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Harcèlement sexuel, une loi avant fin juillet

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Un homme, une abrogation

Le 4 mai 2012, le Conseil Constitutionnel abrogeait la loi sur le harcèlement sexuel, jugée trop floue. A l’origine de cette critique, un homme : Gérard Ducray, ancien député du Rhône. L’ancien Secrétaire d’État au tourisme de Valéry Giscard d’Estaing est condamné en appel en 2011 pour harcèlement sexuel à trois mois de prison avec sursis et 5000 euros d’amende. Ses avocats, Mes André Soulier et Claire Waquet, se tournent alors sur la constitutionnalité de l’article sur le harcèlement sexuel, plaidant qu’il permet « tous les débordements, toutes les interprétations ».

Un vide juridique

L’article en question, du 17 janvier 2002, stipulait : « Le fait de harceler autrui dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende ». Saisi, le Conseil constitutionnel concède le manque de précision de la loi et décide de l’abroger. L’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) est favorable au retrait de la loi, car elle estime pour sa part que l’imprécision empêchait les victimes d’être protégées correctement. Elle demande en revanche une abrogation différée, pour éviter le vide juridique. Contraire au principe de non rétroactivité de la loi pénale, cette idée est rejetée, et les victimes se retrouvent dans l’impossibilité de faire entendre leur voix.

Une situation d’urgence

Najat Vallaud-Belkacem, fraîchement élue ministre des Droits des femmes, entend mettre fin à cette situation de détresse qui touche femmes et hommes victimes de harcèlement sexuel, depuis le 4 mai 2012 privés de tout recours en justice. Elle pense aussi à « celles qui ont vu les actions qu’elles avaient engagées s’éteindre brusquement ». En effet, les procédures en cours lors de l’abrogation n’ont pas vu suite, faute d’un manque de législation. En collaboration avec la ministre de la Justice, Christiane TaubiraNajat Vallaud-Belkacem recompose un texte visant à combler ce vide juridique. Au vu de l’urgence de la situation, le gouvernement décide de recourir à une procédure accélérée (une lecture par assemblée) afin de parvenir à un vote définitif au plus vite.

60 amendements déposés

Présentés au Sénat le mercredi 11 juillet 2012, 60 amendements ont été déposés pour ce nouveau projet de loi sur le harcèlement sexuel. La Droite et le Centre s’accordent avec le gouvernement sur le texte, mais entendent élaborer un projet de loi irréprochable au niveau juridique. La précision ayant fait défaut à la première version de la loi. Le texte discuté tente ainsi d’être le plus précis possible sur ce qu’est le harcèlement :

« Le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos, comportements ou tous autres actes à connotation sexuelle qui, soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son égard un environnement intimidant, hostile ou offensant. »

Chantage sexuel

Le cas du chantage sexuel est également prévu par ce nouveau texte, qui lit : « Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user d’ordres, de menaces, de contraintes ou de toute autre forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d’obtenir une relation de nature sexuelle, que celle-ci soit recherchée au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».

Sanctions et niveaux de gravité

Auparavant puni d’an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende, le harcèlement sexuel sera sanctionné plus sévèrement à l’avenir. Trois niveaux de gravité se distingueraient et impliqueraient des sanctions différentes : les harcèlements simple et aggravé (à répétition) seraient punis de 2 ans de prison et de 30 000 euros d’amende; quant au harcèlement avec circonstances aggravantes (relation d’autorité, délit sur mineur), il serait puni de 3 ans de prison et de 45 000 euros d’amende.

Critiques

Un alourdissement des sanctions qui satisfait certains, mais un texte qui en contrarie d’autres. Des associations craignent que ces nouvelles définitions empiètent sur celle du viol, de la tentative de viol ou de l’agression sexuelle, et permettent ainsi aux coupables d’être sanctionnés de peines plus légères. Le rapporteur Alain Anziani (PS) souligne pourtant la différence entre les délits : « Quand nous parlons de harcèlement sexuel, nous sommes dans un autre univers, il n’y aura pas d’attouchements, de contacts physiques ».

Etapes

Après son examen par le Sénat, le projet de loi passera entre les mains des députés le 24 juillet, afin d’arriver à un vote définitif avant la fin du mois. Une loi qui tentera de contenter tout le monde, mais surtout les victimes, qui attendent avec impatience de retrouver leur dignité. Le texte original prévoit d’ailleurs de punir d’un an de prison et de 3.750 euros d’amende le fait de discriminer une personne ayant subi ou refusé de subir le harcèlement.

Protection et dissuasion

Une meilleure protection contre le harcèlement sera mise en place, dont l’objectif est de mettre un place un cadre suffisamment dissuasif, pour que la loi n’ait plus lieu d’être appliquée.

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