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Industrie automobile: les français ont perdu le cap

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A peine deux jours après la clôture de la Conférence sociale, la nouvelle tombe comme une première épreuve de force pour le gouvernement Ayrault. Le groupe PSA Peugeot Citroën a annoncé, jeudi 12 juillet, la fermeture de son usine d’Aulnay sous Bois en 2014 et la suppression de 8 000 postes dans le groupe.

Alors que l’industrie automobile mondiale tient la route, malgré les épreuves et malgré la crise, le secteur français est en difficulté et n’arrive pas à retrouver une vitesse de croisière pour s’adapter à la concurrence.

Pourquoi tant de difficultés ? Quelles erreurs stratégiques ont commis les dirigeants du groupe ? Comment leurs homologues américains et allemands trouvent-ils les moyens de surmonter la crise, malgré tout ?

Depuis un an, PSA vit un véritable enfer. La crise frappe de plein fouet la société qui a déjà supprimé 6 000 emplois en 2011.

Une succession de choix dangereux

Pour expliquer cette succession d’échecs, plusieurs éléments. PSA est avant tout une société européenne qui s’adresse à des Européens. Au premier semestre 2012, PSA a réalisé 60% de ses ventes en Europe contre 53% pour son concurrent Renault, qui se concentre davantage sur les marchés étrangers.

L’industrie française reste sur un continent européen en crise au lieu de s’activer sur les pays en croissance. En six mois, les ventes de de PSA à l’international ont diminué de 13%. Les parts de marché de l’entreprise en Chine ne sont d’ailleurs que de 3,4%.  

Finalement, outre les erreurs commerciales de la société, PSA s’est désormais engagé dans de dangereux choix stratégiques.

Alors que la marque est attendue sur une gamme généraliste, accessible au plus grand nombre, Peugeot tente le « haut de gamme ». Avec la sortie de sa nouvelle DS, Peugeot cherche une porte de sortie, à l’allemande. Mais la concurrence est rude à l’est du Rhin et seul le temps dira si les choix de PSA étaient judicieux.

General Motors, un sauvetage à l’américaine

Installé à Détroit, dans le Michigan, General Motors est, depuis sa création en 1908, un joyau de l’industrie américaine. Si, aujourd’hui, la société vit de nouveaux jours, elle n’a pas été épargnée par la crise.

Une crise qui a frappé la société de plein fouet depuis 2005. Attaqué par la concurrence du Japon, affaibli par une mauvaise réactivité commerciale, endetté, General Motors perd 3,3 milliards de dollars en un trimestre et ses dettes s’élèvent à 292 milliards.

General Motors entame alors un vaste programme de restructuration. 25 000 suppressions d’emplois sont envisagées.

A cette première crise succède la fatale réplique de 2008. Le secteur automobile américain est en première ligne. L’action du groupe tombe à son plus bas niveau depuis 50 ans. La cessation de paiement est envisagée. Les mois se succèdent et il faudra attendre le 19 décembre pour que Georges W. Bush accorde une aide de 17,4 milliards à General Motors et Chrysler.

Malgré cette aide, de nombreuses rumeurs circulent. On parle alors de fermetures d’usines, de millions d’emplois directs et indirects supprimés.

Quelques mois plus tard, le gouvernement accorde une aide supplémentaire de 5 milliards à General Motors contre un nouveau plan de restructuration. De nouvelles suppressions d’emplois, de nouvelles concessions fermées.

Le couperet tombe alors et le 1er juin 2009, l’entreprise tombe sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine des faillites. General Motors est alors partagé en plusieurs parts dont 60% appartiennent désormais au gouvernement fédéral américain.

Ce n’est qu’en 2009 que la société annonce officiellement sa sortie de la faillite. Une annonce qui sera couronnée de succès, le 19 novembre 2010, la société fait un retour triomphal en bourse. General Motors est sauvé.

Les allemandes ne connaissent pas la crise

L’industrie automobile allemande ne survit pas à la crise, elle surfe sur la vague. Alors que PSA, son voisin européen, fait de mauvais choix stratégiques, les grandes marques allemandes semblent se faufiler partout où elles sont les bienvenues.

Depuis le début de l’année, les ventes de BMW ont progressé de 6,4%, celles d’Audi de 14% et celles de Porsche de 13%.

Pour le magazine américain Fortune, 10 raisons peuvent expliquer la bonne marche de l’industrie.

L’Allemagne a tout d’abord une longue histoire avec l’automobile. Le magazine cite notamment le brevet déposé par Karl Benz pour sa première voiture en 1886, son brevet pour le moteur thermique en 1879.

Une tradition qui charge d’histoire les voitures allemandes. Les capacités d’innovations de l’industrie sont également un des secrets de la réussite des automobiles allemandes. Si la France a régulièrement un train de retard, les ingénieurs allemands ont un don pour l’anticipation.

Si les Allemands sont de bons ingénieurs, ils sont également bons financiers. Pour le magazine Fortune, ils savent tout simplement vendre leurs produits au bon endroit et au bon moment. Alors que PSA vend la majorité de ses produits en Europe, les sociétés allemandes se sont lancées à l’assaut de la Chine, là où la croissance est encore positive. Résultat : les ventes d’Audi ont augmenté de 44,2% en Chine au mois de mai. Celles de BMW ont augmenté de 31,5%.

La légitimité des Allemands sur le secteur « premium » n’est plus à prouver. L’effet « luxe » fait vendre. Si les voitures allemandes sont chères, leur prix est paradoxalement la raison de leur succès.

Finalement, le verdict du magazine Fortune est sans appel, les voitures allemandes sont tout simplement les meilleures. Sur leur créneau, les Allemands n’affrontent personne. La marque américaine Lexus pourrait sans doute se placer en concurrence des marques allemandes, mais son blason n’est pas encore assez glorieux pour jouer dans la même cour. La mythique marque américaine Cadillac, branche de General Motors, doit d’abord se remettre de la crise et faire de nouveau ses preuves pour s’estimer digne de concurrencer les Allemandes. Finalement, la nouvelle DS de Citroën a fait une bonne entrée sur le marché, mais seul le temps dira si cette tentative d’implantation de PSA sur le marché du premium n’était qu’un coup d’épée dans l’eau.

Enfin, Ferrari et Lamborghini, de grands noms, certes, mais qui vendent vingt fois moins de voitures que Porsche.

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