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Jean Charest, libéral et imperturbable

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Une jeunesse prometteuse

Jean Charest, de son vrai nom John James Charest, est né en 1958 à Sherbrooke, au Québec. Diplômé de droit, il n’exerce son travail d’avocat que brièvement, avant d’être élu, à seulement 26 ans, député pour le Parti progressiste-conservateur à la Chambre des communes du Canada, dont il devient vice-Président. Deux ans plus tard, en 1986, il est nommé ministre d’État à la Jeunesse, devenant ainsi le plus jeune ministre de l’histoire du Canada, à seulement 28 ans.

Viol de l’indépendance du judiciaire

Alors qu’il vient d’être élu ministre d’État à la Condition physique et au Sport amateur en 1988, Jean Charest tente de faire pression sur le juge Macerola au sujet  de l’entraîneur Marc Saint-Hilaire, dont il juge injuste l’exclusion de l’équipe canadienne aux Jeux du Commonwealth. Ayant violé l’indépendance du judiciaire, il est dénoncé et contraint de démissionner.

Retour au pouvoir

Il réintègre pourtant le cabinet et est nommé ministre de l’Environnement en 1991. Il est candidat par la suite à la direction du Parti progressiste-conservateur, emportée finalement par la ministre de la Défense, Kim Campbell. Il est quant à lui nommé vice-Premier ministre et ministre de l’Industrie, des Sciences et Technologies au sein du cabinet éphémère de la grande gagnante.

Sauvé in extremis

Les élections de 1993 changent la donne et le Parti progressiste-conservateur est écarté du pouvoir. Sur les 151 sièges détenus seuls 2 sont conservés : c’est la pire défaite pour un parti gouvernant dans l’histoire du Canada. Jean Charest est sauvé et occupe un de ces deux sièges. Il est ainsi nommé chef du parti intérimaire et confirme sa position en 1995.

Retour dans le camp des gagnants

Jean Charest se prononce pour le « Non » lors du referendum de 1995 sur la souveraineté du Québec, qui l’emporte d’ailleurs. Deux ans plus tard, les élections de 1997 sont plus clémentes aux progressiste-conservateurs, qui remportent 20 des 301 sièges.

Ses débuts au Parti libéral du Québec

1998 marque le tournant de sa carrière politique : en avril, il quitte la politique fédérale et prend la tête du Parti libéral du Québec, qui s’oppose au gouvernement souverainiste du Parti québécois. Elu député de Sherbrooke fin novembre, il fait son entrée à l’Assemblée nationale comme chef de l’opposition officielle, le Parti québécois ayant remporté suffisamment de sièges pour reformer gouvernement majoritaire.

Victoire du Parti

Les élections suivantes, en 2003, sont quant à elles en faveur des libéraux menés par Jean Charest. Le Parti libéral du Québec prend donc le pouvoir, après près de neuf ans de victoire du Parti québécois (PQ). Jean Charest devient ainsi Premier ministre du Québec le 29 avril 2003.

Scandale judiciaire

En 2010 éclate un scandale relatant des faits de 2003-2004, où le ministre de la Justice de l’époque, Marc Bellemare, dénonce des financements politiques douteux, des échanges d’argent comptant, des nominations partisanes de juges et des pressions politiques indues au sein du gouvernement, le tout sous les ordres de Jean Charest.

Le doute s’installe

A la suite des allégations formulées par Marc Bellemare, une commission d’enquête publique, la Commission d’enquête sur le processus de nomination des juges du Québec, est créée sous la direction de Michel Bastarache. Pour l’ancien ministre, l’enquête ne va finalement pas plus loin, le directeur général des élections du Québec (DGEQ) décrétant l’insuffisance de « faits étayés lui permettant de mener plus loin le processus d’enquête ». L’image du brillant et très habile politicien en sort ternie.

Impopularité auprès du peuple

Jean Charest n’est alors pas uniquement pointé du doigt par ses anciens collaborateurs, le peuple québécois s’est également à plusieurs reprises dressé contre le Premier ministre. Dès son premier mandat, la baisse d’impôts qu’il avait promise n’a pas lieu, ce qui lui vaut une forte impopularité auprès des électeurs.

Une majorité de plus en plus difficile à garder

La majorité du Parti libéral s’envole lors des élections de 2007 : son parti n’obtient que 48 députés avec 33 % des votes. L’Action démocratique du Québec fait élire 41 députés et le Parti québécois 36. Jean Charest se voit contraint de demander au lieutenant-gouverneur Pierre Duchesne de dissoudre le Parlement et de convoquer des élections générales l’année suivante. Le Parti redevient majoritaire, mais avec seulement 66 sièges sur 125 (42 % des voix).

Grève étudiante québécoise de 2012

Faisant face à certaines difficultés budgétaires, Jean Charest décide d’augmenter sans concertation les frais de scolarité des étudiants du cycle supérieur. L’impopularité du gouvernement grandit au Québec et les étudiants entament début 2012 une grève contre cette hausse (de 75% sur cinq ans) qui se mue en un « Printemps érable » quand Jean Charest promulgue la loi 78, durant de la 14e semaine de la grève étudiante québécoise, qui met en place, entre autres, l’interdiction de manifestations de plus de 50 personnes organisées sans préavis.

Une loi contre le mouvement

La loi 78 prévoit en outre une série de dispositions visant assurer la tenue des cours malgré la volonté des grévistes de poursuivre le mouvement. Jean Charest menace par cette loi d’amendes allant jusqu’à 100 000 euros, et tente de contenir la révolte étudiante en rendant illégaux leurs moyens d’actions. Il n’est prêt à aucune négociation, et réaffirme l’immuabilité de ses positions dans un spot diffusé le 17 juin 2012. Le bras de fer tourne à l’affrontement politique.

Ni le gouvernement, ni les étudiants ne semblent prêts à céder, et la situation se complique pour Jean Charest, accusé par le Parti québécois d’une non-intervention à but électoral. Le Premier ministre aurait pour intention de laisser perdurer le conflit et de pousser le Parti québécois à s’y associer afin d’y opposer ensuite sa vision de la loi et de l’ordre. Un calcul qui peut se révéler très dangereux, tant cette crise est devenue identitaire au Québec aujourd’hui. Une rumeur de plus en plus insistante semble annoncer la tenue d’élections à l’automne 2012… compte tenu de l’impopularité grandissante du Premier ministre, il est difficile d’imaginer un retournement en sa faveur. Même si en politique rien n’est jamais certain, ni le pire, ni le meilleur. Et surtout même si ce vieux renard en connaît tous les rouages.

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