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Une intervention en Iran est-elle encore évitable?

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Les Etats-Unis ont tracé la ligne rouge : le développement de l’arme nucléaire

Le compte à rebours est lancé. Chaque jour qui passe nous rapproche d’une possible frappe militaire sur les instalations nucléaires iraniennes. Certains experts israéliens vont jusqu’à prédire qu’elle aurait lieu peu après l’élection présidentielle américaine en novembre. « Les Etats-Unis ont tracé la ligne rouge à l’acquisition d’armes nucléaires » rappelle un israëlien, expert de l’Iran, « si l’Iran poursuit son programme tel qu’elle le fait aujourd’hui, je n’ai aucun doute sur la décision que prendra le président américain : attaquer militairement ».

Les sanctions menées par le bloc occidental perdent en poids

Pour beaucoup des spécialistes, l’enlisement des négociations avec le régime, la perte de patience des entreprises européennes face aux sanctions économiques et les joutes verbales incessantes entre leaders du bloc occidental et le gouvernement Iranien sont autant de facteurs qui accroissent le risque d’un recours d’Israël ou des Etats-Unis à une la force militaire. Par ailleurs, l’insistance des entreprises européennes demandant à êtres exemptées de leur participation aux sanctions menées contre l’Iran fait d’autant perdre du poids aux négociations : la levée des sanctions n’étant plus qu’une question de temps, la carotte n’est plus suffisante pour faire avancer le régime vers une issue diplomatique.

Les négociations ne mènent à rien

Les négociations se résument désormais à un dialogue de sourds. Quand le négociateur en chef Iranien menace de ne pas se présenter à la table des négociations lors de la rencontre prévue pour le 18 juin à Moscou, la secrétaire d’état Hillary Clinton réplique que pour poursuivre les négociations, la Russie doit, de toutes les façons, réaliser des avancées concrètes.

L’Iran enrichi de l’uranium à 20% quasi ouvertement

Les Etats-Unis se sont montrés particulièrement inquiets après l’annonce réalisée par l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Nucléaire), le 25 mai dernier, certifiant que l’Iran enrichit de l’uranium à 20%, ce qui n’a aucune application civile. Ce que l’Iran a choisit d’ignorer, assurant une nouvelle fois que son programme nucléaire n’avait qu’un but civil. Pour les spécialistes, cette situation est précaire et ne peut perdurer. « Dans la situation actuelle, je pense que l’éventualité d’une frappe militaire est certaine à 100 % » a affirmé un officier des services de renseignements Israëliens à Global Post. « Ce que nous ignorons, c’est qui frappera et quand ».

Les négociations font gagner du temps au régime iranien

Une analyse correllée par Ilan Berman, le vice-président du think thank American Foreign Policy Council : « Honnêtement les choses ne sont pas pour le mieux […] nous parlons de la reprise de négociations qui, jusqu’ici, n’ont rien apporté aux Etats-Unis et à leurs alliés mais ont tourné à l’avantage de l’Iran qui domine les négociations ». Ilan Berman, comme le gouvernement israëlien, pense que en l’absence d’éléments prouvant que l’Iran ne cherche pas à développer l’arme nucléaire, la poursuite des négociations n’est rien de plus qu’un moyen de gagner du temps pour l’Iran.

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Le durcissement des sanctions est improbable

De nouvelles sanctions à l’encontre de la banque centrale du pays et contre l’importation du pétrole iranien seront mise en place dans les semaines à venir. Mais Ilan Berman fait remarquer que les firmes européennes sont déjà en train de demander des exemptions avant même que ces mesures n’entrent en application. « La diplomatie tourne toujours à l’avantage de l’Iran […] cela donne plus de temps au régime pour travailler sur son programme nucléaire. On voit difficilement ces négociations amener à un durcissement des sanctions déjà en place. Cela rendrait un accord encore plus difficile à trouver ».

Trois exigences pour éviter le recours à l’intervention armée

Le Premier ministre Israëlien, Benjamin Netanyahu, a fait connaître son sentiment à ce sujet dans le journal allemand Bild : « Les exigences accompagnant les sanctions ne sont pas adaptées […] On exerce tout un tas de pressions sur l’Iran, mais pour obtenir quoi au final ? Quasiment rien ! L’Iran pourrait, si elle le voulait, arrêter à n’importe quel moment l’enrichissement à 20 % de l’uranium sans pour autant retarder en quoi que ce soit son programme nucléaire civil ». Le premier ministre israëlien a fait état de trois exigeances auxquelles le régime iranien doit satisfaire pour lui éviter le risque d’une frappe militaire : l’arrêt immédiat du programme d’enrichissement d’uranium, le retrait de toute les réserves présentes dans le pays et le démantellement du bunker nucléaire de Qum qui est un sujet d’inquiétude important à Jérusalem.

