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La fin de l’«India Shining», ou la chute de l’empire indien

[image:1,f]Alors que l’Inde était paralysée par une grève générale la semaine dernière, un membre renommé de la communauté Twitter, en Inde a écrit : « Quand tout va bien, on pense à l’« Indian Shining » et quand tout va mal, on l’associe à Bharat ».

La fin de l’Indian Shining

C’est vrai. Bharat est l’ancien terme qui désignait l’Inde et qui est maintenant utilisé en référence à la masse de population indienne pauvre et ne parlant pas anglais. Cette partie du peuple n’a jamais été incluse dans la croissance économique, dont le slogan « Indian Shining », créé par le Bharatiya Janata Party (BJP : Parti du peuple Indien), faisait l’éloge en 2004. Il est vrai que les citoyens se sont légèrement enrichis. Certains ont même rejoint la classe moyenne. Mais les plus démunis sont majoritairement restés pauvres, ou du moins dans la catégorie de populations « à risque élevé », dans laquelle rien ne permet de se relever quand tout s’effondre. Et c’est apparemment ce qui est en train de se passer.

De sombres augures

Je m’entretiendrai avec les locaux un peu plus tard dans la semaine pour tenter de comprendre ce que cela signifie pour la population. Mais il est difficile d’exagérer l’importance des enjeux : Forbes Inde écrit, que si jadis l’Inde semblait une future superpuissance incontournable, il n’y a maintenant plus qu’une chance sur deux pour qu’elle soit considérée comme un pays développé en 2050.

Pour ceux qui connaissent l’Inde, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Une inflation d’environ 10%, une croissance de seulement 5,3% sur une période de trois mois fin mars. La roupie s’écroule face au dollar. Et tous les autres indicateurs sont aussi négatifs.

L’effondrement de la croissance

« Le secteur de l’industrie a enregistré une croissance de seulement 2,5% sur l’année entière et a plongé dans le dernier quart de l’année fiscale en comparaison avec l’année dernière » remarque Simon Denyer dans un papier pessimiste pour le Washintgton Post.

« Le secteur des services, qui a une croissance à deux chiffres en temps normal, n’est qu’à 8% » écrit la BBC« Plus inquiétant, la croissance agricole est à moins de 2%, et une faible mousson a été annoncée. C’est ironique que ces évènements aient lieu sous la direction d’un économiste formé à Oxford. »

Les investisseurs étrangers se retirent

« Les investisseurs étrangers, pour le deuxième mois consécutif en mai, ont retiré leurs investissements des marchés boursiers à hauteur de 50 millions d’euros alors que la croissance économique du pays ainsi que la dépréciation de la roupie inquiètent de plus en plus. »

Rajeev Malik, spécialiste en économie à CLSA Singapour, estime que le pays est bloqué sur une croissance plus basse que celle qu’elle pourrait avoir : pas ce « taux de croissance hindou » de 3,5% qui a évité l’économie étouffée par le gouvernement avant les importantes reformes d’il y a  20 ans, mais l’équivalent version XXIème siècle, qu’il appelle « une croissance dévaluée par l’incompétence du gouvernement ».

La nécessité d’un consensus

Et cette incompétence n’est pas prête de laisser place à autre chose. Soutik Biswas, de la BBC, explique : « Ce que l’Inde n’a pas, c’est un consensus politique sur la direction économique que le pays doit prendre. Comment se fait-il qu’un petit groupe de politiciens puisse contrecarrer de grandes réformes ? La politique et l’économie de l’Inde se sont-elles laissées prendre en otage par des intérêts mesquins, avec un gouvernement qui semble au plus faible ? »

Pourtant, même si l’opposition parvient à une motion de censure, le Parti du Congrès de Manmohan Singh pourrait tout de même émerger à la tête du prochain gouvernement. Une autre coalition menée par le parti de l’opposition (BJP) ne serait pas mieux. Et si le « troisième front », qui fait beaucoup parler, venait à se matérialiser, il serait tout aussi problématique voire plus, avec un plus grand nombre de joueurs à se répartir le pouvoir.

Dans ce contexte, les probabilités de 50-50 semblent même plutôt positives.

Global Post / Adaptation Amélie Garcia – JOL Press

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