ce depuis des années, un climat au mieux obscur autour des processus décisionnels entrepris par l’instance footballistique. Quant à Sepp Blatter, il faut bien admettre qu’il traîne plusieurs casseroles derrière lui. En 2001, ISL (International Sports and Leisure), société de marketing sportif partenaire de la FIFA, fait faillite à la surprise générale. Il est maintenant établi que l’entreprise avait versé plusieurs pots-de-vin à la FIFA pour que celle-ci ferme les yeux sur sa mauvaise santé financière ou encore pour obtenir les droits de diffusion de grandes compétitions. Plus récemment, l’attribution des Mondiaux de 2018 et 2022, respectivement à la Russie et au Qatar, a fait couler beaucoup d’encre. Dans les deux cas, on parle de pots-de-vin versés par les pays organisateur à la fédération. L’Angleterre, recalée au bénéfice de la Russie, a exprimé plusieurs fois son indignation, et même menacé implicitement, par le biais de son ministre des Sports, Hugh Robertson, de se retirer de la FIFA si toute la lumière n’était pas faite sur l’affaire. Mohammed bin Hamman, ex-président qatari de la Confédération Asiatique de Football, a lui été interdit à vie d’exercer une profession dans le milieu du football. Il est accusé d’avoir touché des pots-de-vin dans le cadre de l’attribution de la Coupe du Monde à son pays natal.[image:2,l]

Un homme d’expérience

Parmi les réformes, la FIFA a notamment décidé de séparer le Comité éthique, chargé entre autres de la lutte anti-corruption, en deux corps : d’un côté les enquêteurs et les procureurs, de l’autre les juges chargés de la prise de décision finale. C’est pour diriger ce premier corps que Luis Moreno-Campo est pressenti. Grand amateur de football, ce juriste argentin spécialisé dans les droits de l’Homme s’est fait un nom en poursuivant les principaux dirigeants de la junte militaire argentine (1976-1983), durant laquelle environ 45 000 Argentins ont péri ou « disparu ». Il a également instruit plusieurs affaires de corruption, parfois à des niveaux très élevés de l’État. Il est depuis 2003 le premier procureur de la CPI de La Haye. Il ajoute alors à ses faits d’arme des poursuites contre plusieurs criminels de guerre présumés, notamment en Afrique. Ainsi, Thomas Lubanga, président de l’Union des Patriotes Congolais et accusé de crimes de guerre lors du conflit interethnique en Ituri (Nord-Est de la République Démocratique du Congo), devient le premier condamné de l’Histoire de la CPI. En tant que premier procureur, l’Argentin a lancé près de 30 procédures à ce jour, dont 22 sont encore actives aujourd’hui.

Au-delà du coup médiatique

Toutefois, son mandat à La Haye s’achève ce mois-ci, et sa notoriété et popularité en font évidemment un homme courtisé. Son amour déclaré pour le ballon rond a ainsi attiré l’attention de la FIFA, en quête d’un homme de poigne pour « faire le ménage » en son sein : réputé pour sa détermination et sa volonté de fer, l’homme n’est pas connu pour ménager les puissants. S’il devait au départ retourner à sa carrière de professeur d’université (il a notamment enseigné à Harvard ou encore Stanford, aux États-Unis), son nom apparaît maintenant prioritaire pour diriger les investigations éthiques au sein de la FIFA. Le professeur suisse Mark Pieth, spécialisé dans l’étude de la corruption et choisi par l’organisation pour superviser les réformes liées à l’éthique, l’a confirmé il y a quelques jours, ajoutant que cela « démontrait le sérieux » de la FIFA. Selon certaines sources, la nomination serait même d’ores et déjà effective. Elle sera confirmée dans le mois à venir. Luis Moreno-Ocampo devra alors faire ses premières armes avec le dossier brûlant des pots-de-vin liés aux Mondiaux de 2018 et 2022. Et prouver que sa nomination est davantage qu’un tour de force médiatique de la FIFA.

Global Post / Adaptation Charles El Meliani – JOL Press

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