Le régime veut tromper la communauté internationale

Certains observateurs pensent par ailleurs que le fait que l’Iran ait accepté il y a peu une inspection complète menée par la communauté internationale a de bonne chance de n’être rien d’autre qu’une ruse. Inquiétude qui s’est vue renforcée par la publication, la semaine dernière d’images montrant la destruction d’importantes installations sur le site de rafinement de Parchin. L’Institut pour la Science et la Sécurité Internationale (ISSI), basé à Washington, qui a révélé ces images suggère que le régime iranien pourrait tenter de détruire toutes traces pouvant suggérer qu’il procède à l’enrichissement d’uranium, avant l’arrivée des inspecteurs mandatés par la communauté internationale.

Effacer les preuves, une méthode qui a fait ses preuves

David Albright, président de l’ISSI, le certifie : « Des bâtiments sont en train d’être détruits et il semble qu’ils pourraient tenter de nettoyer le site, ne voulant pas que quelqu’un l’inspecte ». Si le cas est avéré, c’est une technique qu’a déjà employé l’Iran auparavant. En 2005, six batiments de proportions industriels dans un centre de recherche nucléaire ont été rasés. Ce n’est qu’après cela que l’AIEA a été autorisé à prélever des échantillons dans les décombres. Aujourd’hui ce site est un complexe sportif dédié au foot, réduisant à néant toute chance de trouver aujourd’hui la moindre preuve.

Israël et les Etats-Unis sont flous quant à leur positionnement

Les Etats-Unis autant qu’Israel ont toujours – du moins officiellement – refusé de procéder à des attaques militaires à l’encontre des sites nucléaires iraniens, mais les deux Etats n’ont jamais été très clairs concernant leur vision commune de l’Iran. Pour David Albright la différence de point de vue entre les deux pays peut être mesurée aux capacités de l’un et de l’autre à offrir une réponse en cas de militarisation des sites nucléaires iraniens. « Ce sont leurs capacités militaires respectives qui les amèneront à envisager le problème différemment. Les Etats-Unis n’auraient aucun problème pour détruire le site d’enrichissement de Fordow si ils le souhaitaient » affirme-t-il en faisant référence au complexe sous-terrain à l’extérieur de la ville de Qum. « S’ils ne le font pas c’est que les Etats-Unis ont peut-être des informations sur le programme nucléaire iranien dont Israël ne dispose pas et qui lui permettent d’avoir une plus grande sérénité quant à l’avancée du programme militaire iranien. Si les Etats-Unis venaient à avoir quelque doute que ce soit sur le développement d’une bombe nucléaire, ils interviendraient ».

Une situation instable en Israël

Mais, la situation reste d’autant plus instable et imprévisible alors qu’un certain nombre d’Israëliens sont aujourd’hui convaincus que leur gouvernement se prépare à attaquer l’Iran et les luttes publiques auxquelles se livrent les dirigeants concernant la stratégie à adopter, n’ont pas affaibli cette certitude de l’opinion publique. Il y a peu, le directeur du Comité chargé de la Sécurité et des Affaires Etrangères, le général Benny Gantz, a tourné en dérision le directeur du mossad, Meir Dagan, qui pendant des mois a défendu la thèse selon laquelle une intervention militaire en Iran serait inutile. « Les gens parlent de choses qu’ils ne connaissent pas » soutiens Benny Gantz. « Ce n’est pas parce qu’ils savaient un jour quelque chose sur l’Iran qu’ils savent quelque chose aujourd’hui ».

L’intervention militaire n’est pas la thèse à privilégier

Mais tout le monde ne voit pas la situation de la même façon que Benny Gantz. Meir Javedangar, un professeur du Centre Interdisciplinaire de Herzliya, n’envisage pas une attaque contre l’Iran, du moins pas avant les élections américaines et voit un point positif dans ce constat : « Le fait que les chances qu’une attaque ait lieu ce soit – pour l’heure – estompée nous permettra de nous concentrer sur des méthodes – plus efficaces qu’une intervention armée – pour isoler le gouvernement iranien ». Il nuance néanmoins : « Je pense, par contre, qu’après l’élection américaine l’Etat iranien devra s’inquiéter d’une intervention militaire américaine, particulièrement si Israël, lui, se tient au calme ».

Global Post / Adaptation Stéphan Harraudeau – JOL Press

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