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François Hollande devra-t-il boycotter le XIVe Sommet de la Francophonie à Kinshasa ?

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Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo, accueillera du 12 au 14 octobre 2012 le XIVe Sommet de la Francophonie. Les Chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) se réuniront autour du thème relatif à la Francophonie, aux enjeux environnementaux et économiques face à la gouvernance mondiale.

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Cette problématique a été retenue à l’occasion de la vingt-septième session de la Conférence ministérielle de la francophonie (CMF) – sous la présidence de la Présidente de la Présidente de la Confédération suisse et cheffe du Département fédéral des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey – qui s’était tenu à Paris du 1er au 2 décembre 2011.

Les conditions de l’Élysée

L’incertitude de la présence à Kinshasa de François Hollande réjouit la plus grande majorité des opposants congolais. En revanche, elle contrarie le gouvernement local et les kabilistes. En effet, le président de la République française aurait posé des conditions à sa participation au XIVe Sommet de la Francophonie – notamment la réforme de la Commission électorale nationale et indépendante (CENI) en vue de la transparence des prochaines élections provinciales et le jugement des « vrais coupables » dans l’affaire Floribert Chebeya[1].

Il est évident que, sous la seconde présidence socialiste, l’Afrique sera traitée de la même façon que les autres continents. Mais faudra-t-il pour autant, au nom de la realpolitik, s’afficher systématiquement aux côtés des Chefs d’États peu soucieux du respect des droits fondamentaux et de la bonne gouvernance ?

Les conséquences du boycott

La France de François Hollande ne doit surtout faire attention de ne pas être traitée de donneuse de leçons envers les Africains, indépendamment de son judicieux argument sur les graves manquements de la République Démocratique du Congo au plan de la démocratie. L’absence du Président français empêcherait-il le gouvernement congolais de ne plus violer les droits fondamentaux de la personne humaine ? Aurait-elle de l’effet sur la lutte contre la corruption et le népotisme ? Au contraire, le boycott pourrait pousser le gouvernement congolais à développer, au détriment de la Francophonie, le partenariat avec le Commonwealth et à intensifier ses échanges, au grand désespoir des Occidentaux, avec la Chine.

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Dans le passé, plus précisément en 1991, le couple François Mitterrand et Jacques Chirac était parvenu à délocaliser le sommet de la Francophonie de Kinshasa à l’Île Maurice. Cela avait-il soulagé la souffrance du peuple zaïrois ? Sans le recours aux armes, le mobutisme aurait perduré. La politique n’a-t-elle pas horreur du vide ? « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie. Beaucoup d’internationalisme en rapproche. » François Hollande, sauf s’il estime que l’Afrique ne contribue guère dans une certaine mesure à la grandeur et à la prospérité de la France, devra méditer sur cette phrase de Jean Jaurès.

Une occasion rêvée

Le XIVe Sommet de la Francophonie pourrait permettre à François Hollande de lancer un message ferme à l’attention des Chefs d’État africains et salutaire au profit des populations africaines. François Mitterrand ne s’était-il pas illustré, s’agissant du dialogue entre le Nord et le Sud, par les discours de Cancún et de La Baule ? Cela devrait être l’occasion de se situer à l’antipode du discours de Dakar. Ainsi le socialiste saisirait-il habilement cette occasion pour marquer sa différence avec la vision africaine de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, et se montrer intransigeant par rapport à la situation dans l’Est du Congo-Kinshasa en dénonçant la vision relative à une éventuelle partition.

Ne pas se rendre à Kinshasa n’empêcherait nullement les injustices de frapper davantage les plus démunis, ni de maltraiter la démocratie. « En politique, disait François Mitterrand, on ne contourne pas un obstacle mais l’on s’appuie dessus. » Au moment où la partie orientale de la République Démocratique du Congo est en proie à une déstabilisation soutenue par le Rwanda, François Hollande pourrait clarifier la responsabilité morale de la France au regard de l’opération turquoise. Ainsi devrait-il graver dans le marbre, sur le sol africain et devant ses homologues francophones, le contour de sa politique africaine.

[1] Président de l’organisation non gouvernementale La Voix des Sans Voix (VSV), qui a été retrouvé mort en juin 2010 dans sa voiture.

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