Site icon La Revue Internationale

L’UMP en désordre de bataille

conseil_national_28_janvier_-_ump.jpgconseil_national_28_janvier_-_ump.jpg

[image:1,l]À quelques jours des législatives, l’UMP décide qu’aucun meeting national ne sera organisé. Jean-François Copé, chef de l’UMP, l’a annoncé, mercredi 30 mai. En cause, d’importantes contraintes de planning empêcheraient les ténors du parti de se retrouver sur scène.

Pas de meeting en commun avant le premier tour

« Nous avons finalement décidé, compte tenu des contraintes de mobilisation des uns et des autres dans cette dernière ligne droite, plutôt qu’un meeting national, nous serions certainement amenés à faire des meetings en commun dans des lieux prédéterminés. »

Ces meetings en commun, il n’y en aura d’ailleurs pas avant le premier tour. Pour Jean-François Copé, la réunion des leaders du parti, samedi 26 mai aurait été assez constructive pour témoigner de l’unité retrouvée de l’UMP avant les élections. Si Jean-François Copé veut se montrer rassurant, le duel qui l’oppose à François Fillon transparaît pourtant largement derrière cette surprenante annonce.

La droite abandonne-t-elle la course à l’Assemblée ?

Une guerre des chefs fait rage dans le village gaulois de l’UMP, à la veille des législatives, et surtout à l’aube de l’élection du nouveau chef du parti, qui n’a plus rien de présidentiel, en octobre prochain.

François Fillon versus Jean-François Copé. Alors que la droite peine à trouver sa place dans le cœur des électeurs, les deux principaux prétendants au titre de chef de l’UMP ne semblent pas tellement prendre conscience de la gravité de la situation et préfèrent se concentrer sur leur avenir plus lointain.

Selon des sondages BVA et CSA publiés jeudi 31 mai et vendredi 1er juin, la gauche est pourtant toujours en tête pour le premier tour des législatives, réunissant 47% des intentions de vote, contre seulement 32,5% pour la droite et 16% pour le Front national. De quoi faire frémir à l’UMP. Et pourtant non, derrière cette fébrile campagne législative, où la droite parlementaire est attaquée sur ses flancs droits et gauches, entre un Front national convainquant et fort d’un record lors de la présidentielle et un centre plus attiré par la gauche, là où se trouvent désormais les postes alléchants, le parti semble déjà avoir accepté sa défaite et veut désormais savoir qui de François Fillon ou de Jean-François Copé aura la lourde charge de reconstruire l’UMP.

La polémique du « leader naturel »

Dans cette guerre où chacun joue sa carrière, tous les coups sont permis. François Fillon, fort d’une certaine légitimité et d’un bon capital de sympathie devant les militants UMP comme devant les Français, ne mâche pas ses mots à l’encontre du tenant du titre à l’UMP.

« La France a besoin d’une droite républicaine qui donne de l’espoir et qui rassemble. Depuis le départ de Nicolas Sarkozy, il n’y a plus, à l’UMP, de leader naturel. Donc, il y aura une compétition. Mais la compétition ne signifie pas la division », déclarait l’ancien Premier ministre lors d’une interview au Figaro magazine, le 23 mai dernier.

Pas de division, dit-il. Et pourtant, dans cette même interview, François Fillon n’a pas hésité à envisager l’éclatement de l’UMP, « le risque est aggravé par la défaite présidentielle et le serait plus en cas de mauvais résultats aux législatives. Le maintien de l’UMP est fondamental. Il n’est pas possible d’exercer le pouvoir, si on n’a pas une formation capable de représenter 30% des électeurs. »

Au même moment, Jean-François Copé, en déplacement dans le Bas-Rhin, appréciait peu l’expression « il n’y a plus de leader naturel à l’UMP ». En marge de son déplacement, celui-ci s’est permis de répondre discrètement à l’ancien Premier ministre, invitant ses « amis » à la « sagesse ». « Vraiment, j’invite tous mes amis, toutes générations confondues à l’UMP, à suivre ce chemin de la sagesse qui consiste à ne se mobiliser que dans la perspective des élections législatives». Une manière habile de gagner du temps et de repousser l’éventuelle guerre fratricide avec son challenger.

Les gâtés face aux mordants

Cette guerre qui devait être reportée au lendemain du second tour des élections est difficile à contenir. Les deux ténors n’en finissent plus de tenter de se vendre au plus offrant. Quand François Fillon y va de son expérience à la tête du gouvernement, de sa popularité auprès des sympathisants et des Français, Jean-François Copé prend les militants UMP par les sentiments.

En meeting dans le sud de la France, les 30 et 31 mai, afin de soutenir les candidats locaux, celui-ci s’est rendu à Port-Leucate, dans l’Aude. Devant ses partisans réunis, il a évoqué la « dimension charnelle » qui le lie à l’UMP.

« Les défaites forment le caractère beaucoup plus que les victoires. D’ailleurs il n’y a qu’à regarder les parcours de ceux qui ont des responsabilités dans notre famille politique. » S’il y a ceux à qui « on a tout donné […] Il y en a à qui, spontanément, on n’a pas forcément donné les choses, et qui sont allés les chercher, comme disait Jacques Chirac, avec les dents. Du coup, ce n’est pas la même histoire et ce n’est pas le même tempérament, forcément » a déclaré le chef de l’UMP, sans citer son « enfant gâté » d’adversaire principal.

Alain Juppé, le troisième homme ?

Dans ce concours de rhétorique, Alain Juppé se fait discret mais n’est pas absent de la partie. Son talent pour se poser en arbitre pourrait d’ailleurs le récompenser. Lui aussi peut justifier d’une forte expérience, d’une popularité, et de cette idée qui court selon laquelle, s’il s’était présenté à la place de Nicolas Sarkozy, le résultat n’aurait peut-être pas été le même.

Mais comme cette campagne n’est faite que de polémiques, Alain Juppé n’échappe pas à la règle. Dans une interview parue dans Paris Match, jeudi 31 mai, un journaliste lui a prêté certains propos que l’ancien Premier ministre  a formellement démentis par la suite.

« Pour l’instant, je les laisse s’écharper entre eux, mais je vais me lancer. Je suis le plus capé. Il n’y a pas photo » pouvait-on lire dans l’hebdomadaire.

Ce à quoi Alain Juppé a immédiatement rétorqué : « Je démens avec la plus grande vigueur les déclarations qui sont rapportées ce matin dans un magazine national à propos de la future présidence de l’UMP. »

Horizon 2017

Pas de fumée sans feu, pourrait-on dire. En attendant, la conquête de l’UMP ne paraît opposer que deux acteurs principaux, pressés d’en finir avec de douloureuses législatives, sans doute perdues d’avance.

« Si je laisse l’UMP à Copé, je ne la reverrai jamais », avançait François Fillon« Dans cette histoire, je joue ma carrière, donc j’irai jusqu’au bout » réplique Jean-François Copé.

Entre eux deux, les législatives passent inaperçues et le slogan, « Ensemble, choisissons la France » sonne un peu faux. Derrière cet « Ensemble » de façade, se cache un duel fratricide, entre deux chefs de file, qui se disputent le leadership du Parti et se préparent surtout pour l’échéance de 2017.

Quitter la version mobile