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Il faut sauver France Soir !

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La nouvelle vient de tomber. France-Soir, c’est fini. Le Tribunal de Commerce de Paris a finalement prononcé lundi 23 juillet 2012 la liquidation du titre historique. Une seule offre en lice pour la reprise du titre était celle du groupe Lafont Presse, rejetée à l’unanimité par les salariés et les élus de France Soir. Fin de partie pour ce titre légendaire.

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23 Juillet 2012 : belle journée ensoleillée, douce et clémente. Beaucoup d’entre vous sont partis, rideaux fermés, valises bouclées. Paris est calme. Les rues sont fluides et les gens marchent plus lentement. Et pourtant mon cœur est sombre. Peu m’importe que l’on puisse sourire à l’énoncé de cette phrase. Je suis en tempête. On ne peut pas banaliser encore cela. France Soir est mis en liquidation. France Soir est mort.

Encore un. Encore un titre qui s’en va, après La Tribune version papier, où je m’étais rendue pour montrer, modestement, ma solidarité vis-à-vis des journalistes présents ce soir-là.

Encore un petit bout de démocratie, même modeste mais un petit bout, en moins

France Soir, c’est un des plus vieux titre de la presse française. Il existait depuis les années 40. Il a été un des titres les plus vendus dans notre pays. France Soir, c’est Lazareff. C’est l’esprit et la lettre qui régnaient naguère et encore il y a peu. C’est le désir plus fort que la raison. C’est cette soif de comprendre et d’informer. Dominique de Montvallon tenait courageusement le gouvernail et arborait une belle énergie et un véritable professionnalisme. France Soir faisait partie de notre patrimoine culturel et médiatique. Il m’a accompagné pendant des années. Je dois tant et tant à la presse…

Une marque vivante

Aujourd’hui encore, son nom est une marque vivante. Tout le monde connaît ce journal populaire. Il a un capital de notoriété acquis. Il a même un capital de sympathie intacte. Je crois en la marque. Je crois en ses chances de faire évoluer son modèle économiqueFrance Soir reste dans l’imaginaire collectif de notre pays… Dans le même temps, il y a des erreurs. Il y a eu l’épisode russe, comme je dis et une gestion parfois un peu extravagante. Il y a eu des défilés de patrons, de plumes… C’est entendu. Il était donc à reprendre. Pendant des jours et des jours, peu de candidats se sont bousculés, au portillon.

Proposition du groupe « Entreprendre »

Or, là, il existait une proposition du groupe « Entreprendre ». Même si elle n’était pas parfaite, au moins elle était concrète et réelle.

Ce groupe de presse suscité peut s’enorgueillir de 80 titres et sauf erreur de ma part, n’a jamais déposé de bilan, en presque 30 ans d’exercice journalistique. Ce groupe est installé et identifié. Chaque mois, ils font leur boulot, font vivre des salariés et se lancent sur les chemins de l’audace. Quand je les regarde, de loin, je m’attache toujours de voir le positif de la situation. Oui, les titres de Robert Lafont participent à ce que je considère comme indispensable à un pays démocrate comme la France, mon pays : le pluralisme de l’information.

Plaidoyer pour la diversité de la presse écrite

Je plaide pour que la presse écrite reste un jardin à la française

Comme un jardin, elle doit exprimer sa diversité, le désir de la curiosité, le triomphe de la culture sur le sauvage, la victoire du réfléchi sur le spontané facile ou imbécile. Comme dans un jardin, nous devons nous déplacer entre les murs d’éditos ou le long des escaliers d’eau aux nouvelles du jour, de pelouses bordées de buis comme des articles en tout genre et des arbres taillés savamment en rideau médiatique.

Je plaide pour la diversité de la presse écrite.

Je plaide pour sa version papier, de peur que les mots s’envolent, dans une société marquée par le consumérisme et une société qui se dilue.

Il ne s’agit pas de penser la communication comme « médiacentrée ». Mais il m’a semblé, ce soir, cette nuit soudain glacée, (quand je pense à ces journalistes), nécessaire qu’une communicante, une « spin doctor à la française » signe le caractère ultime et capital de la presse écrite et de sa diversité.

Je suis en tempête. Pourquoi ne pas essayer ? Pourquoi ne pas donner une chance supplémentaire à ces journalistes ? Pourquoi, effectivement, à l’heure où ce gouvernement donne la priorité des priorités à l’emploi, ne pas dire : « Banco, on vous donne 1 an pour tenter l’aventure et bonne chance.. » 

Le salut de la presse écrite est un devoir pour tous 

Aux politiques de réagir. Aux juridiques de comprendre qu’en matière d’information, nous sommes dans une dimension sociétale particulière. Non, les télévisions ne sont pas des entreprises comme les autres. Non, les journaux ne sont pas des groupes comme les autres. Nous devons acter cela, comprendre cela.

Nous devons être fiers de nos mousquetaires de l’information. Nous devons prendre conscience à quel point, l’information est capitale dans des temps tourmentés et mondialisés.

Nous devons sensibiliser l’opinion publique et réveiller les mentalités

Certes, c’est la crise. Est-ce une raison pour les abandonner ?

J’appelle le politique à sauvegarder France Soir.

J’appelle les financiers à développer une aide.

J’appelle les lecteurs à participer à la démarche.

Il n’est jamais trop tard.

Tandis que je regarde la fenêtre, j’écoute la nuit, je voudrais trouver une solution, je voudrais combattre ces fatalités successives… Je suis tellement en tempête et je m’en veux aussi d’accepter aussi facilement la mort de France Soir.

Je n’ai que ces mots que je dépose au grès du vent. Je n’ai que ces quelques mots, en faveur de France Soir, en faveur de ces femmes et ces hommes de presse, en l’honneur de notre démocratie. Je souhaite qu’ils vagabondent sur les nuages qui traversent le ciel bleu marine de cette nuit minérale où décidemment je n’arrive pas à dormir. Je souhaite que ces mots soient utiles. Enfin.

>D’autres informations sur Ghyslaine Pierrat en allant sur son site

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