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Valérie Trierweiler: le désir et le pouvoir

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Nathalie Brion revient sur l’affaire du tweet de Valérie Trierweiler qui accapare la scène médiatique depuis sa publication. Elle s’interroge sur les ambiguités de la Première Dame et sa difficulté à composer avec les contraintes de son nouveau statut.

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140 signes et un tweet ont mis en émoi la planète politique parisienne : le soutien apporté par Valérie Trierweiler à Olivier Falorni, rival de Ségolène Royal à la Rochelle, et susceptible de mettre en échec les ambitions de celle-ci de devenir la première femme de l’histoire présidente de l’Assemblée Nationale.

Stratégie politique?

On pourrait se dire qu’il s’agit là d’une stratégie à 8 bandes du Président de la République, finalement désireux d’écarter son ex-compagne de responsabilités politiques potentiellement difficiles à gérer. Sa mise à l’écart ratée du meeting du Bourget, la tentative de rattrapage ratée également lors du grand meeting de Rennes pourraient confirmer cette thèse. François Hollande ne serait, en ce cas, ni Churchill, ni Mitterrand, mais un petit Machiavel. Soit.

Un comportement ambigu

Pourtant, le comportement de Valérie Trierweiler ainsi que ses contradictions interrogent. Voilà une femme qui, emboitant le pas de son compagnon, refuse tout mélange entre vie publique et vie privée, mais est omniprésente et demande, devant les caméras, le soir du 6 mai à François Hollande, qui vient d’être élu Président, « un baiser sur la bouche ». Absente mais pourtant centrale.

Voilà une femme qui refuse qu’on la nomme Première dame de France, mais s’auto-promeut « Première journaliste de France » ou « Atout cœur de la France ». Outre le fait qu’existe tout de même un problème déontologique à exercer le métier de journaliste lorsque toute objectivité politique est impossible, se définir soi-même comme la Première journaliste de France présente une dimension quasi-stalinienne. Inquiétant.

L’indépendance et le pouvoir

Voilà enfin une femme qui revendique son statut de femme libre, indépendante, élevant seule ses enfants, mais qui participe avec son amie Nathalie Mercier, attachée de presse du staff de campagne, à la campagne présidentielle. Une femme qui déclare vouloir rester hors du champ politique, hésitant même un temps à venir s’installer dans le Palais de l’Elysée, mais qui accepte pourtant de disposer d’un cabinet à l’Elysée et déclare avoir Eleanor Roosevelt pour modèle.

De même, nous déclare la journaliste, « on ne me bride pas ». Mais qui souhaite la « brider » ? Ne s’agirait-il pas plutôt de se responsabiliser et d’en accepter les conséquences plutôt que de renâcler comme un jeune poulain plus compliqué et capricieux que complexe ? De comprendre que, quoiqu’elle puisse penser en privé de Ségolène Royal, celle-ci a une carrière politique, est élue et, à ce titre, présente une légitimité incontestable aux yeux des Français – qu’ils la soutiennent ou la combattent.  Il ne relève en aucune façon du rôle de la Première dame de France d’interférer, en plein second tour des législatives, dans la façon dont le PS et le Président gèrent positionnements, rivalités et accords.

Trouver sa place

Tout dans le comportement de Valérie Trierweiler au regard de ses propres déclarations exprime une immense difficulté à trouver et assumer sa place. Et ce avec une dimension presque pathologique. De son propre aveu, François Hollande lui ferait « confiance pour tout sauf pour ses tweets ». Comme si, par moment, elle pouvait cesser d’être maîtresse d’elle-même et se soumettre, au détriment de tout le reste, à des impulsions soudaines. C’est cette même absence de maîtrise qui a nui à Nicolas Sarkozy au point de susciter le rejet très profond d’une France qui aspire non pas à ne pas changer mais à changer dans le calme, la modération et la tempérance. Dans la « normalité ».

Un désir de reconnaissance

La peur est bien souvent la face cachée du désir, nous dit la psychanalyse. Or, tout semble indiquer là une peur ne masquant en réalité qu’une formidable envie de pouvoir et de reconnaissance. L’ensemble du corps social français l’a compris. A Madame Trierweiler de le comprendre mais, surtout, de l’assumer et d’exercer en cohérence, dans l’équilibre et pour la France le pouvoir qui lui est désormais dévolu. Elle est à l’origine du premier faux pas de son compagnon au regard de l’opinion en le faisant passer pour un homme incapable de maîtriser son couple. A défaut de positionnement clair, elle risque de devenir son talon d’Achille à un moment où la France a besoin d’un gouvernement uni et tout à la tâche de redresser le pays.

Les Français ont d’autres préoccupations

L’Europe tangue, la crise est installée et ses conséquences sociales apparaissent avec de plus en plus d’acuité. Partout, les extrêmes montent. Le devoir et non le rôle de notre « non-Première dame de France » est aujourd’hui de dépasser son psychisme et ses problèmes personnels, d’exploiter ses compétences journalistiques ailleurs qu’à Paris Match, de sortir de rivalités féminines de bazar qui portent atteinte à l’image des femmes au pouvoir et sont aussi décevantes de sa part. Un bon tiers des femmes françaises sont divorcées et composent, au cœur de familles composées et recomposées, avec celles qui les ont précédées sans que cela n’aboutisse pour autant à une tentative d’assassinat symbolique sur la place publique.

Mais plus que tout, les Français ont bien d’autres préoccupations et attendent bien autre chose de leurs élites que l’étalage impudique de conflits personnels.

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