Site icon La Revue Internationale

Le Mexique aussi connaît son printemps

7174081165_1448f129b8_z.jpg7174081165_1448f129b8_z.jpg

[image:1,l]

L’éveil d’un peuple ?

« Ceux qui reste silencieux ne se feront jamais entendre ». C’était le slogan des quelques 100 000 personnes qui se sont réunis, il y a peu, à Mexico, autour de l’Ange de l’Indépendance, statue-symbole de la capitale. L’objet de leur rage ? Le gouverneur de l’état de Mexico – et candidat à l’élection présidentielle Enrique Pena Nieto et sa proximité avec le réseau de télévision mexicain. Un mot d’ordre, faire comprendre à Pena Nieto que « le peuple s’est réveillé » et ne se laissera pas manipuler par ses trop nombreuses interventions télévisées.

132 : le Mexique connait son printemps

A quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle du 1er Juillet, de jeunes manifestants se sont rassemblés massivement aux cris de « Je suis le 132e » et de « Nous sommes plus de 131 », en référence aux 131 étudiants qui ont chahuté le possible président avant de poster les vidéos le prouvant sur youtube. Certains d’entre eux parlent de « printemps mexicain », mais ces jeunes ne se battent pas contre un régime autoritaire. Ils se révoltent contre un establishment d’un autre ordre : la télévision. Les jeunes accusent les deux réseaux de télévision majeurs, Televisa et TV Azteca de favoriser Pena Nieto et sa femme à entrer pour qu’ils s’installent prochainement à la résidence présidentielle mexicaine Los Pinos

Le premier débat citoyen, une alternative aux médias traditionnels

Mardi 26 juillet, le mouvement naissant a passé un nouveau cap en invitant les candidats à débattre lors d’un débat citoyen, dans le cadre de la création d’une alternative aux médias traditionnels : la « TV des 132 ». Live sur internet. Possibilité pour les spectateurs de poser leurs questions via Google Moderator. Grâce aux dernières technologies, les étudiants ont pu mettre au point le premier débat qui ne soit pas organisé par la commission électorale du gouvernement fédéral. Les candidats ont tous répondu présents. A l’exception de Pena Nieto, qui a refusé de participer à un débat dont les conditions ne « garantissent pas la neutralité ». Une absence que Ducan Wood, professeur à ITAM, a assuré qu’elle allait « porter préjudice à l’image du candidat ». Pour lui, « le siège vide était emblématique ».

90 millions de dollars de communication pour Pena Nieto

Près de 95% des foyers disposent de la télévision à Mexico, deuxième pôle économique d’Amérique du sud. Le rôle de la sphère médiatique dans la campagne est très important et la contrôler est un enjeu de taille pour les hommes politiques. L’allégation selon laquelle les politiciens achèteraient les médias n’est pas nouvelle, d’autant plus dans une ville telle que Mexico, où la corruption est forte. Ces accusations ont été renforcées par un cable diplomatique de 2009, révélé par WikiLeaks, faisait état de paiement de Pena Nieto pour s’assurer une couverture médiatique favorable. Pour beaucoup, c’est une preuve suffisante. D’autre part, si l’important budget de communication du gouverneur – estimé à 90 millions US$ – et les nombreuses campagnes de promotion qu’il finance, exaspère la population, c’est un autre élément qui choque : trois millions de dollards seraient alloués à la rétribution des journalistes offrant une couverture médiatique favorable au politicien.

Televisa, instrument de la PRI ?

Le sujet est sensible. Lorsque le magazine d’information mexicain Proceso et le quotidien britannique The Guardian ont publié des documents faisant état d’un arrangement entre Televisa – le principal acteur du secteur télévisuel mexicain – et Pena Nieto, la réaction de la chaîne ne s’est pas fait attendre. La direction a parlé de « manque de rigueur journalistique » alors que le Pena Nieto a parlé de « fausses informations ». Mais, au delà de ces arrangements, ce qui inquiète les autres candidats c’est la proximité du candidat du Parti Révolutionnaire Institutionnel avec la famille Azcarraga, qui a dirigé Televisa pendant déjà trois générations. Emilio Azcarraga, père de l’actuel PDG, s’était d’ailleurs lui-même décrit comme un « soldat de la PRI ».

L’éteau médiatique s’est brisé

« Eteignez votre téléviseur, allumez vos cerveaux » le message est clair, mais les jeunes manifestants n’en sont pas déconnectés pour autant. Bien au contraire. Ils appartiennent à la génération post-télévisuelle. Plutôt que leur poste ils préfèrent allumer leurs ordinateurs portables. Twitter, Facebook, YouTube… Comme pour tous les mouvements populaires des deux dernières années, les nouvelles technologies tiennent un rôle majeur. Il y a peu l’étau médiatique s’est brisé. Sous la pression de ses jeunes rivaux, Televisa et TV Azteca ont accepté de diffuser les médias citoyens sur leur réseau mais aussi sur leur site internet. Zavaleta, qui a étudié en Argentine, en est aujourd’hui à son 132e événement et, pour elle, les choses sont claires : « C’est le Printemps méxicain ».

GlobalPost / Adaptation Stéphan Harraudeau pour JOL Press

Quitter la version mobile